La justice connaissait le risque de prescription du dossier chlordécone mais elle a instruit pour comprendre les faits

Rémy Heitz procureur de la République près le tribunal judicaire de Paris

Le procureur de la République de Paris, en charge de la plainte liée à l’utilisation du chlordécone aux Antilles, s’exprime dans les colonnes de France-Antilles. Pour lui, la prescription semble inévitable dans ce dossier. Elle aurait même été effective dès le dépôt de plainte en 2006. 

Pour Rémy Heitz, le procureur de la République de Paris, les faits présumés sont prescrits depuis le dépôt de la première plainte des associations citoyennes et environnementalistes en 2006.

Février 2006, une plainte avec constitution de partie civile pour empoisonnement est déposée. Une qualification criminelle. Elle concerne des faits sur une période allant de 1981 à 1993, date à laquelle le chlordécone a été interdit. A l’époque la prescription du crime d’empoisonnement est de 10 ans.

1993-2006 : 13 ans, trop tard selon ce magistrat du parquet. Même peine pour les autres plaintes notamment, celles de la direction de la consommation et des fraudes. Des délits prescrits de 3 ans cette fois. Le salut pourrait venir des actes de procédures où des demandes d’informations des différentes parties civiles, mais le magistrat semble sceptique. Au passage, il indique que seul Me Harry Durimel a régulièrement fait des demandes.

Au-delà de la froideur de la procédure judiciaire, Rémi Heitz inflige une douche froide aux populations de Guadeloupe et de Martinique.

Les différentes pièces dans ce dossier n'ont jamais disparu

 

Rémi Heitz veut tordre le cou à cette affirmation. Selon le magistrat du parquet aucune pièce d’instruction n’est manquante dans l’épais dossier qui se trouve sur le bureau du tribunal judiciaire de Paris. Aucune pièce n’a disparu. L’incompréhension viendrait du fait que, durant les investigations ordonnées par le pôle de l’instruction, les enquêteurs ont souligné que des éléments qui auraient pu être utiles au dossier n’ont pas pu être retrouvés ou ont été altérés.

Le procureur de la République qui a tenu à s’exprimer, longuement, dans les colonnes de France Antilles, fait une exception au secret de de l’instruction parce que, selon lui, il y a des interrogations légitimes auxquelles il faut apporter des réponses. Pour le commentaire c’est sans doute une manière de préparer l’opinion publique à certaines décisions.

 

l'avocat et Maire de Pointe-à-Pître Me Harry Durimel avec son adjointe et avocate Me Tania Galvani

Invitée ce mardi matin de La Grande Interview sur Guadeloupe La 1ère La Radio, Tania Galvani adjointe au maire de la ville de Pointe-à-Pitre, et avocate, a exprimé son incompréhension. Selon elle, c’est inadmissible que les règles de procédures privent les populations empoisonnées de cette possibilité de réparation.

Tania Galvani adjointe au maire de Pointe-à-Pitre

Tania Galvani adjointe au maire de la ville de Pointe-à-Pitre,

Avocat historique de ce dossier, Maître Harry Durimel avait emprunté dès 2006 la voie judiciaire à travers une plainte déposée avec les associations de défense de l’environnement contre l’empoisonnement des populations des Antilles françaises et de leurs sols au chloredécone.  Réagissant aux propos du procureur de Paris, Harry Durimel, estime que les infractions relevées sont intemporelles.

Maître Harry Durimel 

Maître Harry Durimel 

Pour Harry Durimel, c’est une tentation automatique voir naturelle de l’Etat d’occulter ses fautes. Le combat ne s’arrête pas là, car grâce à cette plainte toutes les informations pour se défendre ont été recueillies.  

Me Harry Durimel

Maître Harry Durimel 

 

Une grande manifestation est prévue le 10 avril prochain en Martinique pour dénoncer la possible prescription de cette plainte. Le défilé du 27 mars dernier avait rassemblé entre 5 et 15 000 martiniquais.