Le chef de la diplomatie américaine pousse le Premier ministre haïtien à une transition "urgente"

Manifestation pour la démission du Premier ministre Ariel Henry, à Port-au-Prince, Haïti, 7 mars 2024
Anthony Blinken s'est entretenu jeudi (7 mars) avec le Premier ministre haïtien Ariel Henry et a plaidé pour une transition politique "urgente", a déclaré un responsable américain, appelant à une "réponse internationale" à la crise que traverse Haïti.

Antony Blinken a parlé avec le chef du gouvernement haïtien du "besoin urgent d'accélérer la transition vers un gouvernement plus large et inclusif, qui comprenne bien plus de forces politiques, et qui ait l'ampleur nécessaire pour conduire le pays à travers une période électorale", a indiqué Brian Nichols, haut responsable du département d'Etat, devant l'organisation Council of the Americas.

Les Etats-Unis plaident pour une réponse internationale comme pour l'Ukraine ou Gaza

Le pays, actuellement sans président ni parlement, n'a connu aucune élection depuis 2016 et le Premier ministre contesté, nommé par le président Jovenel Moïse juste avant son assassinat en 2021, aurait dû quitter ses fonctions début février.

Le secrétaire d'Etat américain s'est également entretenu avec le président du Guyana Mohamed Irfaan Ali, qui assure la présidence tournante de la Communauté des Caraïbes (Caricom), avec lequel il a évoqué la "diplomatie intensive" menée par le groupe pour répondre à la crise en cours.
"Nous devons urgemment en faire plus" a plaidé Brian Nichols, déclarant que les "proportions humanitaires" du conflit "appellent à une réponse internationale, de la même manière que la communauté internationale répond aux défis en Ukraine ou à Gaza".

Les activités du port suspendues

Également ce jeudi, l'opérateur du port de Port-au-Prince a annoncé la suspension de son activité en raison des "troubles à l'ordre public" dans la capitale d'Haïti, en proie à l'escalade de la violence des gangs, citant des "actes malicieux de sabotage et de vandalisme".
"La Caribbean Port Services S.A. ne pouvant effectuer ses opérations se trouve dans l'obligation de suspendre l'ensemble des services offerts à sa clientèle", a indiqué l'entreprise dans un communiqué.

Le système de santé "proche de l'effondrement" alerte l'ONU

Le système de santé d'Haïti est "proche de l'effondrement", a alerté ce 7 mars le bureau de l'ONU pour les affaires humanitaires (OCHA).
"De nombreux établissements de santé sont fermés ou ont dû réduire drastiquement leurs opérations en raison d'une pénurie inquiétante de médicaments et de l'absence du personnel médical", a précisé OCHA, évoquant également des pénuries de sang, d'équipements médicaux ou de lits pour traiter les blessés par balles.

Un poste de police incendié

Une nouvelle antenne de police a été incendiée mercredi soir (6 mars) dans la capitale, a indiqué un syndicat policier.
Régulièrement attaqué par les bandes criminelles, le sous-commissariat de Salomon à Bas-Peu-de-Chose, un quartier de la capitale Port-au-Prince proche des foyers de gangs, a été incendié dans la soirée de mercredi, a indiqué à l'AFP Lionel Lazarre, coordonnateur général du Syndicat national de policiers haïtiens (Synapoha).
Les policiers affectés à ce poste ont eu le temps de le quitter avant l'attaque, selon ce responsable, qui affirme qu'elle était planifiée depuis le week-end dernier. Un véhicule de police et des motocyclettes ont également été incendiés.
Le Conseil de sécurité de l'ONU s'était inquiété peu avant ce nouvel assaut de la situation "critique" en Haïti.
Les bandes criminelles, qui contrôlent la majeure partie de Port-au-Prince ainsi que les routes menant au reste du territoire, s'en prennent ces derniers jours à des sites stratégiques du pays, dont plusieurs commissariats de police.
Un influent chef de gang, Jimmy Chérizier, a assuré mardi que si le Premier ministre Ariel Henry ne démissionnait pas et si la communauté internationale continuait de le soutenir, le pays allait "tout droit vers une guerre civile qui conduira à un génocide".
"Soit Haïti devient un paradis pour nous tous, soit un enfer pour nous tous", a affirmé cet ancien policier de 46 ans, surnommé "Barbecue".

Selon un décompte du Synapoha, depuis le début des attaques coordonnées des gangs, 10 bâtiments de police ont été détruits et deux prisons civiles attaquées et vidées de leurs détenus.
En plein état d'urgence et couvre-feu nocturne, alors que les administrations et les écoles restent fermées, beaucoup d'habitants tentent de fuir les violences avec leurs peu d'affaires sous le bras, les autres ne s'aventurant dehors que pour acheter l'essentiel.