Multiplication des dépôts d'ordures : comment stopper ce phénomène ?

Les dépôts sauvages de déchets se multiplient. Des individus vont dans des zones naturelles reculées, pour déverser tout ce dont ils veulent se débarrasser. Pourtant la loi est particulièrement dissuasive. Les sanctions encourues sont sévères. Peut-être la pédagogie va-elle endiguer ce phénomène.

Il n'est malheureusement pas rare de se promener dans des espaces naturels et de tomber sur des amoncellements de rebus en tout genre.
De tristes et déplorables spectacles, qui témoignent de comportements incompréhensibles.
En effet, pourquoi quelqu'un s'enfoncerait en forêt, irait en bord de rivière, ou sur le littoral, pour déverser ce dont il n'a plus besoin, qu'il s'agisse de déchets dangereux ou non ?! 

Pourtant, force est de constater que ce réflexe a la vie dure, en Guadeloupe, alors que les déchetteries, habilitées à recueillir et à traiter tous types d'immondices et objets, sont réparties sur tout le territoire de l'archipel.
Il semble que le seul objectif des auteurs de ces méfaits soit de mettre hors de leur vue ce qui les encombre, de préférence loin de chez eux.
En général, ils œuvrent à l'abri des regards, n'ignorant pas que leur acte est répréhensible, voire illégal.

Des déchets en pleine forêt domaniale... encore

Un exemple parmi tant d'autres de dégradation de l'environnement a été découvert, cette semaine, par deux randonneurs, à quelques kilomètres au-dessus du Domaine de Duclos, entre Prise d'eau et Duval, sur le territoire de la commune du Lamentin, en plein cœur du Parc National.

Sur la trace, une personne s'est débarrassée de pièces d'automobiles et de foule d'autres déchets de toutes natures, particulièrement polluants, comme vous pouvez le constater, sur ces images :

©Jean-Charles Théobald - Guadeloupe La 1ère

 

Un code de l'environnement particulièrement dissuasif

Nuire à l'environnement peut coûter cher. Les dispositions du code de l'environnement y veillent.

Entre l'abandon d'une bouteille et un dépôt de plusieurs ordures, sur la voie publique, les infractions ne sont pas catégorisées de la même manière.
Autre distinction qui peut être faite : une personne physique n'encoure pas la même peine qu'une personne morale (c'est à dire le représentant d'une entité juridique, comme une entreprise) ; dans le deuxième cas, l'amende est multipliée par cinq.

Par exemple, en cas d'infraction au règlement de collecte (classe 1), la personne physique est passible de 35 euros d'amende, contre 175 euros pour la personne morale.
S'il est question d'abandon d'ordures, déchets, matériaux ou autres objets dans la nature (classe 3), la contravention est de 68 euros ou 340 euros.
Quand il est question d'une entrave à libre circulation (classe 4), il en coûte 135 euros, ou 675 euros.

Et ce n'est pas tout, précise Jocelyn Thrace, chargé de mission police au Parc National de la Guadeloupe : 

Ça peut aller plus loin !

On peut rédiger aussi des procès verbaux et aller au tribunal. Ça coûte beaucoup plus cher. Et là c'est de la 5ème classe : c'est 1500 euros d'amende ou, si c'est une personne morale, c'est 7500 euros et confiscation du véhicule qui a servi à commettre l'acte.

 

Pour abandon de déchets dans la nature, la peine encourue devant le tribunal est 2 ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende, pour une personne physique. Pour une personne morale, ça fait 375.000 euros.

 

Si c'est une bande organisée (plusieurs personnes), c'est encore multiplié, c'est 150.000 euros ou 750.000 (pour les personnes morales).

 

Et il y a encore des peines complémentaires, par exemple, la remise en état des lieux sous astreinte, affichage de la décision, suspension du permis de conduire, interdiction d'exercer, fermeture temporaire ou définitive d'une société, etc.

Jocelyn Thrace, chargé de mission police au Parc National de la Guadeloupe

Les mis en cause, s'ils ne sont pris en flagrant délit, peuvent être débusqués, dans le cadre d'enquêtes.

La nécessité de faire de la pédagogie

Mais malgré cet arsenal de dispositions dissuasives, la Guadeloupe pâti des comportements indélicats. Le pays est sale, force est de le constater.

Nous avons des agents de terrain, qui sillonnent le parc. Mais ils ne peuvent pas être partout en même temps !

Jocelyn Thrace, chargé de mission police au Parc National de la Guadeloupe

En effet, le Parc National, qui compte une vingtaine d'agents assermentés et habilités à dresser des procès-verbaux et interpeller les contrevenants, ne peut à lui seul prendre sur le fait et réprimer, l'ensemble des malfaiteurs.

Or, une quarantaine d'infractions ont été relevées, au sein du parc national, sur les 12 derniers mois.

C'est pourquoi Jocelyn Thrace prône le développement de la pédagogie et de l'éducation à l'environnement, notamment auprès des enfants, via une mutualisation des moyens des différentes administrations (Parc National, ONF, DAAF, Education Nationale...) et l'appui des médias :

J'ai appris d'expérience qu'en passant par les enfants, on peut atteindre les parents. Ça peut porter ses fruits.

Il faudrait une trame commune des différentes administrations.

Jocelyn Thrace, chargé de mission police au Parc National de la Guadeloupe

Pour prouver que les mauvais réflexes sont difficiles à faire disparaître, le Policier de l'environnement nous a raconté une anecdote, particulièrement révélatrice :

On avait organisé, il y a de ça quelques années, avec une commune, une opération de nettoyage du littoral. Et donc les gens qui avaient participé étaient très contents.
La municipalité avait offert une collation.

Hé bien, les mêmes personnes qui venaient de nettoyer et qui disaient "c'est magnifique ce que nous venons de faire !"... quand ils ont bu leurs boissons, ils ont mis leurs bouteilles derrière un arbre !

Jocelyn Thrace, chargé de mission police au Parc National de la Guadeloupe

Signe que le chemin à parcourir reste long.
D'où l'imporatnce de miser sur les générations futures.