Période post-Covid : les laboratoires dans le creux de la vague

Prélèvements à analyser, au sein d'un laboratoire de biologie médicale.
Les laboratoires d’analyses médicales étaient en première ligne au plus fort de la crise Covid, où les tests sans compter étaient au cœur de la politique gouvernementale. Certes, ils ont ainsi augmenté leurs revenus ; mais il ont aussi investi et embauché, pour répondre à la demande. Un rappel qu’ils tiennent à faire, alors qu’ils sont actuellement pointés du doigt.

Durant la crise sanitaire liée à l’épidémie de Coronavirus, les biologistes travaillaient à flux tendu et sous pression pour rendre des résultats PCR en un très court laps de temps.
En effet, au plus fort de cette période inédite, le gouvernement incitait la population à se faire dépister, afin que chacun connaisse son statut viral et adapte son comportement en conséquence.
Les laboratoires d’analyses médicales étaient donc en première ligne.

Pendant la crise Covid, on avait près de 1000 à 1200 prélèvements par jour (...) Je n’ai jamais compté mes heures. J’ai fait des horaires... arriver à 7h du matin et partir le lendemain à 2, voire 4h du matin, pour pouvoir finir tous les prélèvements.

Martha Mezence, technicienne de laboratoire Groupe Inovie Biopole Antilles

Les prélèvements devaient être réalisés et les résultats communiqués aux patients en moins de 12 heures, selon la volonté des autorités ; sans quoi, les laboratoires n’étaient pas payés.

Car les tests ont été remboursés à 100%, dans un premier temps, par la Sécurité Sociale.
De quoi faire dire à certains que cette crise a été synonyme d’El dorado, pour ces professionnels de santé. Ces derniers ont ainsi été pointés du doigt et le gouvernement fait le forcing pour récupérer une partie de cet argent.

Seulement voilà : réussir à répondre à cette nouvelle demande s’est fait au prix d’investissements financiers colossaux, car ces entreprises ont dû faire l’acquisition de matériel plus performant et embaucher du personnel supplémentaire.
De surcroît, aujourd’hui, la donne a changé, avec la fin de l’épidémie qui se profile.
Les laboratoires doivent revoir leur copie. C’est ce que nous avons vérifié au plateau technique du laboratoire Inovie Biopole Antilles, en Guadeloupe.

Cette enseigne fait partie de celles qui ont investi dans un automate de biologie moléculaire ; un appareil d‘une capacité de plus de 800 tests PCR par jour. Mais alors que la circulation de la Covid-19 décroit, la direction n’a pas fini de rentabiliser cet équipement, dont le coût s’élève à plusieurs centaines de milliers d’euros. Une nouvelle stratégie d’amortissement s’impose.

Là, la politique est d’augmenter le diagnostic en biologie moléculaire et, notamment là, on a la possibilité de faire le dépistage de papillomavirus (HPV), qui est une solution haute cadence, donc qui permet de réaliser le dépistage au niveau guadeloupéen, sans problème, dans le cadre du diagnostic des lésions précancéreuses. On peut fait le dépistage des infections sexuellement transmissibles, qui est un enjeu local et, même au niveau national, on est en train de discuter, pour mettre en place ces nouvelles techniques.

William Laurent, biologiste, membre du directoire d’Inovie Biopole Antilles

Si en pleine crise sanitaire, les tests PCR représentaient 10 à 15% du chiffre d’affaire de ce laboratoire, ils sont tombés désormais à environ 3%.

Après avoir vu l’activité dopée, William Laurent est inquiet ; les labos sont aujourd'hui dans le collimateur de l’Etat qui réclame 250 millions d’euros d’économie en 2023. 

Là, on se retrouve effectivement avec des baisses de nomenclature, qui touchent l’ensemble de nos actes, au niveau du laboratoire. Donc des contraintes budgétaires et c’est vrai que l’avenir, dans ces conditions-là, est compliquée pour nous.  

William Laurent, biologiste, membre du directoire d’Inovie Biopole Antilles

Les laboratoires d’analyses médicales redoutent de nouvelles baisses des prix des actes remboursés par la Sécurité Sociale, notamment 300.000 millions d’économies annoncées en 2024.

Des négociations sont prévues, avec la Caisse nationale de l’Assurance Maladie sur l’enveloppe budgétaire 2024-2026. C’est ce qu’ont obtenu les biologistes lors de leur mouvement de grogne du début d’année.