Trois jours d'auditions et encore, de nombreuses interrogations

La  commission d'enquête sur le chlordécone a achevé ses auditions en Guadeloupe. Après trois jours en Martinique et trois jours en Guadeloupe, les parlementaires ont touché du doigt la vraie réalité du chlordécone au Antilles. Une réalité encore très complexe
Les députés ont entendu plusieurs associations de protection de l'environnement et des représentants de l'Office de l'eau et du Conseil Régional. Le rapport de cette enquête et les propositions de la Commission seront rendus publics en décembre prochain. Des auditions sous serment qui se sont achevées en fin d'après-midi à la préfecture de Basse Terre
©guadeloupe
Oublié le croissant bananier, le chlordécone est aujourd’hui présent partout en Guadeloupe.

Dans les terres tout d’abord

Dans la Nord Grande Terre, entre Petit Canal et Anse Bertrand, 30% des terres agricoles appartenant au Conseil Départemental sont contaminées. On en trouve même de manière plus localisée dans certaines parcelles dévolues au maraîchage à Saint François, voir même dans quelques pièces de cannes à Marie-Galante. Il y en aurait même sous la terre.
Au cours de son audition, Joël Beaugendre a indiqué qu’un stock avait été enterré au Jardin d’Essais aux Abymes. L’ancien parlementaire avait alors demandé que l’on procède à des fouilles. Sa requête était demeurée sans réponse.

Le pesticide est également présent dans les organismes vivants.

Selon une étude de Santé Publique France publiée l’an passée, 93% de la population guadeloupéenne sont imprégnés de chlordécone, avec des conséquences médicales pour l’heure inconnues faute de programmes de recherches.
Il y a aussi les animaux aussi et singulièrement les poissons et les crustacés qui vivent aux embouchures des rivières. Evitez les  crabes et autres palourdes vendus sur le bord de la route. Vu les concentrations relevés, 6000 fois au dessus du seuil, on peut désormais les considérer comme des déchets industriels hautement toxiques.
Il y a l’eau enfin, les rivières, les retenues comme Gaschet, les nappes souterraines et enfin quasiment toutes les masses d’eau côtières, à chaque fois, le pesticide a été détecté.

Comment peut-on expliquer une telle situation ?

Il est difficile de répondre à cette question mais les auditions menées par la commission d’enquête parlementaire laissent entrevoir quelques pistes.
Certains exploitants de la filière banane ont continué d’utiliser le chlordécone après le 30 septembre 1993, soit après que le produit ait été interdit.
En 1994, une enquête menée par la Direction régionale de la Consommation et de la répression des fraudes a permis de découvrir 4 000 tonnes dans des hangars et des exploitations agricoles. 8 ans plus tard, en 2002, une nouvelle enquête menée par les services de l’Etat réussissait à mettre la main sur 325 kg de chlordécone. Aucune sanction n’a jamais été prise.

De cela, l’Union des Groupements de Producteurs de Bananes de Guadeloupe et Martinique (UGPBAN) va devoir s’expliquer. Elle sera auditionnée, sous serment, le 25 septembre prochain à Paris.