Chaque jour apporte une nouvelle humeur de l'artiste Emmelyne Octavie. Autour d'un mot, elle construit une histoire originale qui nous ramène à notre quotidien. Aujourd'hui, elle nous propose une conversation avec notre amie la flemme...
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Puisque les paresses sont en détresse et que plus personne n’a la flemme de rien, je vais momentanément sortir de mon inertie pour lancer un SOS. Avec vos conneries actuelles, c’est toute l’espèce flemmarde qui est en voie de disparition. Vous ne pouvez pas faire tout bonnement ce que vous voulez de moi. Vous m’avez fait rentrer dans vos vies depuis des années. Vous m’avez offert le confort de vos corps. Nous étions dans une sorte d’union pour le meilleur et surtout pour la vie.
De la tête aux pieds, j’étais sur toutes les langues.
— « Va voir qui a sonné, j’ai la flemme de me lever ! »
— « Faire du sport maintenant ? Ah non ! J’ai la flemme ! »
— « Je donnerais tout pour rester confiné dans mon lit. J’ai la flemme d’aller bosser ! »
— « Désolée, ce sera pour une autre fois, parce que là, j’ai vraiment la flemme de sortir ! »
Ces petites phrases léthargiques ne vous rappelleraient-elles donc rien ? Je me suis fait chair dans vos os et, à deux, on se faisait chier dans vos vices. Moi, ça m’allait ! Nous reportions tout à demain. Tout à jamais. C’était bien ! La terre entière sait que je ne suis pas compliquée. Et de surcroît, je demeure fidèle en fainéantise. Votre flemme allait de l’aiguë à la très grave. Vous me trimballiez avec vous en soirée pour ensuite lâcher :
— Non je ne veux pas danser !
— Pourquoi tu as mal aux pieds ?
— Non ! C’est juste que j’ai la flemme !
Et nous flemmardions tranquillement en musique, assis sur une banquette à siroter avec nonchalance un bout de nos vies . C’était la belle époque !
Depuis cette année, je ne sais pas qui a eu l’idée de ce virus qui vous est tombé sur la tête, mais vous ne tenez plus en place. Maintenant vous essayez de me noyer dans les toilettes en tirant la chasse à plusieurs reprises sur moi. Tout le monde pète la forme. Ça y est ! Vous êtes tous devenus des hyperactifs, hyper sportifs, hyper promeneurs, hyper marchés, hyper câlins, hyper bosseurs, hyper ambitieux, hyper randonneurs, hyper sociaux, hyper voisins, hyper je veux aller voir grand-mère, hyper humanitaires, hyper grand air, hyper près de la porte, hyper prêts à sortir ! Vos jambes ont la bougeotte. Vos corps sont en transe. Ça en devient fatigant à force. En bon Judas, vous m’avez clouée sur la croix. À présent, tout le monde rêve de mettre un pied dehors pour faire son petit pèlerinage et se débarrasser de moi comme on abandonnerait un fardeau devenu trop chiant à porter. C’est à croire que vous avez la paresse courte ! J’éviterai les longs sermons, mais je trouve regrettable de jeter à la poubelle ce que l’on risque de manger ou de porter à nouveau demain sur soi. Après toutes ces petites trahisons et avant que ne brûle la dernière flamme, j’espère ne pas avoir à mon tour la flemme de vous revoir !
Emmelyne OCTAVIE, "Confinée dans la tête de..."
De la tête aux pieds, j’étais sur toutes les langues.
— « Va voir qui a sonné, j’ai la flemme de me lever ! »
— « Faire du sport maintenant ? Ah non ! J’ai la flemme ! »
— « Je donnerais tout pour rester confiné dans mon lit. J’ai la flemme d’aller bosser ! »
— « Désolée, ce sera pour une autre fois, parce que là, j’ai vraiment la flemme de sortir ! »
Ces petites phrases léthargiques ne vous rappelleraient-elles donc rien ? Je me suis fait chair dans vos os et, à deux, on se faisait chier dans vos vices. Moi, ça m’allait ! Nous reportions tout à demain. Tout à jamais. C’était bien ! La terre entière sait que je ne suis pas compliquée. Et de surcroît, je demeure fidèle en fainéantise. Votre flemme allait de l’aiguë à la très grave. Vous me trimballiez avec vous en soirée pour ensuite lâcher :
— Non je ne veux pas danser !
— Pourquoi tu as mal aux pieds ?
— Non ! C’est juste que j’ai la flemme !
Et nous flemmardions tranquillement en musique, assis sur une banquette à siroter avec nonchalance un bout de nos vies . C’était la belle époque !
Depuis cette année, je ne sais pas qui a eu l’idée de ce virus qui vous est tombé sur la tête, mais vous ne tenez plus en place. Maintenant vous essayez de me noyer dans les toilettes en tirant la chasse à plusieurs reprises sur moi. Tout le monde pète la forme. Ça y est ! Vous êtes tous devenus des hyperactifs, hyper sportifs, hyper promeneurs, hyper marchés, hyper câlins, hyper bosseurs, hyper ambitieux, hyper randonneurs, hyper sociaux, hyper voisins, hyper je veux aller voir grand-mère, hyper humanitaires, hyper grand air, hyper près de la porte, hyper prêts à sortir ! Vos jambes ont la bougeotte. Vos corps sont en transe. Ça en devient fatigant à force. En bon Judas, vous m’avez clouée sur la croix. À présent, tout le monde rêve de mettre un pied dehors pour faire son petit pèlerinage et se débarrasser de moi comme on abandonnerait un fardeau devenu trop chiant à porter. C’est à croire que vous avez la paresse courte ! J’éviterai les longs sermons, mais je trouve regrettable de jeter à la poubelle ce que l’on risque de manger ou de porter à nouveau demain sur soi. Après toutes ces petites trahisons et avant que ne brûle la dernière flamme, j’espère ne pas avoir à mon tour la flemme de vous revoir !
Emmelyne OCTAVIE, "Confinée dans la tête de..."