Comment la 5ème puissance d'Amérique latine a -t-elle sombré dans la misère ? La catastrophe en cours est presque entièrement imputable à l’expérimentation économique à laquelle s’est livrée depuis 1999, Hugo Chavez, l'ancien président du Venezuela, mort le 5 mars 2013.
•
Si Chavez était encore vivant, il serait terrassé par la situation
Sa politique inspirée des thèses de Simon Bolivar (père de l’émancipation politique de l’Amérique du sud au 19 ème siècle) a fait la part belle aux nationalisations, contrôle des prix et contrôle des changes. Son rêve politique a été possible grâce au cours élevé du pétrole.En 17 ans, cette politique hyper sociale et protectionniste, a permis aux plus pauvres d'avoir un toit , un salaire social minimum et un accès gratuit aux soins. L'Etat dopé par l'or noir a subventionné le prix de l'essence, de l'eau , de l'électricité et du téléphone rendant ses services accessibles au plus démunis. Le rêve d'Hugo Chavez n'était pas partagé par son proche voisin les États Unis qui a multiplié les tentatives de déstabilisations.
Les atouts de l'économie vénézuélienne sont également ses points faibles
Le Venezuela est la premiere réserve mondiale de pétrole, (avant l'Arabie Saoudite) avec 299,95 Mds de barils en 2015. Ses stocks se situent le long du fleuve Orenoque. Sa proximité géographique avec les États Unis permet sans difficulté d'exporter son pétrole. Ce pays a également un fort potentiel gazier offshore.Ensuite, le Venezuela a une influence dans la région caraibes, grâce à l'initiative, PetroCaribe. Cette alliance créée en 2005 par Hugo Chavez, permet aux pays membres d'acheter au Venezuela du pétrole à des conditions de paiement préférentielles. Son économie est ainsi fortement dépendante du prix du pétrole.
La chute libre du cours du pétrole
En 2015, La chute des prix pétroliers et la forte inflation (+ 204% prévision 2016 source COFACE) ont enfoncé l'économie vénézuélienne dans la crise. La contraction économique de -10% mesurée en janvier 2016, induirait une prévision de croissance du PIB de -6%. La faiblesse des cours du pétrole réduit les marges de manœuvres du gouvernement et font craindre un défaut de paiement de la dette externe. En 2015, le défaut de paiement a été évité de justesse, grâce aux différents prêts accordés par la Chine. L'échéance de février 2016 de 1,5 milliards de dollars a été honorée péniblement, mais celles des mois d'octobre et novembre 2016 de 4,8 millards de dollars semblent compromises. L'attitude de la Chine, sera clé. Pékin pourrait accepter de re échelonner sa créance ; en échange le Venezuela pourrait autoriser la Chine à exploiter les mines d'or, d'argent, de bauxite ou encore de diamants. Mais le Venezuela pourrait aussi puiser dans le fonds de développement national alimenté depuis 2005 par PVSA la compagnie pétrolière D'Etat.
Nicolas Maduro décrète l’état d’urgence économique
Dans ce contexte, le successeur d'hugo Chavez, le président Nicolas Maduro a été contraint de décréter " l'état d'urgence économique". Fragilisé depuis la défaite de son parti aux dernières élections législatives, Nicolas Maduro s'appuie essentiellement sur le pouvoir militaire et la banque centrale vénézuélienne. Il a récemment augmenté l'essence et a dévalué de 58% l'un des trois taux de change en vigueur dans le pays, espérant développer la production locale.
Et fait marquant, le président Maduro a décidé de vendre ses lingots d'or : 34,2 tonnes en février 2016 et 8,5 tonnes en mars 2016. Selon le Fonds Monétaire International, (FMI) le métal précieux représente les deux tiers des réserves (12 millards de dollars) de la banque centrale du Venezuela. En 2 ans , ce stock a diminué de 37%.
Le piège se referme
En attendant, le pays est piégé.Faute de devises, le Venezuela a coupé dans ses importations. Résultat : les pénuries se multiplient et les prix flambent. Les produits alimentaires sont les plus touchés, puisqu'ils représentent 22% des importations du pays .
Preuve que la pénurie est grande , la société Coca Cola a annoncé le 23 mai 2016 la suspension de sa production faute de sucre.
Le gouvernement a décidé de multiplier par 100 le prix du kilo de farine de maïs. De 19 bolívars il passe à 190 , soit 19 dollars. La farine de mais est l'ingrédient de base des "arepas" crêpes locales, aussi incontournables que le pain. Cette mesure particulièrement impopulaire , nourrit le mécontentement des vénézuéliens.
Pour autant le peuple hésite à rejoindre les rangs de l'opposition de droite. Même en souffrance, le peuple garde un lien affectif avec le parti socialiste d'Hugo Chavez et n'est pas encore prêt à trahir sa mémoire.