Elodie Prodel, la passion libraire

Elodie Prodel femme de lettres
Elodie Prodel est une femme de lettres. A 35 ans, cette jeune femme a monté une entreprise qui ne connaît pas la crise. Avec son association « Livre adan lari », elle sillonne les communes de Guyane pour inciter les jeunes à la lecture. Elle partage ainsi son amour de la littérature. Une pionnière.
Elle apparaît dans l'embrasure de la porte. Elle, c’est Elodie Prodel. Avenante, elle a un sourire franc et rieur. Gracile, elle est habillée d’un T-shirt dont la couleur met en valeur ses yeux clairs et pétillants. Elle n’a que 35 ans et déjà une vie de femme d' entreprise, avec ses hauts et ses bas. Elle peut parler de chiffre d’affaire, de rentabilité, de ses salariés. Elle en a fait du chemin. Son regard se tourne sur les cartons qui s'amoncellent dans la librairie.
Très vite, elle revient, sourit, parle beaucoup, elle a tant de choses à raconter. Elle ressemble à une héroïne d’un roman des sœurs Brontë avec son apparence diaphane et délicate. Ce n’est qu’une illusion car au fur et à mesure que la conversation s’anime et qu’elle évoque sa passion des livres, son apparente fragilité se transforme en force. Une combattante.

Au coeur du quartier Chinois

Elodie Prodel est la gérante de "Guyalire". Une librairie grossiste qu’elle dit unique au monde. Sa librairie est installée à la crique, quartier populaire, lieu de tous les trafics, telle une oasis au milieu d’une foule cosmopolite qui a ainsi un accès direct à la culture. Un choix qui permet de bénéficier des avantages des zones franches.
Cette librairie elle l’a créée avec une amie,Sandra Joseph, qui depuis a quitté l’aventure. C’était en 2011. A l’origine, l’idée était de lancer une librairie virtuelle. Elles ont eu la lumineuse idée de conquérir le marché du livre scolaire. Elles n’avaient pas un euro en poche et grâce à un prêt à taux zéro et à l’aide d’appui à la création d’entreprises, elles se sont lancées.

" L'entreprise qui avait l'exclusivité de la distribution des livres scolaires a fait faillite. Nous avons Sandra et moi saisies l'opportunité. Nous n'avions pas un sou en poche, juste une formation de libraires. Nous nous sommes battues pour obtenir des aides et des subventions. Nous avons pu obtenir la confiance de trois établissements. Aujourd'hui nous travaillons avec 35 collèges et 15 lycées. Mais rien est acquis. Je continue à me battre pour préserver l'avenir de mes salariés." 


Les goûts littéraires 


Aujourd’hui, elle distribue les manuels scolaires à la totalité des établissements privés et publics du 2nd degré de Guyane. Elle a pu embaucher 4 personnes. Son chiffre d’affaire est de plusieurs dizaines de milliers d’euros. Son père, ancien libraire, n’est pas loin, il s’occupe de la partie administrative. Il gère, depuis son bureau du 1er étage. Elle est bien entourée, travaille en famille, son mari également participe à cette belle aventure.
Et comme si cela ne suffisait pas, Elodie, distribue sur toute la Guyane via les grandes surfaces les derniers bests sellers du moment.
Selon la commune où la ville,  les goûts changent. Certains genres littéraires sont prisés; d’autres moins. Et d'une circonscription à l’autre, la tendance s'inverse.

" A Saint Laurent, nous avons une demande très forte en romans d'amour. Vraiment, le chiffre est important voir surprenant. A Kourou et Rémire-Montjoly, les essais et les livres à thèmes sont privilégiés. Il nous est demandé également beaucoup de traductions dans les communes éloignées. Il n'y a pas de règles pour les livres d'auteurs locaux. C'est souvent le bouche à oreille qui fait le succès d'un livre et la personnalité également de l'auteur."


"Livre adan lari", le livre se promène


Mais au-delà, sa passion reste de faire découvrir le monde de la lecture. Un monde qu’elle connaît depuis sa plus tendre enfance. Dans la librairie de son père d’abord, puis dans d’autres structures où elle a fait ses premières armes. Déjà à 22 ans elle a édité un premier recueil de poèmes «La vie en fil» paru chez Jet d’encre.
Aujourd’hui Elodie Prodel sillonne la Guyane avec sa librairie ambulante. Elle a fondé une association «Livre adan lari». De Maripasoula à Papaïchton en passant par Saint-Georges et Saint-Laurent, elle tente d'inciter aux bonnes lectures, les jeunes et les moins jeunes.

" Malgré les réseaux sociaux, je trouve que les jeunes lisent beaucoup plus que l'on ne le croit. J'en rencontre beaucoup et j'essaie de leur insuffler l'amour de la lecture. Souvent, je commence par conseiller des bandes dessinées et puis progressivement de livre en livre, ils demandent d'autres histoires plus longues, plus fournies. Quand nous allons en commune et que nous retrouvons nos jeunes lecteurs, nous sommes marqués par le profond changement en quelques mois. Certains ne demandent que cela. Il suffit juste de les motiver" 


Rien est facile, il y a de nombreuses mers à traverser, le marché est réduit, la concurrence rude. Cependant Elodie et son équipe ont le sentiment d'accomplir une bonne œuvre. Elodie Prodel, n’en doute pas, c’est son destin. Elle fourmille d'idées et de bonne volonté. La libraire ne se décourage surtout pas, sans s'arrêter, elle continue à promouvoir et soutenir la littérature, et les auteurs de Guyane.

Le reportage de Guyane la1ere :