Saint-Georges de l’Oyapock, la commune guyanaise est visible depuis Vila Vitoria, à la frontière entre le Brésil et la Guyane. Il suffit de 2 minutes pour franchir le fleuve et rejoindre l’autre coté. La fermeture de la frontière a bouleversé le quotidien de Vila Vitoria.
Avant la pandémie de coronavirus, Villa Vitoria était considérée par de nombreuses personnes comme étant presque un quartier de Saint-Georges de l'Oyapock. De nombreux français et guyanais y ont élu domicile depuis des années, faisant au quotidien la navette entre les 2 rives de l'Oyapock, entre la Guyane et le Brésil.
Mais la fermeture de la frontière depuis maintenant un an a radicalement changé la vie des habitants de Vila Vitoria. Toute l’économie du village reposait sur cette proximité avec Saint-Georges de l’Oyapock.
Un des nombreux piroguier s’exprime
Je suis là depuis 7 h du matin, je n’ai même pas pu emmener une personne de l’autre côté et je n’ai même pas gagné 1 seul real, rien de quoi manger. On ne peut rien faire car y a les gendarmes, la PAF, la légion, et on ne peut pas travailler pour survivre. On a des familles, il y a beaucoup de pères de famille ici.
Cet homme est l’un des plus anciens piroguiers de Vila Vitoria. 20 ans qu’il fait la traversée entre les 2 rives. Depuis la fermeture de la frontière, sa vie est bouleversée.
Ma femme est chez moi, espérant que je travaille et que je rapporte à manger, que j’achète des courses ; j’espère une petite brèche pour pouvoir traverser et travailler.
Trouver la brèche, le moment opportun pour traverser et contourner les contrôles des forces de police française sur le fleuve Oyapock.
Parmi les rares voyageurs qui tentent encore le passage sur le fleuve frontière, des français travaillant à Saint-Georges de l’Oyapock et habitant Vila Vitoria tout comme des parents et leurs enfants, scolarisés dans la commune guyanaise.
Il y a des français ici et ils aiment beaucoup ici, c’est tranquille, c’est un endroit paisible. Ils sont restés car ici c’est plus tranquille que là-bas, par contre, il y en a un qui est tombé malade du coronavirus.
Le coronavirus a provoqué la fermeture de la frontière, source de revenus et a aussi créé une crise sanitaire au village.
Dans le centre de santé de Vila Vitoria, la vaccination contre la Covid n’a pas encore débuté. C’est contre une autre maladie que l’Etat d’Amapa doit aussi se battre : la rougeole. Des doses de vaccins viennent d’arriver pour enrayer les cas enregistrés dans la région.
Marcos Dias, le seul médecin de Vila Vitoria précise :
Nous avons une population qui n’est pas officielle et qui très vulnérable, qui vit une situation de grande précarité sociale. Nous avons beaucoup d’enfants, en plus des personnes âgées et le reste de la population qui a besoin de nos services.
Le docteur Marcos Dias et ses équipes ont connu une augmentation de la fréquentation du centre de santé ces derniers mois, et pas seulement en raison de l’épidémie de Coronavirus. Depuis la fermeture de la frontière avec la Guyane, ce centre est devenu l’unique dispensaire de proximité et les carences d’accès aux soins ont été d’autant plus visibles.
Le docteur Marcos Dias explique :
Ce dont nous avons besoin, c’est plus d’investissement de politique publique, pour que la population puisse accéder vraiment aux médicaments, aux tests, aux vaccins. Une orientation générale qui permette de diminuer véritablement l’énorme taux de mortalité que nous affrontons en ce moment à Oiapoque.
Les habitants de Vila Vitoria se languissent de voir le jour où le fleuve sera de nouveau une source de revenus et de liens entre les populations guyanaises et brésiliennes.
Le reportage de Jocelyne helgoualch et Frédéric Larzabal