Journée mondiale de la drépanocytose : la renaissance de Norah, première guyanaise à bénéficier d'une greffe allogénique de moelle osseuse, seul traitement connu contre cette maladie génétique

La renaissance de Norah Rémy
Norah Rémy vit aujourd’hui une véritable renaissance. Drépanocytaire, elle a vécu des années de douleurs intenses, d’hospitalisations récurrentes. Aujourd’hui elle a retrouvé une vie normale. Norah Rémy est la première Guyanaise à s’être fait greffer de la moelle allogénique. L’un des seuls traitement aujourd’hui reconnu par la science.
Norah Rémy durant son traitement
Norah Rémy après sa greffe

Norah Rémy est jeune femme de 32 ans qui aujourd’hui sourit à la vie. Elle est atteinte de drépanocytose. La drépanocytose est la maladie génétique la plus répandue dans le monde. En France, elle touche essentiellement les personnes d’origine africaine ou antillo-guyanaises. Dans certains départements, elle peut affecter jusqu’à un bébé sur 500. La drépanocytose altère les globules rouges et se traduit par une anémie, des infections, des douleurs, voire des AVC. Elle réduit considérablement la qualité et l’espérance de vie des personnes atteintes. Nora Rémi a deux ans quand elle fait ses premières crises.

C’est une maladie génétique héréditaire, je l’ai toujours eu. Cela a été détecté à la naissance. Ma première crise, je l’ai eu à 2 ans. Je faisais de nombreux allers retours à l’hôpital. D’abord pour des crises vaso-occlusives, ce sont des globules rouges qui bouchent les vaisseaux sanguins après cela a évolué. J’avais à peu près une crise par mois. J’étais souvent hospitalisée. J’avais des maladies qui se greffaient. J’ai beaucoup souffert de nécroses, mes os s’effritaient par le manque d’oxygénation. J’avais aussi une infection de la moelle osseuse, j’ai eu également des calculs sanguins et d’autres maladies. J’avais un syndrome thoracique aigüe, je faisais des embolies et des atteintes au cerveau.  

Norah Rémy

L'amour d'une mère

Norah Rémy avant la greffe

Elle a 16 ans quand sa mère décide de quitter la Guyane pour la faire soigner à Créteil. En Guyane, les médecins du centre hospitalier Andrée Rosemon lui disent que Norah ne pourra plus jamais marcher. Elle refuse la fatalité et recherche un traitement. A Créteil, les médecins mettent Norah sous perfusion. Elle subira des transfusions sanguines pendant des années, mais elle va mieux et peut avoir une vie presque normale. Elle fait des études, a un petit garçon. Les crises se succèdent mais la jeune femme tient. Elle décide de faire une greffe, le seul traitement aujourd’hui qui donne des résultats.

Mais à l’époque c’est encore trop tôt.  La greffe de cellules souches sanguines est une option thérapeutique connue depuis 1984. Chez un malade atteint de drépanocytose, les cellules se transforment en globules rouges anormaux. Pour remédier à cela, les médecins ont parfois recours à une greffe de moelle osseuse : ce procédé remplace la moelle osseuse déficiente du patient par la moelle osseuse d’un donneur contenant des cellules souches saines.

Ma mère a fait les démarches auprès du médecin qui me suivait à Créteil. A l’époque, il fallait être 100% compatible avec le donneur. J’avais 15, 16 ans à l’époque. Je n’ai pas pu en bénéficier car mes frères et sœurs n’étaient pas compatibles. Du coup j’ai poursuivi les recherches de ma mère, et là j’ai pu bénéficier d’une allogreffe, le donneur ne nécessite pas d’être à 100% compatible mais à 50% . Mon frère aîné l’était et il a accepté.

Enfin la greffe

Norah Rémy durant son traitement

La greffe de cellules souches est réservée à des patients très atteints, courant un risque mortel à court terme. C’est une opération très dangereuse, à risque qui peut provoquer le décès. Mais pour Nora c’était le seul espoir pour enfin avoir une vie normale.

Je me suis fait opérer le 4 juin dernier. Cela fait un an. Juste après c’était très compliqué. Ce n’est pas une intervention anodine. On est très fatigué. Toutes les chimios qui sont faites en amont nous fatiguent. Il y a aussi le combat de son propre corps pour accepter la moelle et plus les soins à côté. C’est très dur. Je me suis remise assez rapidement, les médecins étaient stupéfaits. Quand j’étais hospitalisée, je n’avais personne, car il y avait la Covid. Mon fils de douze ans en a beaucoup souffert. Je perdais mes cheveux, mon corps changeait, j’étais en métamorphose. J’ai été très très entourée par ma famille mes amis, ils étaient là pour moi. Ils m’ont beaucoup soutenue. Je me sens très bien aujourd’hui. Il faut savoir que les drépanos ne peuvent pas se baigner très longtemps, aller dans l’eau froide. J’ai pu aller dans la mer sans crainte. C’est magnifique. C’est une renaissance… Mon espérance de vie a augmenté.

Norah Rémy après la greffe

Après un an, Norah vit à Marseille entouré des siens. Auxiliaire puéricultrice, elle n’a pas encore repris son travail car elle est encore en convalescence. En témoignant, elle veut redonner de l’espoir aux drépanocytaires, et leur démonter qu’un nouveau traitement est possible. L'association Drépa-Guyane a été d'un grand soutien et secours confie-t-elle. Tant de gens l'ont aidée, elle tient à n'oublier personne.

En Guyane, depuis 1992, le dépistage à la maternité est systématique pour tous les nouveaux-nés : un bébé sur 227 est touché.  Deux mille drépanocytaires SS ( les formes les plus graves), sont déclarés officiellement.