Rarement une élection législative avait suscité un tel intérêt national. Certes, un siège de député est stratégique, mais cela n'explique pas tout. En une semaine, trois poids lourds de la politique hexagonale ont participé à la campagne. Du jamais vu.
Le mouvement de mars-avril 2017 gravé dans les mémoires
Certes les récents mouvements sociaux de Mars-Avril, ont particulièrement mis en lumière le département et ses difficultés, mais cela n’explique pas tout. Il a fallu du temps avant que les médias nationaux ne s’intéressent à ce long mouvement pacifique de contestation, qui a fait se lever une population asphyxiée par l’insécurité et le marasme économique. Les 500 Frères, les barrages aux portes de la ville, deux mois de paralysie, la situation était réellement inédite. Beaucoup ont découvert la Guyane, ce petit coin de France situé en Amérique du sud. Une fois le mouvement médiatisé, le pays a revêtu de nouveaux atours. Il est apparu riche, riche de sa fusée, riche de ses ressources aurifères et pétrolières, riche de sa biodiversité, riche enfin de la diversité de ses populations. L a Guyane est devenu une vitrine attractive, dont on parle sur les plateaux télés. Une actualité qui fait de l’audience.
Une législative partielle toute en symbole
Mais ce n’est pas tout. Sur le plan politique, la législative partielle de la deuxième circonscription, est également emblématique. Christophe Castaner l’a bien compris en venant soutenir 48h Lénaïck Adam à peine 26 ans. Jusqu’à encore décembre dernier, il était l’un des plus jeunes députés de la République En Marche, le mouvement politique lancé par Emmanuel Macron. Ce mouvement encore embryonnaire sensé donner un nouveau visage à la politique. Avec 310 sièges, sur 577, la majorité présidentielle a radicalement transformé le rapport de force politique à l’Assemblée nationale. Une situation confortable pour le gouvernement.
Le patron de LREM est donc venu ostensiblement adouber Lénaïck Adam, un homme issu de la diversité, d’origine noire marronne soutenu par Rodolphe Alexandre. Il ne faut pas oublier que le président de la CTG durant la campagne présidentielle a eu le courage de prendre position contre vents et marées, pour le jeune Emmanuel Macron. La boucle est bouclée.
Christophe Castaner invité du JT Soir
Les Insoumis
Seulement l’élection a été invalidée par le Conseil Constitutionnel suite au recours déposé par Davy Rimane. Davy Rimane, ce leader syndicaliste qui a signé l’accord de Guyane dont les termes aujourd’hui sont quelque peu édulcorés au profit des conclusions à venir des Assises de l’outre Mer et des Etats généraux. De plus, Emmanuel Macron venu en Guyane en octobre dernier, a refusé de recevoir les membres du Komité pou nou démarré Lagwiyann, dont Davy Rimane. Cette rencontre avortée avait beaucoup fait de bruit à l’époque. Le jeune Adam était encore député.
Aujourd’hui, cinq mois après cette visite, l’enjeu est hautement stratégique face à un Davy Rimane soutenu par Jean Luc Mélenchon, adversaire farouche du Président et de sa majorité. Lui aussi a créé son mouvement, la France Insoumise, dont les 17 députés sont entrés pour la première fois dans l’hémicycle en juin dernier. Ils sont force d’opposition et n’ont de cesse depuis de tenter d’ébranler le gouvernement.
Jean Luc Mélenchon est venu avec deux députés de son parti. Un soutien pesant pour Davy Rimane qui, il y a encore un an, n’aurait jamais imaginé pareil destin. Mélenchon rattrapé actuellement dans la presse nationale par les turpitudes de son parti, par sa présence en Guyane fait, sans le vouloir, de la publicité à la campagne. Ce tribun, véritable animal politique, croise le fer sur le sol guyanais avec l’équipe gouvernementale (et les médias nationaux).
Jean-Luc Mélenchon Invité du JT soir
Haro sur l'Europe
L’enjeu est donc important. François Asselineau (Union populaire républicaine) ne s’y est pas trompé car il vient Iui aussi d’arriver en Guyane pour 10 jours. Il est venu accompagner la campagne de Georges Mignot avec un discours anti-européen, que beaucoup peuvent entendre . Selon lui, Les accords de Guyane sont piétinés par un gouvernement de façade. De plus sur les 23 milliards versés à l’Europe par la France, seuls 14 lui sont restitués par le biais de subventions alors que la Guyane, elle a besoin d’une véritable vision de développement et de d'investissements lourds.
François Asselineau invité du JT Midi
Le verdict des urnes
Les autres candidats n’ont que leurs convictions face à de tels poids lourds de la politique. Jérôme Harbourg (Front National), David Riché, maire de Roura et président de l’Association des maires ( Parti Socialiste Guyanais), Richard Joigny, (Parti progressiste guyanais et de Guyane alternative), Jean Philippe Dolor (Nouvelles Forces de Guyane), José Makébé, lui est sans étiquette. Ils participent eux aussi à l’élection législative partielle de la 2ème circonscription des 4 et 11 mars.
Les résultats des urnes sont donc très attendus. Ils seront particulièrement examinés par la presse nationale. L’impact de cette campagne permettra de mesurer la force de persuasion des uns et des autres au-delà des programmes. La deuxième circonscription est un territoire où le retard de développement est majeur. Ce sont les 39 422 électeurs de la circonscription qui trancheront.