C’est la belle surprise de cette rentrée littéraire "Un zakari et une danse" de Saina Manotte aux éditions Mahury. Un roman court, dense, foisonnant, qui plonge le lecteur dans un univers de senteurs, de couleurs, de saveurs de l’enfance… Un roman ouvert sur un autre espace-temps, à lire plusieurs fois en se laissant envahir par sa musicalité et sa sensibilité.
L'histoire d'une femme
Edmonise, Nini à l’âge de 13 ans doit quitter Sinnamary pour Cayenne, continuer ses études. Orpheline, c’est une enfant aimée choyée par ses grands-parents. La trame se passe dans les années 50-60 : de sa naissance, à sa vie de femme, d’amie, d’amante et de mère, Edmonise a tous les dons. Elle a une tête bien faite mais aussi bien pleine et un cœur d’or. Elle aime aussi danser. Elle danse tout le temps, entre les mondes visibles et invisibles.
Son existence est une fulgurance, un feu qui s’allume et s’éteint. Autour d’elle, les personnages se croisent, s’entrecroisent, gravitent autour de son existence. Ils ont tous un rôle déclencheur à un moment ou à un autre de son destin. Rien n’est laissé au hasard. Chaque personnage est à sa place. Le roman est un roman choral, parfois introspectif et intime, écrit à la première personne. Et puis en fonction des chapitres, la voix distante du narrateur s’installe.
Un style affirmé
L’écriture est fine, élégante, créolisée. Les phrases imagées, réveillent l’inconscient du lecteur en le plongeant dans l’ambiance et l’atmosphère de l’époque. Le roman est une réussite car l’auteur en seulement 200 pages raconte l’histoire d’une vie, en allant à l’essentiel, tout en décrivant avec force et talent les moments intenses de basculement.
Ce roman construit comme un chant est la chronique de la vie d’une femme Edmonise, éparpillée, écartelée entre ses mondes, victime de la fatalité et du poids de sa lignée. Elle connaîtra pourtant de grands bonheurs. Saïna Manotte a cette faculté de sublimer ses racines. Son roman, nous entraîne dans une danse crescendo, dont les rythmes s’arrêteront tragiquement.