Quel carnaval pour demain?

La joie et la créativité à la parade du littoral
Le carnaval 2018 et aura été, une fois de plus, riche d'enseignements. L'anthropologue Isabelle Hidair, invitée en radio s'interroge sur l'avenir du carnaval en Guyane, entre tradition et évolution, peut-il encore jouer son rôle de défouloir populaire ou deviendra t-il un pur produit touristique?
Pour Isabelle Hidaire, anthropologue et maître de conférence à l'Université de Guyane, le carnaval transmet un message universel celui de "l'expulsion du mal". Un rituel pendant lequel :

"... on se déguise, on se cache et on joue le mal, l'inverse. C'est une période d'inversion où l'on joue ce que l'on ne voudrait pas qu'il arrive".


Cette définition universelle posée, l'antrhopologue explique que le carnaval guyanais demeure encore assez traditionnel même si depuis une vingtaine d'années se posent des questions récurrentes sur le sens que doit prendre son évolution. Trois préoccupations reviennent : comment éradiquer la violence lors des défilés  (phénomène des voltigeurs à l'arrière des groupes), comment contrer le manque d'attrait des touristes pour ce carnaval et traiter le phénomène des subventions réclamées par les groupes.

Un carnaval dont l'évolution interroge 


Ces problématiques, selon Isabelle Hidair, montrent que la société est entre deux phases. Il y a les acteurs du carnaval qui jouent encore le jeu de la tradition, donc de l'inversion et une autre partie qui se positionne sur la partition touristique et du spectacle.
Il semblerait que la partition touristique prenne le pas sur la tradition.  Et dans ce cas la préoccupation est autre, il faut être beau et devenir célèbre. Le but est de rentrer dans les rangs des autres carnavals qui font parler d'eux dans le monde.
Autant d'éléments qui peuvent sembler brider une expression populaire basée sur l'inversion, la satire, les chansons licencieuses et le déguisement improvisé.
C'est un phénomène qui s'est installé avec la montée en puissance, dans les années 90, de la grande parade avec l'attribution de prix. Des groupes très organisés et thématisés comme "Manaré" ou "Porc Epic" qui apportaient une grande sophistication à leurs costumes, à l'image du carnaval caraïbéen, ont, également, participé à ce changement. 

Aujourd'hui la question se pose de façon plus accrue : faut-il impérativement que le carnaval soit beau, propre et vendu comme tel, comme à Nice par exemple. Sauf que, selon Isabelle Hidair, ce type de carnaval devient uniquement celui des touristes qui ont acheté leurs tickets. Cela exclut une partie de la population, singulièrement les jeunes qui n'ont pas les moyens de telles dépenses.
La problématique est posée, les années à venir diront le chemin choisi pour ce carnaval.