Nouvelle étape dans le projet de décharge sur la zone agricole de Wayabo à Kourou : le dossier est entré en phase de recevabilité.
Cela signifie qu’il est étudié pendant quarante-cinq jours par les administrations de Guyane, trente-et-unes en tout. Il a été déposé la semaine dernière par le groupe Séché Environnement. Son directeur, Thierry Sol, en a informé les agriculteurs de Wayabo présents lors d’une rencontre organisée hier, vendredi 29 octobre.
Le président de l’Association Kouroucienne des Agriculteurs de Wayabo (AKAW), Raphaël Stobinsky, explique que les participants se sont rendus au rendez-vous dans l’espoir d’obtenir plus d’informations sur le projet.
Des réponses parcellaires aux questions des agriculteurs
Celui-ci a été initié en 2017, mais les administrations n’avaient pas assez d’éléments pour répondre aux questions des agriculteurs, car le dossier n’était pas encore à l’étude.
En 2019, le groupe Séché Environnement publie une plaquette brossant les grandes lignes du projet. C’est finalement en ce mois d’octobre 2021 que le dossier du site de stockage des déchets arrive sous les yeux des élus et collectivités.
Un représentant du bureau d’études associé au projet accompagnait le directeur du groupe Séché, hier, près de l’abribus de la piste de Wayabo où se tenait la rencontre. Il a tenté de rassurer les agriculteurs sur l’absence d’impact écologique du site de stockage des déchets.
Si ces derniers ne doutent pas de la bonne foi de l’interlocuteur, ils regrettent l’absence de considération de l’impact social du projet.
Pour ces hommes et ces femmes qui tentent de travailler en harmonie avec la nature, une décharge au cœur de la zone agricole, c’est avant tout la destruction de leur cadre de vie. Ils craignent aussi que les clients associent le nom du site avec l’idée de déchets et boudent leurs produits.
Des projets de vie qui s’effondrent
Raphaël Stobinsky souligne les difficultés rencontrées par les agriculteurs pour s’établir à Wayabo. Installés sans eau ni électricité, avec un accès dépendant d’une piste devenue homérique, ils se sont investis sans compter pour assurer leur autonomie et fournir des denrées alimentaires de qualité aux marchés guyanais.
Nombre d’entre eux ont des normes européennes très strictes à respecter et le moindre imprévu dans la décharge mettrait leur existence entière en péril.
La plupart des producteurs de la zone pratiquent l’agriculture biologique. Se sentant menacés par le projet de site d’enfouissement des déchets, plusieurs ont cessé d’investir dans leurs exploitations. Certaines sont situées à moins de deux-cent mètres de la limite de la future décharge.
Certains agriculteurs ne se sont pas rendus au rendez-vous, le face à face était trop douloureux. Les producteurs de la zone ne minimisent pas le problème que représente le traitement des déchets en Guyane, particulièrement avec la fermeture nécessaire de la décharge des Maringouins.
Ils déplorent cependant que le territoire se retrouve au pied du mur et que la question de l’implantation n’ait pas encore fait l’objet d’un accord entre les élus.
Des terres trop précieuses pour y enfouir des déchets
Le projet de Wayabo promet de valoriser les déchets pour fournir de l’énergie au secteur agricole local, mais les modalités de valorisation n’ont pas pu être expliquées lors de la rencontre.
Ce qui est certain, par contre, c’est que les trente-deux hectares concernés, bénéficiant déjà du label Agriculture Biologique, ne pourront plus servir à produire de la nourriture.
Pour les agriculteurs opposés au projet de décharge, il constitue un contresens avec la volonté affichée de faire progresser l’autonomie alimentaire en Guyane. 88% des besoins du territoire sont importés.
La zone de Wayabo, valorisée pour l’agriculture depuis moins de quinze ans, voit encore s’installer de jeunes producteurs.
Raphaël Stobinsky en fait partie, il élève des chèvres et pratique le maraîchage sur sol vivant. Il espère que l’association qu’il préside, AKAW, ainsi que les autres opposants au projet seront écoutés par les administrations, maintenant que tout repose entre leurs mains. Pour l’heure, ils invitent la population à se mobiliser en signant la pétition qu’ils ont mis en ligne.