Presque une semaine après l'attaque du Hamas contre Israël, le premier avion de rapatriement de Français est arrivé jeudi vers 21h, à l'aéroport Charles-de-Gaulle. 377 personnes étaient présentes à bord, dont 68 enfants. Parmi elles Marie-France Guyanaise, 55 ans.
Elle était partie en pèlerinage en terre sainte. Un acte de foi pour se reconnecter spirituellement, un retour aux sources. Pas de portables, pas de médias, pas d’internet, le vide total. Marie France est là pour se ressourcer. C’est un voyage organisé. Le groupe est cosmopolite : 51 pèlerins venus de tous les horizons, des personnes âgées pour la plupart.
Arrivé le 2 octobre, le groupe entreprend son périple en terre sainte. Un guide les accompagne. Une douce routine s'instaure, ponctuée de prières, de messes et d’introspection. Le 7 octobre cependant, tout bascule.
Nous sommes partis pour un pèlerinage le 2 pour revenir le 10. Nous avions décidé de supprimer tout ce qui est médias, téléphones, internet nous avions un rythme assez soutenu entrecoupé de prières, de messes, c’était un pèlerinage. Le samedi matin, c’est devenu bizarre. Nous avons senti qu’il y avait quelque chose de différent, nous avons vu dans la rue, l’interpellation d’une personne, sortie de son véhicule assez violemment, et puis aux checkpoints, ce qui m’a le plus interpellée, c’est que les soldats étaient en position cible. Nous devions partir à Bethleem, le passage ainsi qu’aux autres voitures a été interdit. Nous posons des questions à notre guide, il répond évasivement mais nous trouvons qu’il est soucieux. Nous regardons les médias et là nous comprenons. Quel choc ! Il y a eu une attaque non loin de là où nous étions. Le guide nous dit qu’à Jérusalem nous allons être en sécurité. Nous arrivons, et nous entendons des bruits et des bourdonnements. Les bruits étaient sourds. Il y avait pas mal de mouvements. Nous ne nous sommes pas inquiétés. C’est au matin, le dimanche, que nous avons compris.
Les premières explosions
Une fois les pèlerins à Jérusalem, ils comprennent que tout est fermé. La ville d’ordinaire, grouillante, vivante, est déserte. La peur s’est installée. Les fidèles sortent brutalement de leur torpeur, en entendant les premières sirènes et des explosions rapprochées.
Une fois arrivés à Jérusalem, nous n’avons pas pu sortir de notre lieu d’hébergement. Tout était fermé. A Jérusalem, il y a pas mal de souks, et là il y avait très peu de commerçants ouverts. (…) Nous sommes abasourdis bien que les habitants nous disent qu’il fallait s’y attendre car la bande de Gaza était oppressée. Nous restons à Jérusalem qui est protégée par un dôme. C’est le lundi que nous avons entendu les premiers bruits des bombes et des explosions. Là nous avons eu très peur. Nous avions les bruits de sirène, il y a une première sirène longue et continue qui vous alerte pour trouver un abri. A Jérusalem, c’est trois secondes. Trois secondes pour trouver un abri. Avec les personnes âgées c’était compliqué. Le premier jour nous étions en train de manger, nous avons entendu les cloches de l’angélus et les sirènes en même temps. Imaginez 56 personnes qui ont trois secondes pour trouver un abri. C’était difficile. En entendant les explosions, on sentait le sol trembler en même temps comme un tremblement de terre. Là on s’est dit que nous étions au cœur d’une guerre.
Un retour en France miraculeux
Les pèlerins décident de tout faire pour regagner la France. L’agence de voyages tente de les rassurer et leur propose un retour en bus durant 9h en passant par le désert ou attendre la semaine prochaine. Pas question, ils se mobilisent et contactent les autorités françaises.
Nous avons contacté l’ambassade de France le dimanche. Il faut savoir que quand vous partez à l’étranger il faut s’inscrire sur un fil d’ariane. Et vous avez des informations. Ces informations-là nous disaient que tous les vols étaient annulés mais l’agence continuait à dire que le retour était maintenu. À ce moment-là, nous cherchons à connaître les dispositions prises par la France. Nous entendons que la Grèce, la Pologne et d’autres pays ont pris des dispositions pour leurs ressortissants. Nous pensons que la France nous abandonne. Toutes les démarches ont été faites par nous vers le consulat jusqu’à avant-hier. Nous avions l’impression que la Frange ne se bougeait pas. C’était horrible. Nos familles outre-mer et dans l’hexagone nous ont envoyé le lien pour joindre la cellule de crise. () Mais nous n’entrions pas dans les catégories requises.
Après bien des péripéties, les pèlerins sont embarqués dans l’avion affrété par le gouvernement. Les premiers rapatriés Français en provenance d’Israël sont arrivés à l’aéroport Roissy Charles-de-Gaulle ce jeudi soir. Au moins trois autres vols sont prévus dans les jours à venir.
Marie-France elle, oscille entre colère, stupeur et soulagement. Elle se souviendra longtemps de ce pèlerinage en terre sainte.