Située au fond de la cour du 32 Bis — un tiers-lieu en plein centre-ville de Cayenne — Zoukouyanyan était devenu un acteur incontournable du champ culturel et éducatif.
Du rire aux larmes
Animations, spectacles, veillées… L’année 2020 marque un tournant positif pour ce collectif d’amoureux de la parole et du conte. La compagnie enchaîne les projets et rafle toutes les subventions publiques, qu’elles proviennent de la Préfecture, de la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) ou même de la Caisse d’allocations familiales (CAF).
De 2020 à 2022, le budget de Zoukouyanyan passe de 280 000 euros à 800 000 euros. En seulement 3 ans, l’association a quasiment triplé son budget. En parallèle, le collectif recrute. Les effectifs sont passés de 7 salariés en 2020 à une vingtaine en 2022.
Des manquements envers les salariés de l’association
Deux ans plus tard la folie des grandeurs s’arrête. Elle est stoppée net par d’importantes difficultés de gestion financières. « C’est allé très vite, reconnaît David Merour, j’ai fait appel à des banques pour avoir des prêts mais ça n’a pas été possible. Il n’y a pas eu d’autre solution que de faire un dépôt de bilan. »
En 2016, l’association avait recruté ses premiers salariés. Plusieurs imputent directement la faillite de l’association au directeur. Deux points sont au cœur des désaccords : les retards de paiement sur les salaires et le défaut de paiement des charges patronales. « Il se cachait derrière l’éducation populaire et ses belles valeurs pour exploiter pleinement les gens », clarifie l’une des collaboratrices.
« Les gens partent, ils ne restent pas »
Ces dysfonctionnements structurels affectent de plus en plus durement la cohésion de l’équipe. La communication se brouille, jusqu’à devenir violente selon plusieurs employés. L’un d’entre eux, qui a souhaité garder l’anonymat, décrit David Merour comme « quelqu’un qui est toujours dans la peur, dans l’agression. » Il évoque aussi l’inquiétant turnover au sein de l’association : « les gens partent, ils ne restent pas. » Pour ceux qui décident de rester malgré tout, les arrêts maladie se multiplient.
Hier, à quelques heures de la décision de liquidation judiciaire de l’association, le directeur mis en cause a semblé faire amende honorable. « Je ne renie pas avoir une part de responsabilité dans cette histoire mais je voulais me battre pour l’association », s’explique David Merour.
Pour l’heure, l’association n’est pas dissoute, mais elle sera « mise en sommeil » jusqu’à nouvel ordre. Une procédure de licenciement économique va finalement être mise en place pour l’ensemble des 14 salariés qui, à défaut de garder leur emploi, pourront prétendre à leur allocation chômage.