Le gang des coffres-forts aux assises

Un dossier complexe et épais à examiner pour le jury de la cour d'assises.
Pendant 5 mois en 2016, ils ont méthodiquement attaqué des magasins d'alimentation, de quincaillerie et des points de vente de matériaux de construction. Leur cible : les coffres-forts. Estimation du butin : plus de 235 000 euros. 12 hommes comparaissent depuis le début de la semaine devant la cour d'assises. Ils répondent du chef d'accusation de violences avec armes en bande organisée.

Près des 20 faits de vols avec violence en bande organisée, réalisés du 29 février au 16 juin 2016, c'est le palmarès d'une bande qui a sévi dans tout Mayotte. Ils sont 12 à avoir été convoqués devant la cour d'assises. L'un d'entre eux sera jugé séparément, son avocate étant prise par la cour d'assises du Rhône. Quatre sont introuvables. Parmi eux, le chef présumé de la bande, un dénommé Oasis. En tout cas, c'est comme cela que l'ont présenté plusieurs accusés et les enquêteurs.

Le noyau dur était composé d'Oasis, Solo, Djala, Enfant et Kamar. Ce sont souvent les mêmes qui se déplaçaient en repérage dans les commerces et que l'on retrouve dans tous les faits. Oasis avait un ascendant sur tout le monde, c'est ce qui ressort des gardes à vue.

Didier Ribeiro, enquêteur de la gendarmerie

Si Solo, Djala et Enfant sont à la barre, Oasis et Kamar sont absents. Ils n'ont pas été appréhendés par les forces de l'ordre et font l'objet d'un mandat de recherche. Leurs comparses assurent qu'Oasis serait reparti dans leur pays natal aux Comores, avec la majorité du butin pour y faire ouvrir un magasin à sa femme.
Djala pour sa part a nié être présent sur certains faits. D'ailleurs, plusieurs fois des co-accusés sont revenus sur leurs auditions devant le juge d'instruction pour dire qu'il n'était pas là, notamment à Ironi-Bé, le 10 mars.

Une victime en fauteuil roulant agressée sans ménagement

Ce soir-là, Bernard Gagnardot, agriculteur et éleveur de poules tient sa comptabilité quand vers 22 h l'alarme de son domicile se met à sonner. Sur les caméras de surveillance, il voit 5 à 6 hommes armés et cagoulés qui s'avancent sur sa terrasse. Amputé de sa jambe gauche suite à un accident de moto, il tente de bloquer la porte d'entrée avec son fauteuil roulant. Mais les assaillants finissent par rentrer, le faire tomber de son fauteuil et le molester devant son fils âgé de 9 ans à l'époque. Les voleurs partent avec un coffre-fort vide, 2 400 euros en espèces, un porte-feuilles, deux téléphones et un ordinateur portables.

N'aviez-vous pas vu que la victime était handicapée ?

Cyril Ozoux, président de la cour d'assises de Mayotte

Une agression sans scrupule où la victime a été traitée sans ménagement. Solo et Bamoya, deux des agresseurs se sont confondus en excuses devant Bernard Gagnardot. Et ceux-ci ont soulignés qu'ils ne s'en étaient pas pris physiquement à celui-ci et à son fils. Pourtant la victime se souvient très bien des coups portés. Une expérience traumatisante qui l'a conduit à vendre son exploitation et quitter Mayotte pour La Réunion.

La bande s'en est pris physiquement également aux gardiens des entreprises Oté Matériaux et ETPC à Combani dans la nuit du 25 mai 2016, de la SNIE Kawéni le6 juin 2016 . Le gardien d'Oté Matériaux a été frappé sur le dos, les bras et le visage à coups de bâtons. Et ceux d'ETPC et de la SNIE ont été blessés après avoir reçu des coups de pied de biche.

Ils se rabattent sur l'alcool et les cigarettes quand le coffre-fort résiste

Quand le coffre-fort était insaisissable, les cambrioleurs se rabattaient sur l'alcool et les cigarettes. Cela a été le cas le 25 avril 2016 à la SNIE de Bandrélé. Après avoir ouvert les rideaux métalliques, désactivés les caméras et le système d'alarme, les assaillants ont tenté d'emporter le coffre-fort, sans succès. Mais ils ont réveillé le voisinage. Une voisine qui était descendu de chez elle a été poursuivi et a reçu des cailloux sur sa terrasse. Et en criant "au voleur", le quartier s'est réveillé, ce qui a mis en fuite les voleurs.

Ce vendredi, la personnalité des accusés sera décrite par les experts psychologues. Peut-être qu'on en saura un peu plus sur les véritables motivations de ces cambriolages et les relations entre les protagonistes. C'est lundi et mardi que les avocats des parties civiles, les avocats de la défense et l'avocat général prendront la parole. Les accusés risquent jusqu'à 20 ans de prison ferme.