Armistice de 1945 : l’épopée des dissidents, un exemple à suivre

Soldats de la deuxième guerre mondiale (illustration)
Voici 77 ans, la Seconde Guerre mondiale se terminait. C’est l’occasion de se souvenir de la participation à ce conflit des combattants volontaires antillais et guyanais, passés à la postérité sous l’appellation de "dissidents", une appellation et un statut qui se méritent.

"Dissidents" : ce mot désigne les combattants volontaires de Martinique, de Guadeloupe et de Guyane partis en clandestinité après qu’ils ont entendu l’appel lancé par le général de Gaulle pour libérer la France. Un discours diffusé le 18 juin 1940 depuis les studios de la BBC, à Londres.

Des historiens américains, canadiens, britanniques et martiniquais estiment de 4 à 5 000 le nombre de jeunes antillais et guyanais enrôlés au sein des Forces françaises libres. Leur périple effectué au péril de leur vie amène ceux de Martinique à Sainte-Lucie. Ceux de Guadeloupe vont en Dominique. Arrivés dans ces deux territoires britanniques, ils sont pris en charge par un émissaire de l’équipe du Général de Gaulle.

Direction Trinidad et les États-Unis pour des rudiments de formation militaire à Fort Dix, dans le New Jersey. Puis départ pour les champs de bataille de Provence, Alsace, Normandie et Allemagne. Ces recrues constituent de précieuses ressources pour les résistants. Ils sont mêlés aux soldats des toutes les contrées de l’empire, venus d’Afrique du nord, d’Afrique noire et du Pacifique. Leur courage sera maintes fois salué par leurs chefs et leurs camarades de combat.
Le statut de dissident se mérite

La qualité de "dissident" n’est attribuée qu’à celles et ceux qui ont fui le régime de l’Amiral Robert, de sinistre mémoire, mais avant le ralliement de la colonie à la France combattante le 14 juillet 1943. Une date essentielle. Ce jour-là, le traditionnel défilé est transformé en manifestation de défiance et de colère contre le gouverneur, à l’appel du maire de Fort-de-France Victor Sévère et du Comité de libération nationale. À la suite de cette démonstration, l’Amiral Robert démissionne et s’enfuit en France via Porto Rico.
La motivation de ces jeunes hommes et femmes, âgés de 16 à 25 ans pour la plupart, était simple : combattre les nazis et leurs alliés français de l’extrême droite. Hitler vaincu, l’Europe libérée, les survivants reviennent au pays. Mais voilà, ils sont ignorés. Comme s’ils gênaient. Pourtant, leur sacrifice a empêché que la France devienne allemande.

Leur engagement est nié par l’armée. Le ministre des Colonies. Paul Giacobbi, ordonne au nouveau gouvernement de ne pas reconnaître les combattants volontaires des colonies comme des résistants à part entière. Il leur prête des velléités indépendantistes. Un incompréhensible contresens pour ces jeunes partis défendre volontairement leur mère-patrie.

Une réhabilitation trop tardive

Les dissidents sont finalement réhabilités en 2009 seulement. Après quatre décennies de silence, leur statut est reconnu par l’État. Le président Nicolas Sarkozy prononce un discours mémorable devant le monument aux morts de Fort-de-France, le 25 juin de cette année-là.

Il déclare devant une quinzaine d’anciens combattants émus aux larmes : "L'histoire des dissidents est un exemple pour tous les Français et c'est pourquoi j'ai voulu que leur soit rendu l'hommage de toute la Nation. Je veux dire à ces femmes et à ces hommes que la France n'oublie pas ce qu'elle leur doit". Il faudra attendre encore deux ans pour que ces résistants puissent participer à la cérémonie du Mont Valérie, haut lieu de commémoration des actes de a résistance.

Le dernier des dissidents martiniquais a disparu récemment. Puisse leur combat être perpétué, afin que les générations montantes puissent se nourrir de leur exemple de courage et de lucidité politique. Ils ont combattu, contrairement à aujourd’hui. Il est grand temps de nous inspirer de leur intelligence de la situation et de leur rectitude morale.