Disparu le 11 août 2020 à l’âge de 88 ans au terme d’une vie bien remplie, l’historien et homme politique lègue une œuvre riche et multiforme.
Historien pionnier, militant politique inlassable, intellectuel exigeant, écrivain prolixe, élu disponible. Que retenir d'Édouard de Lépine ? Tous ces qualificatifs à la fois. Il a pu éveiller de nombreuses vocations d’historien parmi ses élèves du lycée Schoelcher. Ses leçons et ses nombreux livres ont permis à plusieurs de ses disciples d’exceller à leur tour dans la tâche ardue de la réhabilitation de la personnalité martiniquaise.
Militant contestataire de l'ordre colonial alors qu’il est encore étudiant à Paris dans les années 1950, il est l’un des premiers à critiquer publiquement les effets néfastes de la départementalisation. Une transformation des anciennes colonies pourtant exigée et obtenue par le Parti communiste dont il est alors membre.
Revenu au pays natal, il adopte la position de l’intellectuel engagé dans son siècle. Durant les six longues décennies de sa vie d’adulte, il n’a aucun mal à passer de la défense de principes idéologiques au militantisme pratique. Loin de se considérer comme un spectateur, il se met tout aussi aisément au service des administrés de la ville du Robert. Ce marxiste assumé a su se confronter au prosaïque de la gestion du quotidien de ses compatriotes.
Ses engagements multiples ont été parfois décriés. Sa trajectoire est singulière, il est vrai. Militant du Parti communiste depuis 1945, il se distingue de ses camarades en se déclarant partisan de l’indépendance nationale. Le PCM ayant opté pour l’autonomie lui devient trop étroit. Ce qui lui vaut d’en être exclu en 1971.
Il participe à la fondation, quelques mois plus tard, d’une nouvelle organisation, le Groupe révolution socialiste, qui promeut la solidarité internationale des peuples du monde contre l’impérialisme. Nouveau virage dix ans plus tard. Édouard de Lépine passe au Parti progressiste martiniquais (PPM) en 1982, rejoignant ceux qu’il ne cessait de combattre, trouvant les nationalistes trop timorés.
Son analyse de la situation l’amène à considérer l’indépendance comme un mirage. Le militant devient peu à peu homme politique. Il sera élu conseiller régional en 1986, puis maire en 1989 et conseiller général en 1992. Les vicissitudes de la vie politique l’éloigneront de ses mandats électoraux, mais il ne perd pas de vue la scène publique.
Au-delà de son parcours politique, les traces laissées par Édouard de Lépine sont indélébiles dans le domaine de la recherche historique. Il a su poser de solides jalons en vue de faciliter notre compréhension de la complexité de notre société. Son travail titanesque sur les luttes sociales et le mouvement ouvrier en témoigne.
Il a été le seul à écrire sur l’épisode dit de la Marche de la faim, cette gigantesque mobilisation des ouvriers agricoles ayant convergé de toute la Martinique vers Fort-de-France en 1935 pour réclamer du travail et un salaire décent. La grève de janvier-février 1974 lui a été également l’occasion de décrypter le rôle des ouvriers dans cette lutte mémorable.
Édouard de Lépine s’est aussi beaucoup intéressé aussi aux faits et aux personnages politiques. Mentionnons son "Hommage à un grand Martiniquais, Camille Darsières" consacré à son condisciple du lycée Schoelcher. Dans la même veine, il présente ses respects à un personnage qu’il a admiré depuis son jeune âge, Aimé Césaire. Davantage que des hagiographies, ces deux ouvrages replacent les engagements de ces dirigeants du PPM dans une perspective historique.
Certains pourront moquer Édouard de Lépine pour ne s’être pas contenté de demeurer oxydé sur ses choix de jeunesse. Il reste que beaucoup retiendront que son œuvre demeure un exemple à suivre pour les générations actuelles de militants. À savoir, s'engager résolument pour un idéal construit sur une analyse fine en définissant des objectifs clairs et partagés.
Militant contestataire de l'ordre colonial alors qu’il est encore étudiant à Paris dans les années 1950, il est l’un des premiers à critiquer publiquement les effets néfastes de la départementalisation. Une transformation des anciennes colonies pourtant exigée et obtenue par le Parti communiste dont il est alors membre.
Revenu au pays natal, il adopte la position de l’intellectuel engagé dans son siècle. Durant les six longues décennies de sa vie d’adulte, il n’a aucun mal à passer de la défense de principes idéologiques au militantisme pratique. Loin de se considérer comme un spectateur, il se met tout aussi aisément au service des administrés de la ville du Robert. Ce marxiste assumé a su se confronter au prosaïque de la gestion du quotidien de ses compatriotes.
Des engagements multiples au service de son pays
Ses engagements multiples ont été parfois décriés. Sa trajectoire est singulière, il est vrai. Militant du Parti communiste depuis 1945, il se distingue de ses camarades en se déclarant partisan de l’indépendance nationale. Le PCM ayant opté pour l’autonomie lui devient trop étroit. Ce qui lui vaut d’en être exclu en 1971.
Il participe à la fondation, quelques mois plus tard, d’une nouvelle organisation, le Groupe révolution socialiste, qui promeut la solidarité internationale des peuples du monde contre l’impérialisme. Nouveau virage dix ans plus tard. Édouard de Lépine passe au Parti progressiste martiniquais (PPM) en 1982, rejoignant ceux qu’il ne cessait de combattre, trouvant les nationalistes trop timorés.
Son analyse de la situation l’amène à considérer l’indépendance comme un mirage. Le militant devient peu à peu homme politique. Il sera élu conseiller régional en 1986, puis maire en 1989 et conseiller général en 1992. Les vicissitudes de la vie politique l’éloigneront de ses mandats électoraux, mais il ne perd pas de vue la scène publique.
L’historien laisse des traces indélébiles
Au-delà de son parcours politique, les traces laissées par Édouard de Lépine sont indélébiles dans le domaine de la recherche historique. Il a su poser de solides jalons en vue de faciliter notre compréhension de la complexité de notre société. Son travail titanesque sur les luttes sociales et le mouvement ouvrier en témoigne.
Il a été le seul à écrire sur l’épisode dit de la Marche de la faim, cette gigantesque mobilisation des ouvriers agricoles ayant convergé de toute la Martinique vers Fort-de-France en 1935 pour réclamer du travail et un salaire décent. La grève de janvier-février 1974 lui a été également l’occasion de décrypter le rôle des ouvriers dans cette lutte mémorable.
Édouard de Lépine s’est aussi beaucoup intéressé aussi aux faits et aux personnages politiques. Mentionnons son "Hommage à un grand Martiniquais, Camille Darsières" consacré à son condisciple du lycée Schoelcher. Dans la même veine, il présente ses respects à un personnage qu’il a admiré depuis son jeune âge, Aimé Césaire. Davantage que des hagiographies, ces deux ouvrages replacent les engagements de ces dirigeants du PPM dans une perspective historique.
Certains pourront moquer Édouard de Lépine pour ne s’être pas contenté de demeurer oxydé sur ses choix de jeunesse. Il reste que beaucoup retiendront que son œuvre demeure un exemple à suivre pour les générations actuelles de militants. À savoir, s'engager résolument pour un idéal construit sur une analyse fine en définissant des objectifs clairs et partagés.
Les principaux ouvrages d’Edouard de Lépine
- Questions sur l'histoire antillaise : trois essais sur l'abolition, l'assimilation, l'autonomie, Editions Désormeaux, 1978
- La crise de février 1935 à la Martinique : la marche de la faim sur Fort-de-France, Éditions L'Harmattan, 1980
- Dix semaines qui ébranlèrent la Martinique : 25 mars - 4 juin 1848, Editions Maisonneuve et Larose, 1999
- Hommage à un grand Martiniquais, Camille Darsières, K Editions, 2009
- Sur la question dite du statut de la Martinique, Editions Désormeaux, 2009
- Chalvet, Février 1974, Editions Le Teneur, 2014
- De Gaulle, le 18 juin 1940 et les Martiniquais, K Editions, 2015
- Nous sommes des nains sur les épaules d'un géant, Aimé Césaire, K Éditions, 2017
- Ecrits politiques d’Aimé Césaire, 5 tomes, collection dirigée avec le Dr. René Hénane, Nouvelles Editions Place, 2013 à 2019