La réponse du parquet de Paris était attendu par les organisations et représentants des victimes du chlordécone en Martinique depuis la fin du mois de mars. A cette époque les juges d'instruction parisiens du pôle de santé publique avaient clos leurs investigations sans avoir procédé à des mises en examen.
Dans son réquisitoire définitif du jeudi 24 novembre 2022, le parquet de Paris considère notamment que les faits semblent prescrits, s'agissant notamment de l'empoisonnement, ou non caractérisés, concernant l'administration de substances nuisibles. Il appartient désormais aux juges d'instruction de rendre leur décision finale dans ce dossier très sensible en Guadeloupe et en Martinique.
Les réactions...
La déception est grande pour les associations plaignantes.
Nous avons un réquisitoire définitif de non-lieu du parquet de Paris que nous contestons. On ne peut pas avoir aujourd'hui la prévalence du cancer de la prostate au monde et on nous dit qu'il n'y a pas d'empoisonnement, 90% de la population adulte est contaminée par le chlordécone. Nous avons un mois pour contester sur le plan judiciaire le réquisitoire du procureur de Paris. Le deuxième volet est le volet populaire, tout dépendra de la capacité des Martiniquais d'accepter ce déni de justice. nous appelons d'ores et déjà la population à se mobiliser aussi bien en Martinique qu'en Guadeloupe.
Louis Boutrin, avocat de la partie civileJournal télé 13h Martinique la 1ere
Interdit mais utilisé aux Antilles
Interdit en métropole en 1990, le chlordécone a continué à être utilisé aux Antilles jusqu'en 1993 où il est soupçonné d'avoir provoqué une vague de cancers.
L'enquête avait été ouverte en 2007 après le dépôt par plusieurs associations antillaises d'une plainte pour empoisonnement, mise en danger de la vie d'autrui et administration de substance nuisible.
En 2021, les juges d'instruction chargés du dossier avaient fait part à plusieurs parties civiles de leur analyse selon laquelle les faits seraient dans leur grande majorité prescrits.
L'annonce de la fin des investigations sans aucune mise en cause avait déjà soulevé un tollé fin mars en Martinique, où 5.000 à 15.000 personnes avaient défilé dans les rues de Fort-de-France.
Toxique et cancérigène
Le chlordécone dont les caractéristiques toxiques et cancérigènes étaient connues a pourtant été autorisé et largement utilisé sur les bananiers du département. Le produit a causé une pollution des sols et des eaux.
La population antillaise présente par ailleurs un taux d'incidence du cancer de la prostate parmi les plus élevés au monde et ces cancers liés à l'exposition au chlordécone ont été reconnus comme maladie professionnelle en décembre. 90% de la population adulte est contaminée par le chlordécone, selon Santé publique France.