Face à l’érosion du littoral, comment reloger la population ?

Au Prêcheur, l'érosion gagne du terrain et menace les habitations.
La visite de la présidente de l’Ordre national des architectes, en Martinique, cette semaine, lui a permis de se rendre compte que l’équipe municipale du Prêcheur déploie un ambitieux projet de relogement de la population vivant en bord de mer. Cette commune est la seule disposant d’un plan de cette nature, alors que la majorité des habitants de Martinique est menacée par la montée inexorable du niveau de la mer.

Comment reloger les habitants du littoral qui seront chassés par la montée du niveau de la mer ? Science-fiction ? Pas du tout ! L’urgence est déjà à nos portes dans notre île menacée par l’érosion de nos côtes, l’une des conséquences les plus visibles du réchauffement du climat à l’échelle de la planète. La Martinique n’est pas la seule concernée.

Tout l’archipel de la Caraïbe est impacté par ce phénomène. Lequel est déjà présent dans le Pacifique sud, où les archipels des Kiribati et des Tuvalu sont en train de disparaître dans la mer. Idem dans l’océan Indien, où plusieurs îles de l’archipel des Maldives sont déjà submergées et rendues inhabitables.

Nos experts ne cessent de tirer la sonnette d’alarme en expliquant, patiemment, que d’ici trente à quarante ans, plusieurs dizaines de milliers de personnes vivant sur le littoral seront contraintes de déménager. Elles devront aller habiter à l’intérieur des terres, notamment sur les collines, délaissant leurs logements de bord de mer.

Rebâtir ailleurs

Les maires des vingt-cinq communes situées sur la bande côtière seront contraints de délocaliser une bonne partie des équipements existants dans de nouvelles zones éloignées des plages. Ecoles, stades, centres de soins, commerces, réservoirs d’eau, réseaux électriques, routes d’accès devront être bâtis ailleurs qu’aujourd’hui.

Selon les estimations de nos géographes et climatologues, la situation est la plus critique sur le littoral bordant la mer des Caraïbes. Plusieurs communes devront organiser la relocalisation de leur bourg ou leur centre-ville : Anses d’Arlet, Diamant, Carbet, Saint-Pierre, Prêcheur, Fort-de-France. Ce sont les zones les plus touchées par la montée continue des eaux.

Ces données sont largement connues des autorités politiques et administratives depuis deux décennies. Le nécessaire repeuplement partiel de la population dans la majorité des communes doit s’anticiper. Ne serait-ce que pour habituer chacun de nous à l’idée de partir vivre là où la mer ne menace pas notre vie.

Un défi insurmontable ?

Pour le moment, les rares initiatives prises en ce sens montrent que cette problématique du relogement relève du casse-tête. Comment déplacer des milliers de personnes, vu que la création de quartiers nouveaux ou de villes nouvelles représente un défi architectural, logistique, technologique, financier, social, culturel ?

Modifier la répartition des logements, des zones d’activités et des infrastructures est tout sauf neutre.

Or, si nous nous laissons paralyser par l’immensité des obstacles à surmonter, nous ne parviendrons jamais à relever ce défi. Si nous attendons sans réaction que la mer nous envahisse, nos descendants nous le reprocheront à juste titre, alors que nous avons les moyens de décider, aujourd’hui, de nous protéger contre les assauts de la nature.