Cette maison de repos est située dans un lotissement paisible, au rez-de-chaussée d’une petite résidence privée au quartier Balata à Fort-de-France. Elle avait déjà fait l’objet de plusieurs inspections et avertissements entre 2011 et 2021. Mais les recommandations des autorités sanitaires s’agissant de la qualité des prestations sont restées vaines.
Mardi 17 mai 2022, après de nouveaux signalements, six membres de l’inspection de la santé publique ont été dépêchés sur place, à la demande la Collectivité Territoriale de Martinique en tant que tutelle de la structure. La CTM avait été au préalable informée par le procureur de multiples dysfonctionnements. Les autorités ont donc décidé d’une suspension provisoire d’autorisation, après un constat accablant.
On est en présence d’une mauvaise prise en charge. On a constaté par exemple juste à côté de la cuisine, une pièce où il y avait des déchets de tous genres, avec des traces de déjections de nuisibles, de vieux pots de peinture, bref, un dépôt (…) ! On a pu observer également que le personnel avait été informé sur une petite pancarte apposée sur une boîte contenant des briques de soupe, qu’il pouvait y avoir d'autres nuisibles dans cette cuisine. En termes d'alimentation toujours, on a aussi remarqué tous ensemble que les réserves et le repas qui était en cours de cuisson durant notre présence, étaient insuffisants pour 11 résidents (…). Or, il y a des règles nutritionnelles à respecter en particulier dans cette tranche d’âge, surtout que les familles payent.
Docteur Marie-Laure Audel, médecin général, inspecteur de santé publique
En ce qui concerne les aménagements, dans les espaces de nuit, les chambres doubles réservent peu d’intimité à leurs usagers. Quant au coin détente qui surplombe la voie principale de Balata, à l’arrière du petit immeuble, il n’est pas de tout repos pour des seniors.
"La maltraitance n’est pas que physique"
L’ARS pointe aussi du doigt une planification "compliquée" des heures de service, entre l’équipe nocturne et celle de jour. Conséquence, les personnes âgées seraient réveillées beaucoup trop tôt pour le bain et le petit déjeuner dans la foulée.
Si la maltraitance physique n’a pas été évoquée par la mission d’inspection, cette dernière relève néanmoins que "les règles de bonnes pratiques ne sont pas respectées" dans cet établissement.
La maltraitance en santé publique ce n’est pas que physique, c'est à dire qu'à partir du moment où les gens n'ont pas assez à manger, où l'organisation de la journée les font se lever à 4h30 le matin, c'est de la maltraitance. La conclusion c'est que même s'il n’y a pas de maltraitance physique, il y a un faisceau d'arguments qui font qu’ils ne sont pas pris en charge, conformément aux règles de bonnes pratiques.
Docteur Marie-Laure Audel
L’EHPA "Le Flamboyant", devra rentrer dans "un processus de normalisation" afin de récupérer son autorisation d’encadrer des personnes âgées précise le médecin de l’ARS. En attendant, les 11 pensionnaires ont été répartis dans d’autres structures, les EHPAD "L’Oasis" à Balata (8), "La Yole Gran Moun" à Château-Bœuf (2) et "Les Filaos" au Robert (1).
Cette affaire rappelle l’actualité récente du groupe Orpéa épinglé pour ses défaillances, dans un livre paru en janvier 2022 dans l’hexagone. Selon certaines sources, les langues commencent à se délier en Martinique, où de nouveaux signalements pourraient arriver prochainement sur le bureau du procureur.