Une incompréhensible comparaison entre la Shoah et l’esclavage

Une nouvelle polémique est née par les propos maladroits d’une chroniqueuse de télévision. Elle établit une hiérarchie entre l’extermination des Juifs et les horreurs de la mise en esclavage des Africains. Ce qui suscite l’indignation et l’incompréhension.
Comment peut-on comparer deux souffrances, deux drames, deux opérations de déshumanisation ? C’est pourtant ce qu’a réalisé une célèbre écrivaine dans une célèbre émission de télévision.
Elle a osé établir un parallèle entre deux moments historiques horribles.

D’un côté, la Shoah, l’extermination planifiée par les nazis de 6 millions de Juifs durant la Seconde guerre mondiale. De l’autre, la traite négrière transatlantique et la mise en esclavage aux Amériques de 12 millions d’Africains.

Pour cette écrivaine dont nous tairons le nom par charité, l’esclavage des Nègres a été moins pénible que le gazage des Juifs. Son argument : alors que le régime nazi avait organisé la disparition de tous les Juifs d’Europe, les colons européens soignaient correctement leur main d’oeuvre gratuite. Les uns étaient voués à la mort, les autres étaient commercialisables.

"Ce n'est pas vrai que les traumatismes sont les mêmes, que les souffrances infligées aux peuples sont les mêmes" a-t-elle notamment déclaré. Sa conclusion : les souffrances des Juifs sont pires que celles des Nègres.
 

Pourquoi vouloir comparer deux drames historiques ?


Bien entendu, ses propos déplacés, maladroits ou inconscients lui ont attiré les foudres des téléspectateurs, des internautes, de militants antiracistes et afro-descendants. Des historiens ont dénoncé cette légèreté, dont Myriam Cottias et Claude Ribbe. Un millier de signalements ont été envoyés au Conseil supérieur de l’audiovisuel.
 

Une attitude révélant le malaise face à l’esclavage


L’écrivaine a fini par publier un communiqué d’excuses. Dans son mea culpa, elle dit s’être mal exprimée et n’avoir pas su trouver les mots pour expliquer la différence de traitement, nécessaire selon elle, entre ces deux grands drames contemporains. Mettre sur le même plan la Shoah et l’esclavage est inopportun, dans son idée. Il convient de les distinguer pour mieux les appréhender.

Un raisonnement hélas banal dans certains cercles politiques et intellectuels français. Le ressentiment légitime des Afro-descendants est minoré. Ce qui alimente les incompréhensions mutuelles. Une attitude révélant le malaise face à l’esclavage.

Il est vrai qu’il est compliqué pour les Européens du 21e siècle de surmonter les conséquences des fautes de leurs ancêtres. Il faut peut-être leur laisser le temps de digérer une histoire complexe au centre de laquelle leurs ascendants se sont trouvés. Jusqu’à quand serons-nous patients ?