Voici 150 ans, la population se soulevait après une décision contestée du tribunal. Ce moment essentiel de notre histoire semble faire écho à la Martinique d’aujourd’hui.
Durant une année entière, l’insurrection de septembre 1870 met en péril l’ordre colonial avant d’être écrasée dans le sang par les forces de l’ordre. Le peuple en armes ne réussit pas à mettre fin au régime post-esclavagiste encore vivace, 22 ans après l’interdiction du travail servile. En dépit de leur courage et de leurs efforts, les insurgés échouent devant le mur de l’injustice et de la répression.
Tout commence en février. Sur la route allant de Rivière-Pilote au Marin, un fonctionnaire à cheval, Augier de Maintenon, croise un jeune commerçant, marchant à pied, Léopold Lubin. Le cavalier ordonne au piéton de le laisser passer. Lubin refuse, Augier le cravache. Lubin porte plainte, mais est débouté.
Deux mois plus tard, il se venge de l’humiliation subie. Arrêté, il est condamné à 5 ans de bagne. La population refuse ce verdict qu’elle considère inique. A Rivière-Pilote, elle réclame le désarmement des colons blancs et la libération de Lubin. Les autorités ignorent la colère du peuple. Le 22 septembre au soir, l’habitation Mauny du béké Codé, est incendiée. Il revendiquait son rôle moteur dans la condamnation de Lubin.
En trois jours, 25 habitations sont incendiées. Les insurgés installent un camp à Régale avec à leur tête Louis Telgard, Eugène Lacaille, Daniel Bolivard, Lumina Sophie. Le gouverneur, Charles Menche de Loisne, décrète l’état de siège. Pour lui, la Martinique est sur le point de prendre son indépendance, comme Saint-Domingue devenue Haïti.
La contre-offensive de l’armée est sanglante. Au bout d’une année d’escarmouches, une centaine d’insurgés sont tués, un chiffre en-dessous de la réalité. En décembre 1871, le tribunal prononce 8 condamnations à mort et 90 condamnations au bagne en Nouvelle-Calédonie.
Paradoxe, le gouverneur proclame la restauration de la République, trois semaines après la démission de l’empereur Napoléon III. Mais c’est la république, réclamée par les insurgés, qui réprime et condamne. A leur demande d’égalité des droits, la république leur répond par l’humiliation et la violence.
Au fil du temps, la frustration du peuple sera d’autant plus grande que la domination de la minorité possédant l’essentiel des richesses est confortée. L’aspiration contrariée à la liberté est ignorée. L’exigence de justice est foulée aux pieds. Pourtant, le peuple a choisi comme voie de son émancipation la protection de l’Etat contre l’oppression exercée par les puissants, et non la sécession.
L’incompréhension entre le peuple et l’Etat perdure durant de longues décennies, voire jusqu’à nos jours. Au point que l’inachevé de notre citoyenneté ambigüe ressentie aujourd’hui n’est pas sans rappeler le ressenti des insurgés de septembre 1870.
Tout commence en février. Sur la route allant de Rivière-Pilote au Marin, un fonctionnaire à cheval, Augier de Maintenon, croise un jeune commerçant, marchant à pied, Léopold Lubin. Le cavalier ordonne au piéton de le laisser passer. Lubin refuse, Augier le cravache. Lubin porte plainte, mais est débouté.
Deux mois plus tard, il se venge de l’humiliation subie. Arrêté, il est condamné à 5 ans de bagne. La population refuse ce verdict qu’elle considère inique. A Rivière-Pilote, elle réclame le désarmement des colons blancs et la libération de Lubin. Les autorités ignorent la colère du peuple. Le 22 septembre au soir, l’habitation Mauny du béké Codé, est incendiée. Il revendiquait son rôle moteur dans la condamnation de Lubin.
Une déflagration inattendue et spontanée
En trois jours, 25 habitations sont incendiées. Les insurgés installent un camp à Régale avec à leur tête Louis Telgard, Eugène Lacaille, Daniel Bolivard, Lumina Sophie. Le gouverneur, Charles Menche de Loisne, décrète l’état de siège. Pour lui, la Martinique est sur le point de prendre son indépendance, comme Saint-Domingue devenue Haïti.
La contre-offensive de l’armée est sanglante. Au bout d’une année d’escarmouches, une centaine d’insurgés sont tués, un chiffre en-dessous de la réalité. En décembre 1871, le tribunal prononce 8 condamnations à mort et 90 condamnations au bagne en Nouvelle-Calédonie.
Paradoxe, le gouverneur proclame la restauration de la République, trois semaines après la démission de l’empereur Napoléon III. Mais c’est la république, réclamée par les insurgés, qui réprime et condamne. A leur demande d’égalité des droits, la république leur répond par l’humiliation et la violence.
Une société bloquée où règne la misère
Au fil du temps, la frustration du peuple sera d’autant plus grande que la domination de la minorité possédant l’essentiel des richesses est confortée. L’aspiration contrariée à la liberté est ignorée. L’exigence de justice est foulée aux pieds. Pourtant, le peuple a choisi comme voie de son émancipation la protection de l’Etat contre l’oppression exercée par les puissants, et non la sécession.
L’incompréhension entre le peuple et l’Etat perdure durant de longues décennies, voire jusqu’à nos jours. Au point que l’inachevé de notre citoyenneté ambigüe ressentie aujourd’hui n’est pas sans rappeler le ressenti des insurgés de septembre 1870.