Elle a traversé les siècles et fait désormais partie intégrante du paysage. L'usine du Galion fume depuis 160 ans dans la commune de Trinité. En pleine saison de la récolte cannière, ses effluves broyés se répandent dans l'air, signe qu'elle fonctionne toujours.
Pendant la saison de la coupe, elle devient le terminus de nombreux camions et tracteurs chargés de cannes fraîchement coupées. Elle est la dernière sucrerie encore en activité sur l'île.
Un peu d'histoire
Son histoire riche et complexe, remonte au XVIIe siècle, lorsque la famille Dubuc possédait les terres de la région. En 1850, Eugène Eustache, un négociant de Saint-Pierre, achète les domaines du Galion et de Grands-Fonds et entame une concentration foncière. Vers 1861, il décide de construire une sucrerie moderne sur le domaine de Grands-Fonds. L'usine centrale à vapeur équipée par la société Cail, est mise en service en 1865.
Malgré les crises sucrières à la fin du XIXe et au XXe siècle qui entraînent la faillite de nombreuses sucreries aux Antilles, l'usine du Galion parvient à survivre.
Aujourd'hui, elle produit non seulement du sucre, mais aussi deux types de rhum, dont le renommé "Grand Arôme", utilisé dans l'industrie alimentaire et en parfumerie.
Depuis 1984, la gestion de la sucrerie est assurée par la Société Anonyme d’Économie Mixte de Production Sucrière et Rhumière de la Martinique (SAEM PSRM).
Cette usine demeure un témoin important de l'histoire économique et culturelle de la Martinique, illustrant la résilience et l'importance de l'industrie sucrière dans la région.
Des hommes et des femmes ont fait vivre ce patrimoine
Rolande Bosphore, originaire de Trinité, a effectué des recherches approfondies sur l’usine du Galion. Celles-ci sont actuellement exposées à la Place Joyeuse de Trinité, visibles jusqu’au 7 juillet au marché couvert de la ville.
L'historienne met en lumière les faits marquants de l'outil, ainsi que les femmes et les hommes qui ont contribué à son développement et son fonctionnement.
Des histoires humaines...
L'exposition met particulièrement en avant les récits des travailleurs de l'usine. Parmi eux, François Bélume, aujourd’hui âgé de 85 ans et retraité, qui a partagé son parcours inspirant.
Ayant commencé sa carrière en 1958 à l'âge de 19 ans, Belume a gravi les échelons, passant de "manœuvre sous moulin" à cuiseur de sucre, un poste qu'il considère très honorifique. Il se souvient avec fierté de son évolution au sein de la raffinerie. Au début, il nettoyait les moulins à broyer la canne, puis il est passé au "plancher à bagasse", avant de terminer sa carrière comme évaporeur pour la fabrication du sirop de canne.
...une histoire vivante
En retraite depuis 20 ans, François Bélume continue de transmettre l'histoire du Galion, en exposant dans son jardin des parties de l’usine qui allaient être envoyées à la ferraille.
C'est sa manière à lui de préserver et de partager un pan important de son existence et de l'histoire industrielle de la Martinique.
En retraçant l'histoire de l'usine et de ses ouvriers, cette exposition offre une perspective humaine sur les évolutions industrielles et sociales de la région.