La Martiniquaise Claudia Numa crée des bijoux pour rester libre

Claudia Numa fabrique des petits joyaux "décalés".
Parce qu’être belle et rebelle ne lui suffisait pas, Claudia Numa s’est lancé depuis trois ans dans la création de bijoux qu’elle réalise à partir de n’importe quel matériau.

Dans les années 60, quand on parle de "voyage" pour des enfants de la Martinique, c’est généralement parce qu’ils quittent leur île, pour suivre leurs parents dans l’Hexagone. Pour Claudia Numa, ça n’a pas été le cas : elle n’a pas pris l’avion et n’est pas allée bien loin. 

Pour elle, le "voyage" a consisté à monter dans la 404 blanche de son père et à quitter Le François, où elle est née "dans la belle campagne de Bois-Soldat", pour s’installer à Sainte-Anne. Entre les deux villes, il y a une cinquantaine de kilomètres de distance, c’est dire si ça n’a rien changé à sa vie. 

Claudia enfant et bébé.

J’avais 2 ans et j’étais la dernière d’une fratrie de cinq enfants. J’étais choyée, trop peut-être. Ma mère travaillait au Club Med et mon père au centre d’essais en cultures irriguées de Val-d'Or.

 

Le soir, quand il finissait, nous dévalions la côte à sa rencontre. Il nous achetait un Royal cône à la station de monsieur Malsa. Nous avions une maison de fonction et la télévision, ce qui était rare pour l’époque.

 

Claudia Numa

 

 

 À 10 ans, Claudia Numa plie bagage à nouveau et retourne au François, où elle fait le collège et le lycée. Elle cultive le paradoxe d’être une fille sage qui n’aime pas l’école. Néanmoins, elle s’efforce de "s’instruire pour rentrer dans le moule de la société". Mais cela ne se fait pas sans heurts.

J’étais très rebelle. Je me souviens d’un prof d’histoire-géo qui m’a donné un coup de ce gros cahier de texte vert, que nous avions à l’époque. Eh bien, en partant, j’ai jeté le cahier sous le pont Martienne au François, en signe de protestation.

 

"J’étais  très rebelle", révèle Claudia Numa.

Surnommé Amouch par ses camarades, Claudia opte plus tard pour Koklo. Ça lui va mieux et c’est à la mode. Le chanteur Claude François, surnommé Cloclo, et ses danseuses, les Claudettes, font fureur à l’époque à la Martinique. 

"C’était mon chanteur français préféré", se souvient Claudia Numa. Hasard de la vie, en 1986, elle se retrouve dans un centre de convalescence au François, en même temps que le peintre Khokho René-Corail et la fille d’une Claudette

Entre Khokho et Kloklo, le courant passe sous le regard indirectement de Cloclo.

Nous nous retrouvions souvent autour de Khokho René-Corail. Sa peinture me bouleversait. Ça me prenait aux tripes. Quinze ans plus tard, un de mes frères est tombé gravement malade et je me suis mis à peindre moi aussi sur tous les supports que je trouvais. C’était mon exutoire. J’exposais mes œuvres dans les hôtels et les restaurants de l’île.

 

Claudia Numa crée des bijoux sous son nom d’artiste Klo.

Entretemps, Claudia Numa a suivi une formation en tourisme à la CCIM (Chambre de Commerce et d'Industrie de Martinique) et travaillé pour différentes enseignes qui vendaient du rhum ou des souvenirs. En 2001, elle a ouvert une boutique de prêt-à-porter au François. "Je voulais voler de mes propres ailes", explique-t-elle. L’expérience durera dix ans. 

Aujourd’hui, Claudia Numa crée des bijoux. Une activité qu’elle a débutée il y a trois ans, sous son nom d’artiste Klo. Elle fabrique des petits joyaux "décalés" à partir par exemple de semelles de chaussures ramassées sur un parcours de santé et préalablement désinfectées. 

"J’aime cette liberté  de pouvoir faire des œuvres avec des matériaux inimaginables", conclue Klo.