La productrice martiniquaise d'adoption, Marilène Mauriello met la pédale douce

Marilène Mauriello, ancienne co-gérante d'hibiscus Records avec feu son mari Jean-Michel.
Après avoir fait, avec son mari, les beaux jours de la musique antillaise et contribué au succès de Kali, Max Ransay, Eric Virgal, Kwak ou Taxi Kréol, la gérante d’Hibiscus Records conjugue désormais son temps entre l’immobilier et le yoga.

"Séré mwen fò, pli pré ankò, mwen lé sé vou, ki ba mwen lanmou" (Tiens moi fort, très fort, je veux de ton amour). L’histoire de Marilène Mauriello pourrait se résumer à ce refrain du groupe Kwak, dont elle a fait le succès.

Tout commence à Poitiers, le chef-lieu de la Vienne, où elle naît en 1961. Son père meurt quelques jours après. Sa mère se remarie deux ans plus tard. Son beau-père possède  une entreprise de travaux publics.

Marilène a vécu son enfance à Poitiers.

Ma mère s’occupait de la partie administrative et lui du reste. Ils travaillaient énormément. J'étais donc souvent chez mes grands-parents. Je faisais beaucoup de vélo et c’était un réel plaisir d'aller dans les vergers cueillir les fruits. Sinon, dans l’ensemble, j’ai été élevée à la dure. 

Marilène Mauriello ancienne gérante d’Hibiscus Records

 

En 1982, son BTS de comptabilité en poche, Marilène travaille chez un paysagiste. "C’était la belle époque", se souvient-elle. Mais au bout de quelques mois, un homme, Jean-Michel Mauriello, bouscule la vie de la jeune femme de 21 ans. C’est un Martiniquais installé à Poitiers, où il possède deux boutiques de prêt-à-porter. Il est également batteur dans un groupe de jazz.

Je l’ai rencontré un soir dans un bar où il se produisait. Nous avons parlé pendant des heures. Nous nous apprécions mutuellement mais il était marié. Trois mois plus tard, il m’appelle et m’annonce qu’il a divorcé, qu’il vend ses boutiques et rentre dans son pays. Il me demande de venir avec lui en Martinique. J’ai longuement réfléchi et j’ai dit oui.

Marilène Mauriello

Jean-Michel et Marilène Mauriello.

En 1983, lorsque Marilène débarque à Fort-de-France, elle ne sait rien de l’histoire et de la culture de la Martinique, mais elle apprend vite grâce aux amis de son mari, en particulier Tony Delsham et son épouse.

Embauchée chez un traiteur, la jeune Poitevine repart à zéro sur le plan professionnel. De son côté, Jean-Michel Mauriello continue de jouer le soir dans les piano-bars avec le musicien Marius Cultier.

Si les rythmes antillais ne constituent jusqu’ici qu’une passion pour lui et une découverte pour elle, tout change l’année suivante. En 1984, le couple se lance dans la production musicale. Marilène et Jean-Michel créent l’entreprise Hibiscus Records et construisent un studio d’enregistrement à Clairière à Fort-de-France.

On a produit notre premier vinyle. C’était la chanteuse guyanaise Josy Mass. Ça n’a pas marché. On a vendu environ 200 exemplaires. Les disquaires eux-mêmes pirataient le disque pour en faire des cassettes qu’ils écoulaient.

 

On a connu d’autres échecs avec Pipo Gertrude ou encore le groupe Cristal de Franck Donatien, Tony Chasseur et Philippe Joseph.

 

Mais on a tenu jusqu’à nos premiers succès. D’abord avec Zaza. Son 45 tours s’est vendu à dix mille exemplaires. C’était énorme à l’époque pour la Martinique. Ensuite il y a eu le même succès avec la route Chanflo de Max Ransay en 1987. Puis il y a eu Kali avec le disque Racines et Eugène Mona avec Blanc Manger. Au total, on a produit quelques 300 albums.

 

Personnellement, je ne suis pas une artiste mais j’ai eu la chance de connaître des artistes avec un grand A qui m’ont beaucoup apporté : Eric Virgal, Kwak, Taxi Kréol, Marcé, Manuel Césaire. Malheureusement, on ne peut pas tous les citer. 

Marilène Mauriello

Le célèbre studio Hibiscus Records.

Après le décès de Jean-Michel Mauriello en 2008, Marilène  arrête la production musicale. Le studio d’enregistrement est vendu. Place à une nouvelle vie plus sereine, sans contrainte. À côté de ses investissements dans l’immobilier, elle fait du yoga et du Pilates (gymnastique douce).

Aujourd’hui, du haut de ses cheveux grisonnants, Marilène Mauriello fait le bilan d’une existence bien remplie, en réapprenant à organiser son temps en fonction de ses envies et non plus des besoins des autres. S’il lui arrive encore de penser à la douceur poitevine qui a bercé son enfance an lòt bò, elle sait où sont ses attaches les plus fortes.

Cela fait 38 ans que je vis dans mon pays d’adoption, la Martinique. Je ne la quitterais pour rien au monde, même si j’aime partir pour les voyages-travail ou les voyages-détentes, j’y reviens tout le temps avec satisfaction. C’est ma zone de confort et ma vie sociale. Partir c’est toujours pour mieux revenir.

Marilène Mauriello, Martiniquaise d'adoption.