Mûrissement frauduleux de bananes jaunes en Martinique : "certains professionnels font de l'importation sans aucune traçabilité", révèlent d'autres professionnels

Des bananes plantains en murissement naturel, à la fois vertes et jaunes.
L'utilisation frauduleuse de l'éthéphon pour le mûrissement des bananes plantains interpelle et suscite des questions concernant cette production en Martinique.

La banane plantain, également appelée banane jaune ou créole, n'est pas la plus grosse production de l'île. La banane dessert ou la canne à sucre restent largement majoritaires. 

Pourtant, elle représente plusieurs centaines de tonnes vendues chaque année, principalement sur le territoire. Selon nos informations, l'exportation de ce légume existe, mais dans des proportions relativement faibles. Concernant l'importation, les principaux fournisseurs sont la Guadeloupe ou la Dominique.

Il y a 350 à 370 tonnes de bananes plantains sur l'année, déclarées et reconnues. Mais je pense qu'il y a 120 à 150 tonnes qui passent entre les mailles du filet. La banane plantain est le seul produit de Martinique pour lequel nous sommes autosuffisants . Cela n'empêche pas que pour des questions de coût, certains professionnels fassent de l'importation sans aucune traçabilité et que ce produit soit revendu comme étant d'origine Martinique.

Bruno Rengassamy, directeur commercial CHM Maia

Pour écouler leur production, les agriculteurs se tournent généralement vers la coopérative à laquelle ils adhèrent. L'autre option est la vente directe, du producteur au consommateur. 
Selon le ministère de l'Agriculture et de la souveraineté alimentaire, l'île compte six "organisations de producteurs". Cependant, le nombre de coopératives est bien plus important. 

CHM (Coopérative Horticole De Martinique) -Maia (Marché Agricole d'Intérêts Antillais) qui a succédé à la SOCOPMA est l'une des plus importantes en terme d'adhérents et de tonnage. 

Nous produisons 120 à 130 tonnes de bananes jaunes avec neuf producteurs. Les adhérents à la coopérative sont déclarés et reconnus à l'ODEADOM. Ils nous ont remis leur déclaration de sol, ils sont contrôlés et l'on connaît leurs pratiques culturales. Ce sont également des personnes qui respectent notre cahier des charges. Notre coopérative est la seule, à part celle des Cannaries, à avoir un label région ultra-périphérique pour 12 produits locaux, dont la banane jaune.

Bruno Rengassamy

Juste à côté, une autre coopérative, Vergers jardins tropicaux, reçoit aussi des bananes plantains. Les quantités sont moindres, environ 4 à 5 tonnes par mois, en fonction des arrivages. 

Nous sommes principalement producteurs de fruits avec les goyaves, les prunes de cythère... Nous avons quelques agriculteurs qui sont producteurs de bananes. Nous devons avoir 5 producteurs de bananes plantains. Ils sont tenus à un cahier des charges ainsi que d'un carnet de production et sont suivis par une technicienne qui les accompagne pour respecter la traçabilité. Quand vous êtes dans une coopérative, il y a des obligations et toute la différence est là. Nous sommes regroupés et nous avons un suivi permanent de nos productions. Nous savons qui fait quoi et où, c'est très bien organisé.

Emile Rosalie, président Vergers jardins tropicaux, organisation de producteur de Martinique

Ces deux coopératives vendent leurs produits en gros ou au détail à des grandes et moyennes surfaces, de petites enseignes ainsi qu'à des marchandes. 

Depuis les révélations sur l'usage frauduleux de l'éthéphon sur les bananes plantains, les coopératives regrettent cette mauvaise publicité. Ses dirigeants tentent de rassurer les consommateurs, même si la plupart confirment que certaines personnes peu scrupuleuses utilisent ce produit depuis de nombreuses années.