Mobilisation contre la vie chère en Martinique : les négociations se poursuivent, les désaccords demeurent

Table ronde sur la vie chère à la CTM (26 septembre 2024).
Le "protocole d’objectifs et de moyens de lutte contre la vie chère" établi par l’exécutif de la CTM à l’issue de la première table ronde entre ses murs, le 26 septembre dernier, a été discuté hier (27 septembre) par les parties prenantes de ces réunions. Et pour le moment l’heure n’est pas au consensus. Sur ce sujet comme sur d’autres.

Quatre grands axes de travail sont définis dans ce protocole : agir en faveur de la baisse des prix, la constitution d’un fonds de compensation, le renforcement de la transparence et l’autonomie alimentaire.

Le président du Conseil exécutif de la CTM, Serge Letchimy, a notamment rappelé que sa proposition de supprimer les taux d’octroi de mer sur 54 familles de produits sera examinée la semaine prochaine, en séance plénière de l’Assemblée de Martinique. Un consensus voire un engagement des parties en présence dans ces tables rondes, qui renforcerait assurément l’exécutif dans sa volonté de suppression. Dossier à suivre.

Un protocole en quête de consensus

Pour Patrick Fabre, le président du Groupe CréO, ce protocole défini par la CTM entraîne nécessairement une nouvelle étape.

Ce protocole précise les obligations de chacun. Donc chacun va les estimer et les calculer. Nous avançons pour présenter quelque chose à la prochaine plénière de la CTM. Et M. le préfet doit partir (à Paris, ndlr) pour obtenir avec le nouveau gouvernement les conditions dont on a besoin.

Patrick Fabre

interrogé par Alain Livori

Aude Goussard, la secrétaire du RPPRAC (Rassemblement pour la Protection des Peuples et des Ressources Afro Caribéens), reconnaît une "volonté de la CTM d’apporter des solutions concrètes dans un laps de temps court, pour ne pas laisser pourrir la situation".

Pour autant la secrétaire du RPPRAC demeure mesurée quant au contenu de ce protocole.

Ce sont des mesures sur lesquelles le RPPRAC n’est pas spécifiquement d’accord mais ça reste un document de base, que nous prendrons le temps d’analyser avec nos experts et nos juristes pour revenir le 7 octobre vers des précisions que nous souhaitons apporter à ce document.

Aude Goussard

interrogée par Alain Livori

La manifestation contre la vie chère devant le Grand Port de Fort-de-France le 1er septembre 2024.

Aude Goussard indique par ailleurs sa position sur une composante majeure de ces tables rondes. Et souligne que la mobilisation va perdurer.

Nous notons que la grande distribution ne souhaite pas perdre un kopeck et compte beaucoup sur l’Etat et la CTM pour réduire la TVA et la taxe d’octroi de mer. Mais lorsque tout le monde consent à un effort, la grande distribution cherche un effort qui soit tout de suite compensé. En tout cas la lutte n’est pas terminée, la pression doit continuer à s’exercer.

Patrick Fabre continue, lui, d’afficher la volonté de son groupe d’œuvrer à une baisse des prix dans l’alimentaire.

Je ne peux pas parler pour mes concurrents, mais dans mon entreprise nous souhaitons contribuer totalement à la baisse des prix. On veut savoir la liste exacte pour connaître l’incidence de cette liste, en termes économiques, sur les efforts de marges que nous allons réaliser. Et on confirmera de façon précise, je pense enseigne par enseigne, les efforts de chacun.

Émission spéciale vie chère en Martinique.

Ce dispositif de suppression des taux d’octroi de mer et d’octroi de mer régional sur "plus de 5900 articles de première nécessité" est présenté par la CTM comme "expérimental" et "prévu sur une durée de 36 mois". Des données qui déplaisent à Rodrigue Petitot, le président du RPPRAC.

Pourquoi sur trois ans après quinze ans d’attente ? Et j’ai un problème avec le mot expérimentation. Les dirigeants qui sont là pour le moment sont peut-être de bonne foi, mais il suffit qu’on ait quelqu’un, demain, qui ne soit pas de bonne foi et l’expérimentation finit après les trois ans.

Rodrigue Petitot

interrogé par Alain Livori

Un leader du RPPRAC qui veut aussi avoir des garanties, en termes de pérennité, sur ce qui pourrait être validé durant ces tables rondes.

Quand on me parle d’adaptation je suis un peu plus favorable parce que c’est quelque chose qu’on va adapter, donc qui est sûr. Pas quelque chose pour lequel à l’issue d’un certain temps on dira : bon finalement ça ne fonctionne pas, donc on arrête.

Une divergence sur l'expérimentation qui renvoie à d’autres désaccords, bien tranchés. Pour le RPPRAC en effet, ce n’est pas une cinquantaine de familles de produits qu’il faut inclure dans les travaux mais la "totalité de l’alimentaire importé". Et pour le collectif il n’est toujours pas question que les prix des produits importés baissent, au détriment de la production locale.

L’horizon d’un consensus le plus large possible n’est donc pas encore dégagé. De nouvelles réunions, dites techniques, devraient se dérouler à partir de lundi prochain.