Pour ne plus oublier la tuerie du Carbet, énième grève meurtrière en Martinique

Un hommage a été rendu devant la stèle érigée au Carbet.
Une nouvelle cérémonie en hommage aux trois ouvriers agricoles tués lors de la grève de mars 1948 au Carbet s’est tenue ce samedi 9 mars. Manière de ne plus oublier cette énième grève meurtrière longtemps passée sous silence.

La tuerie du Carbet, comme est appelée la grève des ouvriers de l’Habitation Lajus a été remémorée une nouvelle fois. Ce rendez-vous a été souhaité par les descendants des familles des victimes et par les élus de la ville. Un rassemblement autour de la stèle érigée en leur mémoire au quartier Lajus s’est tenu dans la dignité.

Une stèle avait été érigé en mars 2022 au quartier Lajus au Carbet.

Le maire, Jean-Claude Ecanvil, a prononcé le discours qu’il avait déclamé à l’occasion de la création de cet hommage en mars 2022. La petite foule rassemblée autour des enfants et petits-enfants d’André Jacques, Henri Jacques et Mathurin Dalin a pu, l’espace du recueillement, se souvenir de ce moment tragique.

En l’occurrence, l’embuscade tendue par les gendarmes appelés lors d’une grève des ouvriers travaillant sur l’exploitation cannière la plus importante du Nord-Caraïbe. Exigeant une augmentation de salaire, ils sont en grève depuis quatre jours. Finalement, le propriétaire, le béké Jacques Bally, fait remettre leur paie aux ouvriers.

Un événement longtemps occulté

Leur dû perçu, ils repartent, sereins, vers le bourg. Brusquement, des gendarmes leur barrent la route. Ils tirent sans avertissement sur les ouvriers. Trois d’entre eux sont touchés à mort : André Jacques et son frère Henri, et Mathurin Dalin. D’autres sont blessés.

Durant de longues décennies, le mutisme a été de rigueur dans le quartier et dans tout Carbet. Il a fallu l’opiniâtreté d’une militante culturelle bien connue de la ville pour que cet épisode ressurgisse. En outre, l’historienne Muriel Descas-Ravoteur a effectué des recherches déterminantes pour révéler la vérité.

Des descendants des victimes ont fait le déplacement.

André Jacques fils, à son retour de France où il a passé sa vie professionnelle a œuvré avec ses proches pour raviver le souvenir de la mort tragique de son père, qu’il n’a pas connu, de son oncle et de leur camarade de travail.

À l’issue du recueillement de ce samedi, deux militants du parti Péyi’a ont interprété une chanson. Elle retrace la tuerie du Carbet sur un rythme de bèlè en empruntant l’air de « Misié Michel a lé ba-y dé fran ». Référence à une autre grève agricole meurtrière, celle du François en 1900.