Venu à pied depuis la Maison des Syndicats, c'est entouré de partisans que Rodrigue Petitot a pénétré ce jeudi matin (27 février) dans l’enceinte de la cour d’appel. Parmi ses soutiens les autres figures du RPPRAC, à savoir Gwladys Roger, Aude Goussard et Mario Briand.
Juché sur une borne de béton, celui qui est surnommé "Le R" a scandé le mot wouj avant d'entrer dans le bâtiment. Un slogan qui a alors été repris en chœur par ses partisans retenus derrière des barrières Vauban.
Aux côtés de Georges-Emmanuel Germany et d’Eddy Arneton, Max Bellemare assure la défense de Rodrigue Petitot. L’avocat s’explique sur les raisons de cet appel interjeté par ses confrères et son client. Pour la robe noire, c'est une liberté fondamentale qui est attaquée par la partie adverse.
Nous avons estimé que condamner M. Petitot, même à dix mois aménageables avec détention à domicile sous bracelet électronique, était une peine particulièrement sévère parce qu’il a employé le mot "attaquer". D’ailleurs M. Petitot l’a dit avant même d’être mis en garde à vue : il a précisé qu’il n’a jamais été dans son intention de dire qu’on va attaquer physiquement les mairies, qu’on va les prendre d’assaut à la kalashnikov. Il y a des subtilités de langage chez nous. Donc il est très important qu’il y ait un interprète, qu’il y ait la possibilité d’expliquer ces subtilités. Nous estimons la sanction trop sévère, car il s’agit simplement de l’utilisation de la liberté d’expression. Cette liberté est particulièrement protégée dans un système démocratique, parce que c’est la base de la démocratie.
Max Bellemare, avocatau micro d'Alain Livori
Puis l'avocat d’expliquer l’une des volontés de la défense quant à cette audience. Des propos imprégnés d'une détermination manifeste à faire triompher les intérêts de Rodrigue Petitot.
Nous avons fait venir un certain nombre d’élus, de façon à leur demander s’ils ont senti qu’il y avait une menace, si on risquait d’attaquer les mairies au sens d’y mettre le feu ou de s’en prendre physiquement aux élus et personnel municipal. Que notre client soit relaxé est le sens de notre démarche. Et nous allons attaquer fort pour qu’il soit relaxé.
À écouter le leader du RPPRAC, sa condamnation de décembre dernier et la détention qui s’ensuivit, sont synonymes d’une profonde injustice.
Pour des mots sortis d’un contexte, on a réussi à mettre un homme en prison pendant deux mois, on a réussi à le condamner à un bracelet électronique de dix mois. Ils savent que le propos a été sorti de son contexte. On a eu des réactions de différents maires et différents témoins qui sont là, qui attestent avoir compris le sens du propos et ne comprennent pas pourquoi j’ai été en détention. Et on a une Justice qui s’acharne à dire qu’elle a pris la bonne décision. Donc cette Justice nous démontre qu’on a matière à se poser des questions sur sa justesse.
Rodrigue Petitotinterrogé par Alain Livori
Et la figure de proue de la lutte contre la vie chère d’exprimer ses limpides attentes quant à l’issue de ce procès.
À la limite je n’ai même pas besoin d’excuses pour la souffrance que ça a causé, mais j’attends qu’on me relaxe et qu’on m’enlève ce bracelet du pied. Je suis entravé pour quelque chose qui n’a aucun sens.
À l'instar du maire du Gros-Morne Gilbert Couturier, de Jiovanny William et Jean-Philippe Nilor, le député Marcellin Nadeau fait partie des élus cités en tant que témoins par la défense. Et le parlementaire semble savoir pourquoi.
Je suppose que la défense ne nous a pas demandé de témoigner de manière anodine. Je pense qu’elle connaît notre engagement sur la question des libertés fondamentales, des droits fondamentaux et notamment de la liberté d’expression. C’est avec fierté que je viens témoigner, pour dire que nous ne comprenons pas cette instrumentalisation de la Justice.
Marcellin Nadeaurépondant à Alain Livori
Un procès en appel qui a été marqué par la demande de renvoi faite par la défense, qui souhaitait la récusation d’une partie des magistrats composant le tribunal. Eddy Arneton a expliqué les motivations de cette volonté.
Dans la composition de la cour aujourd’hui, il y a deux magistrats qui ont pris la décision de placer en détention M. Petitot. Puisque c’est cette composition qui avait infirmé son placement sous contrôle judiciaire. En toute logique ces magistrats ne peuvent pas, à notre sens, trancher le dossier d’aujourd’hui puisqu’ils ont déjà donné leur position. Nous demandons la récusation de ces magistrats, mais aussi que l’affaire soit renvoyée pour qu’elle soit étudiée par des magistrats qui selon nous seraient véritablement impartiaux. Si les magistrats qui ont décidé d’incarcérer M. Petitot viennent aujourd’hui trancher cette affaire, alors qu’ils ont fait fi des arguments que nous avions soulevés et ont déjà dit qu’elles étaient leurs positions sur le mot attaquer, ces magistrats ne peuvent pas trancher sérieusement.
Eddy Arnetonau micro d'Alain Livori
Cette demande de renvoi a été rejetée par le tribunal.
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