Cette sombre histoire se déroulait à la maison. Au début de son adolescence, Muriella Rivierez a subi des viols répétés.
Ça se passe au domicile familial et l’auteur est l’ex-mari de ma mère. Ça se passe aussi dans un contexte familial. Je l’ai compris par la suite. Je suis enfant unique, avec une mère très autoritaire et égocentrique. Elle ne comprend pas pourquoi elle m’a éduqué de manière aussi dure. Mais, je pense aussi à sa décharge qu’elle m’a eue à 18 ans et elle ne voulait pas que je reproduise les mêmes erreurs. Ça ne m’a pas empêché d’avoir mon Bac. Ma mère, étant très exigeante, voulait que je fasse des études supérieures. Ma stratégie a été de faire exactement ce qu’il n’y a pas en Martinique. Et de partir.
Murielleinterrogée par Irène Emonides et Patrice Chateau-Dégat
Muriella réalise des études de psychologie. Mais, à 20 ans, rien ne va plus. Elle fait un premier épisode dépressif. À 26 ans, mariée et avec un enfant, elle fait un deuxième épisode dépressif. C’est alors qu’elle comprend qu’elle doit se faire accompagner.
À la naissance de ma deuxième fille, j’avais 28 ans et là, je pense que j’étais mal. Je le lui raconte. Elle me demande pourquoi c’est maintenant que je le lui dis. En me répondant cela, ma mère m’a presque tuée. Heureusement que je sais écrire. J’ai pris ma feuille, mon stylo et j’ai écrit au procureur de la République. Les viols étaient répétitifs et dans ma chambre. Puis, il y a eu la menace. Cet homme avait un fusil à la maison. Il m’a dit qu’il ne faut pas que je parle.
Muriella Rivierez milite aujourd’hui pour faire reculer les violences sexuelles faites aux enfants et aux adolescents, filles comme garçons.
Aujourd’hui, j’ai bientôt 57 ans. Se réparer est un processus. C’est un parcours. On est résilient mais, on est quand même porteur d’un traumatisme psychologique. Le groupe de parole aussi a été vraiment un marchepied, quelque chose de propulseur.
Dans 30% des cas, l'agresseur est un membre de la famille
Selon les chiffres, en Martinique, dans 30% des cas l'agresseur est un membre de la famille et 14% des violences sexuées sont faites par un oncle.
Ce sont des chiffres assez proches de ce que l’on a un peu partout dans l’Hexagone. (...) On a oublié de dire que le principal danger, malheureusement, se situe au sein de la famille. Ou ça peut être un proche. C’est important de le rappeler. Un instituteur, un coach sportif, un prêtre… Un adulte de confiance à qui on donnerait le bon Dieu sans confession.
Arnaud Gallais, Co-Fondateur De Mouv'enfants et ancien membre de la Ciivise
Certains comportements peuvent permettre d’identifier les victimes de violences sexuelles.
Il peut y avoir des baisses de résultats scolaires ou des difficultés à l’endormissement. Différentes choses doivent éveiller en nous un questionnement. Les parents sont quasiment tous démunis. L'État, dans un État-providence, doit agir pour transmettre aux parents les questions à poser à son enfant, y compris au médecin ou enseignants. Il faut qu’on soit en capacité de dépister et donc de protéger. Il faut absolument agir au plus tôt pour limiter tous ces impacts qu’il y a sur la santé.
Pour rappel, les violences sexuelles faites aux enfants sont "sexuées". Selon les chiffres, 80% des mineurs, victimes de violences sexuelles sont des filles et 20% des garçons. 97% des agresseurs sont des hommes.