Au Conseil départemental de Mayotte, à Mamoudzou, ce sont cette fois-ci les doléances des élus et des responsables consulaires mahorais, sans compter les repésentants du monde économique, que le président Emmanuel Macron a longuement écouté.
"C'est une zone de guerre, c'est comme si une bombe atomique avait frappé Mayotte. C'est pour cela qu'il faut un plan marshall !", a lancé Carla Baltus, la présidente du Medef mahorais, pour faire prendre conscience, une nouvelle fois, de l'urgence de la situation et l'ampleur des dégâts. "Nous les chefs d’entreprise avons envie de sauver notre île".
Regardez le début de l'intervention d'Emmanuel Macron à la réunion de crise :
Eviter que Mayotte "ne devienne le plus grand cimetière de France "
"Comme la quasi totalité des habitants, je n’ai plus accès à l’eau, ni à l’électricité, et je dors à l’hôtel de ville", a confié pour sa part Ambdilwahedou Soumaila, le maire de Mamoudzou. Le bilan humain ne cesse de s’alourdir et ce drame n'est malheureusement pas une surprise. Depuis des années, nous alertons sur la dangerosité des bidonvilles (...). La double peine serait de les laisser se reconstruire".
Le sujet, toujours aussi polémique, a toujours été la source de tensions dans l'île aux Parfums. En début d'année, Mayotte était bloquée par des barrages montés par des manifestants se plaignant de l'insécurité et de cette problématique migratoire.
"Nous devons interdire la reconstruction des bidonvilles", a ainsi lancé l'élu du chef-lieu sous les applaudissements de l'auditoire du Conseil départemental. "Un cadre législatif spécifique à Mayotte doit être adopté. Des décisions difficiles sont nécessaires pour garantir que Mayotte ne devienne pas le plus grand cimetière de France même si nous craignons que ce soit déjà le cas".
Une filière agricole dévastée
"Nos entreprises et nos exploitations sont toutes touchées, certaines rasées", a pour sa part rappelé Sophie Dupy, une représentante du secteur agroalimentaire qui demande une évaluation rapide des dégâts.
La filière végétale a subi 100% de dégâts. Les professionnels du cacao, la filière emblématique de l’île, ont eux aussi tout perdu. "Il n’y a plus rien et il faudra 5 à 6 ans pour repartir. C'est pareil pour de nombreux autres secteurs".
"Pas des mendiants"
Tous répètent que les Mahorais ne sont "pas des mendiants" et ne veulent pas d’un processus d’indemnisation qui n’en finirait pas. Les agriculteurs se demandent avec quels outils ils vont produire. "On ne va pas manger des cailloux ! C’est ça l’urgence : reconstruire les bâtiments et les serres pour produire".
L'urgence et l'importance de distribuer des vivres et de l'eau à la population ont à nouveau été rappelées par tous les interlocuteurs, alors que l'état de calamité naturelle exceptionnelle a été déclaré ce jeudi 19 décembre.
Emmanuel Macron : "La France a été touchée par un cyclone d'une violence inédite"
"Ne perdez pas d’énergie à parler au conditionnel passé, parlez au présent et au futur", a répondu Emmanuel Macron face à ce douloureux état des lieux et au mécontetement des élus, s'agissant des lacunes de l'action de l'Etat rendue d'autant plus compliquée que le casse-tête démographique mahorais.
"La France a été touchée par un cyclone d'une violence inédite", a-t-il encore ajouté pour mettre en relief l'ampleur du phénomène et la difficile gestion de cette crise. "Mayotte et la France entière sont bousculées par cette situation qui vient s’ajouter à des crises multiples. Je suis très touché par la résilience et l’engagement que je vois chez chacun : les soignants , les pompiers, les élus".
"On a trois temps : l'urgence, la stabilisation et la reconstruction"
"Pour moi, on a trois temps : l'urgence, la stabilisation et la reconstruction", a-t-il ajouté. "L'urgence c’est ce qu’on vit depuis six jours : la question de l’eau potable et de l'alimentation".
Le président a rappelé que les sinistrés assurés seraient accompagnés grâce à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, qui bénéficiera aussi aux entreprises et aux agriculteurs, sans compter l'activation d'un fond d'indemnisation pour ceux qui ne sont pas couverts.
Couvre-feu et 1 200 forces de sécurité
S'agissant de la sécurité, 1 200 forces de sécurité seront déployées. Des "dispositifs de sécurité renforcés" seront également mis en place dans les quartiers exposés aux pillages. Le couvre-feu, de 22h à 4h du matin, pourrait aussi être maintenu. "On a besoin de maintenir l'ordre la nuit et le jour", a ajouté Emmanuel Macron.
Dans le cadre de la phase dite de stabilisation, c'est la question sanitaire qui importe avec le risque de propagation d'épidémies, notamment avec le choléra ou la dengue.
"Je souhaite que dans la reconstruction de Mayotte, on privilégie l'offre économique pour rebâtir"