Mansour KAMARDINE demande ,au ministre de l'Europe et des affaires étrangères, de déposer les instruments de délimitation des espaces maritimes de souveraineté et des espaces maritimes de juridiction concernant le territoire français de Mayotte auprès du secrétariat général des Nations Unies.
Emmanuel TUSEVO : Monsieur le Député Mansour Kamardine, dans le cadre des questions écrites au gouvernement, vous avez posé une question au ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean Yves LE DRIAN, sur la zone économique exclusive ZEE française de Mayotte. Quel est l’intérêt de cette question?
Mais avant de répondre, je pense qu'il serait pertinent de vulgariser, pour le grand public, la signification d'une ZEE, zone économique exclusive.
Mansour KAMARDINE : Vous savez, il y a dans le monde un droit exclusif qu' on appelle le droit international de la mer qui est porté par une convention internationale qu'on appelle la Convention de Montego Bay qui régit l' utilisation de la mer parce que le monde entier, l’ensemble des pays considère que la mer est un bien commun qu’il convient de partager. Donc, il y a ce qu’on appelle la mer territoriale c'est-à-dire une zone qui appartient à chaque pays qui y exerce une souveraineté pleine et entière jusqu’à 22 km des côtes, une zone dite contigüe d’un maximum de 22 km de plus que la mer territoriale sur laquelle s’exerce le pouvoir de police dans les domaines des douanes, des impôts, de la santé et de l’immigration et enfin une zone économique exclusive jusqu’à un maximum de 370 km des côtes sur laquelle l’état possède des droits exclusifs d’exploitation économique des ressources marines et sous-marines.
La convention sur le droit de la mer permet à chaque pays de délimiter sa zone mais en tenant compte du droit des autres états à délimiter ses propres zones.
Il y ensuite la haute mer qui est un espace international. Donc, quand vous voulez emprunter la ZEE, zone économique exclusive, vous êtes obligé de demander l’autorisation du pays propriétaire de la zone et en revanche, si vous passez sur la haute mer c’est à dire au-delà de la ZEE, vous êtes sur la mer internationale, en ce moment-là, vous n’avez pas besoin de demander des autorisations. Et donc, la question de la délimitation de la ZEE est d’abord et avant tout, une question de délimitation de souveraineté économique et de préservation souveraine de la biodiversité pour chaque pays. D’où l’importance pour chaque pays de délimiter sa ZEE.
Je veux que la France affirme partout dans le monde que Mayotte est française. Je veux que la France et l’Europe puissent affirmer, partout dans le monde que les Mahorais ont fait un libre choix de demeurer français.
Emmanuel TUSEVO : Mais alors, qu’est-ce qui vous préoccupe pour en arriver à attirer l’attention du gouvernement sur ce problème ?
Mansour KAMARDINE : Vous aurez peut-être remarqué que,depuis deux ans, j’ai inscrit mon action dans la reconnaissance de la francité de Mayotte.Je souhaite, d’ici la fin de mon mandat , que partout dans le monde, il n’y ait plus de doute quant à l’appartenance de Mayotte à la France et à l’Europe puisqu’aujourd’hui, Mayotte est aussi un territoire européen.
Vous voyez bien que c’est une question majeure puisqu’encore une fois, les questions de souveraineté, ce sont des questions majeures. Pendant très longtemps, la France avait honte d’affirmer à l’international que Mayotte est française.
Depuis 2011, nous sommes devenus département, depuis 2014, nous sommes devenus une région ultrapériphérique de l’Europe, par conséquent, la France ne peut plus cacher l’appartenance de Mayotte à la république française. Maintenant vient le moment de la revendiquer et de l’affirmer.
Je veux que la France affirme partout dans le monde que Mayotte est française. Je veux que la France et l’Europe puissent affirmer, partout dans le monde que les Mahorais ont fait un libre choix de demeurer français. D’où cette question de délimitation qui permet de fixer les frontières entre Mayotte la française et l’Union des Comores. Nous avons une limite des eaux en partage entre l’Union des Comores et la France à Mayotte.
Emmanuel TUSEVO : Justement, vous dîtes à ce propos, dans votre question écrite, que l’ Union des Comores a défini, en droit interne comorien, je répète bien en droit interne comorien, les lignes de base archipélagique, les limites extérieures de la mer territoriale et la ZEE de l’ Union des Comores en se basant sur l’ article 6 d’une loi de la république islamique des Comores du 6 Mai 1082 en droit interne comorien aux délimitations maritimes de leur territoire prétendu.
Pour nous qui ne sommes pas spécialistes de ces notions des relations internationales, j’ai envie de vous demander ceci : que les Comoriens fassent leur sauce en droit interne comorien comme vous le répétez à deux reprises, en quoi ça concerne Mayotte et les Mahorais ?
Mansour KAMARDINE : Que les Comoriens délimitent leur ZEE, il n’y a rien de plus normal. Ce qui pose problème, c’est lorsque les Comores en délimitant leur ZEE ont intégré la ZEE de Mayotte. Et là, ça pose problème. Les Comores ne peuvent pas, en délimitant leur ZEE, intégrer la ZEE de Mayotte puisque c’est une zone française !
Le droit de la mer permet à chaque état de délimiter de manière unilatérale sa ZEE. Ensuite, une fois que vous avez délimité, vous devez déposer les instruments de délimitation auprès du secrétaire général de l’ONU pour les rendre publics et pour permettre de les rendre opposables aux tiers.
Il appartient aux pays tiers de s’assurer que ces délimitations n’englobent pas ou n’interfèrent pas dans leur propre zone économique exclusive.
Il se trouve que, dans le cas présent, les Comores ont délimité leur ZEE mais ils ont englobé également la ZEE française à Mayotte et là, ce n’est pas bien.
Donc, la France s’y est opposée et ce faisant, à partir du moment où la France s’est opposée, la délimitation des Comores n’est pas valable. Il faudra trancher ce contentieux. Je souhaite, à travers les questions que j’ai posées, que nous allions plus loin en déposant à l’ONU les instruments de délimitation de la ZEE de Mayotte.
Emmanuel TUSEVO : D’ailleurs, c’est ce qui vous fait dire que les Comoriens ont délimité l’espace maritime de leur territoire prétendu. Pourquoi pour vous, c’est un territoire prétendu ?
Mansour KAMARDINE : Les Comores prétendent que Mayotte appartient au territoire comorien . C' est faux. Mayotte est française. Donc, il faut qu’ils délimitent leur territoire notamment en excluant Mayotte puisque Mayotte appartient au territoire européen.
Emmanuel TUSEVO : Mais alors, par rapport à l’ histoire lointaine et présente, certains peuvent s’étonner et se dire pourquoi Mansour KAMARDINE se réfère aux Nations Unies alors qu’ on sait que depuis la nuit des temps, les Nations Unies et l’ Union africaine jadis appelée OUA ont toujours condamné ce qu’ ils considèrent l’usurpation de Mayotte par la France.
Alors comment expliquer que vous vous référiez à « un juge » les Nations Unies qui vous ont condamné d’avance ?
Mansour KAMARDINE : Il y a des outils qui sont mis à disposition de l’ensemble des pays notamment l’instrument de délimitation et de ratification des ZEE ; nous utilisons cet outil. Ensuite, vous posez la question de la légitimité de la revendication des Comores sur Mayotte. Je crois que, de plus en plus, nous avons des voix qui s’élèvent pour : - premièrement, souligner que lorsque la France a décidé en 1946 de créer, ex- nihilo, des territoires des Comores, aucune population n’a été consultée. - deuxièmement, lorsque les populations comoriennes ont été consultées, la population mahoraise a clairement exprimé son refus de partir à l’indépendance et sa volonté de demeurer française. Ca s’appelle, en droit international onusien,
le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes qui est un principe fondateur du droit international inscrit dans la charte de l’ONU et non une disposition secondaire sur laquelle s’appuie les Comores pour justifier la revendication sur Mayotte.
Jusqu’ici, la France n’a pas utilisé tous les atouts, tous les éléments juridiques et politiques qui étaient mis à sa disposition. Je pense que le moment est venu que nous les utilisions.
A titre d’exemple, lorsque, en novembre 1975, les Comores ont été admises à l’ONU, la France n’a pas utilisé son veto. En revanche, lorsque
le 6 janvier 1976 une résolution était portée devant le Conseil de sécurité pour que La France quitte Mayotte, La France a opposé son veto. Et ce veto de la France prévaut sur les résolutions notamment de l’Assemblée générale de l’ONU condamnant la présence de la France à Mayotte.
Les résolutions de l’Assemblée générale, ce sont des vœux alors que le veto de la France, c’est une décision claire. Aujourd’hui, la France est à Mayotte par la seule volonté des populations de Mayotte.
Emmanuel TUSEVO : Vous souhaitez que le gouvernement français dépose les instruments de délimitation des espaces maritimes de souveraineté et des espaces maritimes de juridiction concernant le territoire français de Mayotte auprès du secrétariat général des Nations Unies et qu’il indique sous quel délai il entend effectuer ce dépôt.
Et alors, qu’est ce que le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Yves Le Drian , vous a répondu ?
Mansour Kamardine : La question a été posée le 10 septembre 2019. Le gouvernement a deux mois pour répondre aux députés. A l’issue de cette période de deux mois, s’il n’ y a pas de réponse, je déclencherai une procédure de signalement du retard dans la réponse. Le président de mon groupe parlementaire alertera le président de l’Assemblée nationale qui rappellera au gouvernement son devoir de réponse.
En ce moment là, il y a une démarche qui est effectuée auprès du gouvernement pour obtenir la réponse à cette question et donc, qui interviendrait d’ici au maximum trois mois. A priori, on devrait pouvoir être informé des démarches éventuelles et de la suite que le gouvernement souhaite donner à cette question d’ici le 30 décembre 2019.
" Il est temps pour La France d' assumer Mayotte française sur la scène internationale et de régler le différend territorial..."
Emmanuel TUSEVO : Je ne sais pas ou je ne me souviens pas si, vous, le député Mansour KAMARDINE, vous étiez aux affaires politiques de Mayotte au moment où les Comores faisaient ces manœuvres à l’ONU.
Comment pouvez-vous expliquer que vous et les autres élus mahorais, vous ayez attendu depuis tant d’années, donc depuis 2010 et que vous ne réagissiez que maintenant en 2019 ?
Mansour KAMARDINE : D’abord, à titre personnel, en 2010, je n’étais plus en responsabilité. Cela s’est passé 2 ans après la fin de tous les mandats que j’avais. Deuxièment, je ne suis pas sûr que les questions se posent comme ça en disant : " vous étiez là, vous n’aviez rien fait." Ce qui a pu être valable il y a 20 ans ne l’est plus aujourd’hui puisque le monde bouge, le monde évolue.
L’important est que lorsque les sujets sont posés, qu’ils soient traités. Moi je n’irai pas chercher la responsabilité d’un tel ou un tel autre parce qu’en république, nous avons un grand principe de droit qui doit s’appliquer en toutes circonstances notamment qui doit s’appliquer à l’administration, c’est ce qu’on appelle le principe de continuité.
Ce principe de continuité fait que ce qui n’a pas été fait hier se fait aujourd’hui. Et puis en démocratie, pourquoi on fait des élections et pourquoi on change de majorité? On fait des élections pour s’assurer d’ abord que les orientations prises sont dans la bonne direction. Et si elles ne sont pas dans la bonne direction, on change de majorité.
Et donc on ne peut pas dire à tel ou tel responsable : " vous étiez là et vous n’avez rien fait il y a 20 ans ou il y a 10 ans." On change de majorité pour que les problèmes qui restent en suspens puissent être réglés.
Mais indépendamment de cet aspect là, les choses ont été faites parce que la délimitation a été effectuée courant 2010 et en décembre 2011 le gouvernement français a formé une opposition formelle devant le secrétariat général de l’ONU. Aussi le problème a été posé par le gouvernement de l’époque.
Pour ma part je considère que ce qui a été fait est bien mais que désormais,ce n’est pas suffisant, qu’il faut encore aller plus loin.
La France avait délimité dès 1978 la mer territoriale autour de Mayotte, ensuite elle avait délimité la ZEE en tenant compte des lignes de division et de partage des eaux entre les Comores et Mayotte. Il convient donc maintenant que la France dépose ses instruments de délimitation également à l’ ONU, comme cela nous aurons deux instruments de délimitation, l’ instrument de délimitation des Comores et l’instrument de délimitation de la France ainsi que l’opposition faite par la France contre la délimitation faite par les Comores. Le problème sera ainsi posé au vu et au su de tout le monde.
Moi, je ne veux plus que l’on cache Mayotte. Mayotte a la fierté d’être française et la France doit être fière de ce que Mayotte lui appartient. Il est temps de l’assumer sur la scène internationale et de régler le différend territorial.
Emmanuel TUSEVO : Y a-t-il d’autres aspects autour de ces problèmes de relations internationales et de droit de la mer que vous estimez important de mettre en exergue ?
Mansour KAMARDINE : Il y a, sans doute, la question de droit de pêche qui est dans l’actualité aujourd’hui, de l’octroi de droit de pêche justement sur la ZEE de Mayotte. On est en plein dedans.
A LIRE LA SUITE DANS LE PROCHAIN ARTICLE :
Le député Mansour KAMARDINE interpelle le gouvernement français sur un nouvel accord de pêche envisagé entre l’Union européenne et les Seychelles.
POUR EN SAVOIR PLUS :
Convention de Montego Bay et droit de la mer
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/montego-bay
Droit de la mer — Wikipédia
fr.wikipedia.org/wiki/Droit_de_la_mer
La convention de Montego Bay (1982) À la suite de la remise en cause par les pays en voie de développement de certaines des règles fixées par les textes adoptés à Genève, la troisième conférence sur le droit de la mer est convoquée par l ’ONU. Celle-ci siège de ...
https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_de_la_mer
Mais avant de répondre, je pense qu'il serait pertinent de vulgariser, pour le grand public, la signification d'une ZEE, zone économique exclusive.
Mansour KAMARDINE : Vous savez, il y a dans le monde un droit exclusif qu' on appelle le droit international de la mer qui est porté par une convention internationale qu'on appelle la Convention de Montego Bay qui régit l' utilisation de la mer parce que le monde entier, l’ensemble des pays considère que la mer est un bien commun qu’il convient de partager. Donc, il y a ce qu’on appelle la mer territoriale c'est-à-dire une zone qui appartient à chaque pays qui y exerce une souveraineté pleine et entière jusqu’à 22 km des côtes, une zone dite contigüe d’un maximum de 22 km de plus que la mer territoriale sur laquelle s’exerce le pouvoir de police dans les domaines des douanes, des impôts, de la santé et de l’immigration et enfin une zone économique exclusive jusqu’à un maximum de 370 km des côtes sur laquelle l’état possède des droits exclusifs d’exploitation économique des ressources marines et sous-marines.
La convention sur le droit de la mer permet à chaque pays de délimiter sa zone mais en tenant compte du droit des autres états à délimiter ses propres zones.
Il y ensuite la haute mer qui est un espace international. Donc, quand vous voulez emprunter la ZEE, zone économique exclusive, vous êtes obligé de demander l’autorisation du pays propriétaire de la zone et en revanche, si vous passez sur la haute mer c’est à dire au-delà de la ZEE, vous êtes sur la mer internationale, en ce moment-là, vous n’avez pas besoin de demander des autorisations. Et donc, la question de la délimitation de la ZEE est d’abord et avant tout, une question de délimitation de souveraineté économique et de préservation souveraine de la biodiversité pour chaque pays. D’où l’importance pour chaque pays de délimiter sa ZEE.
Je veux que la France affirme partout dans le monde que Mayotte est française. Je veux que la France et l’Europe puissent affirmer, partout dans le monde que les Mahorais ont fait un libre choix de demeurer français.
Emmanuel TUSEVO : Mais alors, qu’est-ce qui vous préoccupe pour en arriver à attirer l’attention du gouvernement sur ce problème ?
Mansour KAMARDINE : Vous aurez peut-être remarqué que,depuis deux ans, j’ai inscrit mon action dans la reconnaissance de la francité de Mayotte.Je souhaite, d’ici la fin de mon mandat , que partout dans le monde, il n’y ait plus de doute quant à l’appartenance de Mayotte à la France et à l’Europe puisqu’aujourd’hui, Mayotte est aussi un territoire européen.
Vous voyez bien que c’est une question majeure puisqu’encore une fois, les questions de souveraineté, ce sont des questions majeures. Pendant très longtemps, la France avait honte d’affirmer à l’international que Mayotte est française.
Depuis 2011, nous sommes devenus département, depuis 2014, nous sommes devenus une région ultrapériphérique de l’Europe, par conséquent, la France ne peut plus cacher l’appartenance de Mayotte à la république française. Maintenant vient le moment de la revendiquer et de l’affirmer.
Je veux que la France affirme partout dans le monde que Mayotte est française. Je veux que la France et l’Europe puissent affirmer, partout dans le monde que les Mahorais ont fait un libre choix de demeurer français. D’où cette question de délimitation qui permet de fixer les frontières entre Mayotte la française et l’Union des Comores. Nous avons une limite des eaux en partage entre l’Union des Comores et la France à Mayotte.
Emmanuel TUSEVO : Justement, vous dîtes à ce propos, dans votre question écrite, que l’ Union des Comores a défini, en droit interne comorien, je répète bien en droit interne comorien, les lignes de base archipélagique, les limites extérieures de la mer territoriale et la ZEE de l’ Union des Comores en se basant sur l’ article 6 d’une loi de la république islamique des Comores du 6 Mai 1082 en droit interne comorien aux délimitations maritimes de leur territoire prétendu.
Pour nous qui ne sommes pas spécialistes de ces notions des relations internationales, j’ai envie de vous demander ceci : que les Comoriens fassent leur sauce en droit interne comorien comme vous le répétez à deux reprises, en quoi ça concerne Mayotte et les Mahorais ?
Mansour KAMARDINE : Que les Comoriens délimitent leur ZEE, il n’y a rien de plus normal. Ce qui pose problème, c’est lorsque les Comores en délimitant leur ZEE ont intégré la ZEE de Mayotte. Et là, ça pose problème. Les Comores ne peuvent pas, en délimitant leur ZEE, intégrer la ZEE de Mayotte puisque c’est une zone française !
Le droit de la mer permet à chaque état de délimiter de manière unilatérale sa ZEE. Ensuite, une fois que vous avez délimité, vous devez déposer les instruments de délimitation auprès du secrétaire général de l’ONU pour les rendre publics et pour permettre de les rendre opposables aux tiers.
Il appartient aux pays tiers de s’assurer que ces délimitations n’englobent pas ou n’interfèrent pas dans leur propre zone économique exclusive.
Il se trouve que, dans le cas présent, les Comores ont délimité leur ZEE mais ils ont englobé également la ZEE française à Mayotte et là, ce n’est pas bien.
Donc, la France s’y est opposée et ce faisant, à partir du moment où la France s’est opposée, la délimitation des Comores n’est pas valable. Il faudra trancher ce contentieux. Je souhaite, à travers les questions que j’ai posées, que nous allions plus loin en déposant à l’ONU les instruments de délimitation de la ZEE de Mayotte.
Emmanuel TUSEVO : D’ailleurs, c’est ce qui vous fait dire que les Comoriens ont délimité l’espace maritime de leur territoire prétendu. Pourquoi pour vous, c’est un territoire prétendu ?
Mansour KAMARDINE : Les Comores prétendent que Mayotte appartient au territoire comorien . C' est faux. Mayotte est française. Donc, il faut qu’ils délimitent leur territoire notamment en excluant Mayotte puisque Mayotte appartient au territoire européen.
Emmanuel TUSEVO : Mais alors, par rapport à l’ histoire lointaine et présente, certains peuvent s’étonner et se dire pourquoi Mansour KAMARDINE se réfère aux Nations Unies alors qu’ on sait que depuis la nuit des temps, les Nations Unies et l’ Union africaine jadis appelée OUA ont toujours condamné ce qu’ ils considèrent l’usurpation de Mayotte par la France.
Alors comment expliquer que vous vous référiez à « un juge » les Nations Unies qui vous ont condamné d’avance ?
Mansour KAMARDINE : Il y a des outils qui sont mis à disposition de l’ensemble des pays notamment l’instrument de délimitation et de ratification des ZEE ; nous utilisons cet outil. Ensuite, vous posez la question de la légitimité de la revendication des Comores sur Mayotte. Je crois que, de plus en plus, nous avons des voix qui s’élèvent pour : - premièrement, souligner que lorsque la France a décidé en 1946 de créer, ex- nihilo, des territoires des Comores, aucune population n’a été consultée. - deuxièmement, lorsque les populations comoriennes ont été consultées, la population mahoraise a clairement exprimé son refus de partir à l’indépendance et sa volonté de demeurer française. Ca s’appelle, en droit international onusien,
le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes qui est un principe fondateur du droit international inscrit dans la charte de l’ONU et non une disposition secondaire sur laquelle s’appuie les Comores pour justifier la revendication sur Mayotte.
Jusqu’ici, la France n’a pas utilisé tous les atouts, tous les éléments juridiques et politiques qui étaient mis à sa disposition. Je pense que le moment est venu que nous les utilisions.
A titre d’exemple, lorsque, en novembre 1975, les Comores ont été admises à l’ONU, la France n’a pas utilisé son veto. En revanche, lorsque
le 6 janvier 1976 une résolution était portée devant le Conseil de sécurité pour que La France quitte Mayotte, La France a opposé son veto. Et ce veto de la France prévaut sur les résolutions notamment de l’Assemblée générale de l’ONU condamnant la présence de la France à Mayotte.
Les résolutions de l’Assemblée générale, ce sont des vœux alors que le veto de la France, c’est une décision claire. Aujourd’hui, la France est à Mayotte par la seule volonté des populations de Mayotte.
Emmanuel TUSEVO : Vous souhaitez que le gouvernement français dépose les instruments de délimitation des espaces maritimes de souveraineté et des espaces maritimes de juridiction concernant le territoire français de Mayotte auprès du secrétariat général des Nations Unies et qu’il indique sous quel délai il entend effectuer ce dépôt.
Et alors, qu’est ce que le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Yves Le Drian , vous a répondu ?
Mansour Kamardine : La question a été posée le 10 septembre 2019. Le gouvernement a deux mois pour répondre aux députés. A l’issue de cette période de deux mois, s’il n’ y a pas de réponse, je déclencherai une procédure de signalement du retard dans la réponse. Le président de mon groupe parlementaire alertera le président de l’Assemblée nationale qui rappellera au gouvernement son devoir de réponse.
En ce moment là, il y a une démarche qui est effectuée auprès du gouvernement pour obtenir la réponse à cette question et donc, qui interviendrait d’ici au maximum trois mois. A priori, on devrait pouvoir être informé des démarches éventuelles et de la suite que le gouvernement souhaite donner à cette question d’ici le 30 décembre 2019.
" Il est temps pour La France d' assumer Mayotte française sur la scène internationale et de régler le différend territorial..."
Emmanuel TUSEVO : Je ne sais pas ou je ne me souviens pas si, vous, le député Mansour KAMARDINE, vous étiez aux affaires politiques de Mayotte au moment où les Comores faisaient ces manœuvres à l’ONU.
Comment pouvez-vous expliquer que vous et les autres élus mahorais, vous ayez attendu depuis tant d’années, donc depuis 2010 et que vous ne réagissiez que maintenant en 2019 ?
Mansour KAMARDINE : D’abord, à titre personnel, en 2010, je n’étais plus en responsabilité. Cela s’est passé 2 ans après la fin de tous les mandats que j’avais. Deuxièment, je ne suis pas sûr que les questions se posent comme ça en disant : " vous étiez là, vous n’aviez rien fait." Ce qui a pu être valable il y a 20 ans ne l’est plus aujourd’hui puisque le monde bouge, le monde évolue.
L’important est que lorsque les sujets sont posés, qu’ils soient traités. Moi je n’irai pas chercher la responsabilité d’un tel ou un tel autre parce qu’en république, nous avons un grand principe de droit qui doit s’appliquer en toutes circonstances notamment qui doit s’appliquer à l’administration, c’est ce qu’on appelle le principe de continuité.
Ce principe de continuité fait que ce qui n’a pas été fait hier se fait aujourd’hui. Et puis en démocratie, pourquoi on fait des élections et pourquoi on change de majorité? On fait des élections pour s’assurer d’ abord que les orientations prises sont dans la bonne direction. Et si elles ne sont pas dans la bonne direction, on change de majorité.
Et donc on ne peut pas dire à tel ou tel responsable : " vous étiez là et vous n’avez rien fait il y a 20 ans ou il y a 10 ans." On change de majorité pour que les problèmes qui restent en suspens puissent être réglés.
Mais indépendamment de cet aspect là, les choses ont été faites parce que la délimitation a été effectuée courant 2010 et en décembre 2011 le gouvernement français a formé une opposition formelle devant le secrétariat général de l’ONU. Aussi le problème a été posé par le gouvernement de l’époque.
Pour ma part je considère que ce qui a été fait est bien mais que désormais,ce n’est pas suffisant, qu’il faut encore aller plus loin.
La France avait délimité dès 1978 la mer territoriale autour de Mayotte, ensuite elle avait délimité la ZEE en tenant compte des lignes de division et de partage des eaux entre les Comores et Mayotte. Il convient donc maintenant que la France dépose ses instruments de délimitation également à l’ ONU, comme cela nous aurons deux instruments de délimitation, l’ instrument de délimitation des Comores et l’instrument de délimitation de la France ainsi que l’opposition faite par la France contre la délimitation faite par les Comores. Le problème sera ainsi posé au vu et au su de tout le monde.
Moi, je ne veux plus que l’on cache Mayotte. Mayotte a la fierté d’être française et la France doit être fière de ce que Mayotte lui appartient. Il est temps de l’assumer sur la scène internationale et de régler le différend territorial.
Emmanuel TUSEVO : Y a-t-il d’autres aspects autour de ces problèmes de relations internationales et de droit de la mer que vous estimez important de mettre en exergue ?
Mansour KAMARDINE : Il y a, sans doute, la question de droit de pêche qui est dans l’actualité aujourd’hui, de l’octroi de droit de pêche justement sur la ZEE de Mayotte. On est en plein dedans.
A LIRE LA SUITE DANS LE PROCHAIN ARTICLE :
Le député Mansour KAMARDINE interpelle le gouvernement français sur un nouvel accord de pêche envisagé entre l’Union européenne et les Seychelles.
POUR EN SAVOIR PLUS :
Convention de Montego Bay et droit de la mer
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/montego-bay
Droit de la mer — Wikipédia
fr.wikipedia.org/wiki/Droit_de_la_mer
La convention de Montego Bay (1982) À la suite de la remise en cause par les pays en voie de développement de certaines des règles fixées par les textes adoptés à Genève, la troisième conférence sur le droit de la mer est convoquée par l ’ONU. Celle-ci siège de ...
https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_de_la_mer