À Petite-Terre, avant de prendre l'avion pour Djibouti à l'issue de ses deux jours de déplacement à Mayotte, le président a accordé un entretien aux équipes de Mayotte la 1ère, à la Case Rocher, en Petite-Terre.
Il a présenté son plan de bataille pour la reconstruction de Mayotte après le passage de Chido. Revue de détails des engagements pris par le chef de l'Etat pour l'île aux Parfums.
Revoir l'intervention du président Emmanuel Macron sur Mayotte La 1ère :
"Le soutien de la nation entière"
"J'étais parmi vous pour vous dire le soutien et l'affection de la nation française tout entière", a d'abord tenu à souligner le président. Mayotte a subi un cyclone sans précédent qui a conduit à une véritable catastrophe humaine dont le bilan n'est pas encore définitif".
"On a identifié 35 défunts mais il y a encore tout un travail pour identifier et aller auprès de la population"
Emmanuel Macron
"C'est également une catastrophe matérielle terrible", a-t-il ajouté en évoqué les grands réseaux tombés : de l'eau à l'électricité, en passant les réseaux de téléphonie. "Et puis beaucoup de nos compatriotes ont perdu leur toit avec des dégâts absolument considérables et des gens qui vivent aujourd'hui dans la très grande précarité".
"Pendant des mois, Mayotte ne vivra pas en situation normale"
Emmanuel Macron parle aussi d'"une catastrophe naturelle et écologique avec des paysages dévastés et une biodiversité qui est menacée", d'où la nécessité d'une réaction "forte et immédiate".
"Je l'ai dit tout au long de mon déplacement : il y a l'urgence qu'on est en train de traiter et il va y avoir la stabilisation parce que pendant des mois, Mayotte ne vivra pas en situation normale".
Pour rebâtir Mayotte, Emmanuel Macron se dit prêt avec son gouvernement à faire face aux défis que Mayotte "connaît et traîne depuis tant d'années" : l'immigration clandestine, l'habitat indigne, les réseaux non sécurisés,... Reste à savoir si cette promesse lourde à tenir sera réellement suivie d'effet un jour, tant le défi est colossal.
Un passage de vitesse pour la distribution d'eau et de vivres
La distribution de bouteilles d'eau et de vivres est en cours dans les communes, a assuré le président, alors que nombre d'habitants témoignaient du contraire, aujourd'hui encore. Et que d'autres pointent du doigt les faibles quantités distribuées...
Le président a néanmoins défendu qu''un "travail considérable" avait été réalisé au cours des derniers jours pour que tout soit distribué dans les communes. "C'est le cas en ce moment. On le fait par voie routière, on le fait aussi par héliportage. On a mobilisé notre armée pour le faire. Et donc en lien avec chaque maire, on va distribuer cette eau qui est attendue par tant de famille qui ont soif".
Un réapprovisionnement facilité avec la réouverture prochaine de l'aéroport
La priorité jusqu'à présent était de désenclaver et de déblayer les routes, a-t-til expliqué pour répondre aux critiques. "Ça a été le gros travail qui a été conduit mais à Tsingoni, par exemple, l'eau est arrivée. Elle a été héliportée hier au niveau du stade et puis ce matin plusieurs palettes ont été déposées au niveau du collège. C'est ce qu'on va faire dans chacune de ces communes".
Cette eau et ces vivres seront distribués par les municipalités "et ce sera de la responsabilité des maires, avec leurs services communaux d'action sociale, d'informer leur population", a précisé Emmanuel Macron. "Les quantités vont beaucoup augmenter à partir de cet après-midi, demain et encore plus après-demain".
Avec la réouverture prochaine de l'aéroport, le réapprovisionnement depuis La Réunion sera aussi plus efficace, ce qui permettra la reconstitution des stocks dans les commerces qui rouvrent progressivement.
"Tous les foyers raccordés à l'eau courante" dès ce samedi
"Pour moi, la priorité des priorités, c'est le combat pour l'eau potable, l'eau de consommation", a rappelé Emmanuel Macron qui a annoncé l'arrivée ce vendredi d'un Antonov, un énorme avion militaire venu de la Réunion avec des bouteilles d'eau.
"Après la distribution d'eau et d'aliments, il y a le rétablissement de l'eau au robinet et j'ai vu des situations de détresse immense", a-t-il ajouté.
"À partir de demain (samedi, ndlr), tous les foyers seront à nouveau raccordés à l'eau courante".
Emmanuel Macron
Les autorités s'occuperont là encore d'informer la population sur les heures d'accès à cette eau courante.
Le retour des tours d'eau... avant un système plus pérenne ?
"Il va y avoir une communication qui sera faite par la préfecture en lien avec la société des eaux, parce qu'on ne pourra pas reprendre l'eau à 100%", précise-t-il néanmoins. "On va réorganiser à partir de demain les tours d'eau que vous connaissez". L'accès à l'eau sera donc possible pendant quelques heures avec une rotation qui sera effectuée pour que chaque foyer puisse en bénéficier.
"Et je veux que dans cette phase d'urgence, puis de stabilisation, on mette aussi de nouvelles capacités pour sortir de ces tours d'eau qui polluent la vie des gens depuis tant de temps". Une promesse qui parlera sans nul doute aux Mahorais qui subissait déjà une crise de l'eau bien avant Chido.
800 policiers, 1 200 gendarmes et près de 900 militaires
Le président Emmanuel Macron a insisté par ailleurs sur la priorité du volet sécurité de la gestion de cette crise mahoraise. "L'effort de la nation est inédit, souligne-t-il. "On aura 800 policiers, 1200 gendarmes et près de 900 militaires. Ça n'est jamais arrivé évidemment dans l'histoire de Mayotte".
Les militaires sécuriseront les entreprises et continueront à apporter du soutien logistique pour l'acheminement de l'eau, du fret et du matériel. Les gendarmes seront dans les zones rurales pour maintenir l'ordre public et soutenir aussi les élus.
Dans les zones police, le nombre de policiers sera augmenté pour le maintien de l'ordre public, en particulier la nuit pendant le couvre-feu qui continuera donc à rester en vigueur.
Accompagner la reconstruction des maisons
L'autre urgence, a souligné le président, c'est la reconstruction des habitations des habitants du département, avec l'arrivée prochaine de plusieurs tonnes de bâches et de tôles à bord de l'Antonov, mais aussi de conteneurs dans les prochains jours.
"C'est très précaire, ce n'est pas ça rebâtir, je vous rassure. Mais aujourd'hui, on ne peut pas laisser des gens dans une maison où tout est ouvert".
Les déchets seront progressivement enlevés, a encore détaillé Emmanuel Macron. "Je sais l'impatience de la population. J'ai entendu cette impatience et grâce à la mobilisation extraordinaire des services de l'Etat, la vie va changer dans les prochains jours au rythme que je viens d'indiquer sur chacun de ces sujets".
Le recours au réseau internet satellitaire
Le président annonce le déploiement "à partir de la semaine prochaine" de connexions internet satellitaires, d'abord au niveau des mairies puis progressivement dans des zones relais pour permettre à la population d'avoir accès à nouveau à du réseau pour rassurer enfin leurs proches, dans l'île mais aussi à l'extérieur.
Une loi spéciale pour accélérer la reconstruction
L'état de catastrophe naturelle a donc été reconnu et un fonds d'indemnisation va être mis en place pour aider également les familles non assurées. "Au fond, ce que la République dit c’est que Mayotte a été frappée par un événement inédit et donc, on accélère toutes les procédures et on change les règles pour les adapter à cela".
Quid de cette loi spéciale évoquée par le président pour "simplifier les textes et les procédures", comme cela a été fait "pour les Jeux olympiques et Notre Dame" ? "Il y a des choses dans la loi Mayotte qu'elle reprendra", répond le président.
La nécessité d'un "discours de vérité" sur la question migratoire
"Par exemple, pour lutter contre l'immigration clandestine, et c'est une nécessité parce qu'on sait que Mayotte est un territoire qui vit une situation inédite supposant d'être beaucoup plus efficace pour reconduire les personnes en situation irrégulière. Sinon, je le dis en toute sincérité, on ne pourra jamais vraiment rebâtir Mayotte", le président arguant de la nécessité de tenir "un discours de vérité".
"Les services publics ont été calibrés pour une population mais cette population a augmenté beaucoup plus vite à cause d'une pression migratoire qui fait exploser tous les services".
Un établissement public contre l'immigration clandestine
L'autre annonce sur ce sujet, c'est la création d'un établissement public pour lutter contre cette immigration clandestine et éviter que les bidonvilles ne reviennent comme auparavant avec le risque qu'un nouveau phénomène météo imprévisible ne cause une nouvelle catastrophe de grande ampleur.
Un objectif ambitieux alors que les bidonvilles sont déjà en train d'être reconstruits. "Vous avez raison, après moi, j'essaie de faire les choses dans le bon ordre. Aujourd'hui, je veux que les gens aient de la sécurité, de l'électricité et de l'eau au robinet", a argumenté le président Macron.
"Est-ce qu'aujourd'hui, on peut régler la question des bidonvilles ? La réponse est non. Mais on va le faire dans la phase stabilisation et rebâtir", assure-t-il tout en affichant l'objectif de reprendre le programme de destruction de ces bidonvilles.
Sur les propos polémiques à Pamandzi : 'J'ai dit la vérité"
Lors de cet entretien, le président a également été confronté à ses propos qui ont choqué la population mahoraise."Vous êtes contents d'être en France ! Si ce n’était pas la France, vous seriez 10 000 fois plus dans la merde !", avait-il déclaré sous les huées des habitants de Pamandzi, en Petite-Terre.
"Hier soir, on va être clair : des responsables du Rassemblement national ont jugé bon d'organiser un rassemblement militant et d'insulter la France en disant qu'elle ne faisait rien. Et j'ai dit la vérité".
"Je ne peux pas laisser des gens insulter notre pays comme ça et, parce que c'est la France, le président se fâche !".
"On ne pourra pas ouvrir toutes les écoles le 13 janvier"
La ministre démissionnaire de l'éducation nationale a déclaré sur X que tous les moyens étaient mobilisés pour préparer la rentrée scolaire à partir du 13 janvier. Un objectif atteignable ? "On ne pourra pas ouvrir toutes les écoles le 13 janvier, c'est impossible", a-t-il répondu.
"Pour l'instant, on recense la situation du bâti. Il y a des communes qui ont perdu les trois quarts de leurs écoles. Donc on va voir comment les rebâtir en urgence. On va planifier. D'autres écoles sont occupées par des gens qui n'ont plus de toit et on va donc essayer de trouver une solution pour ces gens".
Le président d'évoquer la solution possible de la reprise des cours pour ces élèves "à La Réunion ou ailleurs", dans le cadre de la solidarité nationale. "Je ne peux pas ici vous donner de réponse précise parce que je ne l'ai pas".
Un président "touché par le désarroi" des Mahorais
"J'espère qu'on a clarifié les choses pour beaucoup de nos compatriotes mais je veux vous dire combien j'ai été touché et bouleversé par le désarroi, parfois la tristesse, même la colère de beaucoup de nos compatriotes à travers ces deux jours".
Emmanuel Macron
"Vous pouvez compter sur la France tout entière et modestement sur ma personne et je reviendrai dans quelques mois à vos côtés, mais Mayotte est dans mon cœur à chaque seconde", a-t-il conclu.