Milakulo Tukumuli et Willy Gatuhau, un face à face wallisien-futunien de la Nouvelle Calédonie à Paris

Milakulo Tukumuli, président de L’Eveil océanien, et Willy Gatuhau, maire wallisien loyaliste de Païta, se sont retrouvés face à face à Paris aux discussions sur l’avenir de la Nouvelle Calédonie, Tous deux se disputent le titre de meilleur défenseur de leur communauté.

Deux figures emblématiques originaires de Wallis et Futuna, Milakulo Tukumuli, président de L’Eveil océanien, parti communautaire wallisien et futunien, et Willy Gatuhau, maire  non indépendantiste de Païta, ont fait le voyage de Paris pour participer aux discussions sur les conséquences du oui et du non à l’indépendance de la Nouvelle Calédonie, aux côtés des représentants indépendantistes.

Les deux élus calédoniens portent des visions différentes du futur des 30 000 Wallisiens et Futuniens du caillou. Willy Gatuhau était membre de la délégation loyaliste de l’Avenir en Confiance, habitué des réunions parisiennes. En revanche, la venue dans la capitale de Milakulo Tukumuli, accompagné de Vaimua Muliava, ministre du gouvernement sortant, était une nouveauté.

C’est la première fois, depuis les accords de Nouméa, que des représentants de la communauté siégeaient sous leur propre drapeau et non sous les bannières loyalistes ou indépendantistes.

  • Le tournant de 2019

Le maire et le président ont la particularité d’avoir fait irruption sur la scène politique au même moment. Cette double émergence a entrainé un affrontement autour du vote communautaire.               

En février 2019, Willy Gatuhau, jusqu’alors 1er adjoint d’Harold Martin, est élu maire loyaliste de Païta, la commune qui compte, en proportion, le plus d’habitants wallisiens et futuniens. Il devient ainsi le premier maire wallisien du caillou.

Dans le même temps, en mars 2019, Milakulo Tukumuli lance L’Eveil océanien dans l’arène électorale en affichant clairement ses couleurs: « montrer que la communauté wallisienne et futunienne n’appartient à personne, et qu’elle veut et peut s’exprimer dans sa spécificité ».

Pari réussi. Aux élections provinciales, son parti rafle la mise en décrochant plus de 6000 voix, soit environ 80% des bulletins des Wallisiens et Futuniens. C’est une rupture car,  jusque-là, les originaires de Wallis et Futuna votaient massivement pour les Loyalistes. Ses trois sièges au congrès place Milakulo Tukumuli en position de « faiseur de roi ». Aucune majorité pro ou anti indépendantiste n’est possible sans les élus océaniens.

Les deux hommes se sont retrouvés ensuite en opposition frontale aux élections municipales de 2020. Après une campagne très tendue, Willy Gatuhau l’a emporté nettement, avec près de 50% des voix sur la liste de Milakulo Tukumuli (30%). Le maire de Païta s’est assigné pour tâche de « veiller à ce que chaque communauté trouve sa place ».

  • Qui défend le mieux les intérêts communautaires ?

Avec ce rendez-vous parisien, les deux chefs de file étaient à nouveau dans des camps différents.

Milakulo Tukumuli a atteint son objectif : obtenir une chaise à la table des négociations sur l’avenir de la Nouvelle Calédonie, en se présentant comme le meilleur défenseur de sa communauté.

Mais ce rôle de porte-parole communautaire lui est âprement disputé par les non indépendantistes. Willy Gatuhau a présenté à Paris le visage wallisien loyaliste au titre de co-secrétaire général du parti Les Républicains Calédoniens, le groupe le plus radical dans la défense d’une « Calédonie dans la France ».

La bataille décisive va maintenant se déplacer vers le troisième et dernier referendum d’autodétermination désormais programmé pour la fin 2021. Willy Gatuhau va continuer d’assurer que les intérêts des Wallisiens et Futuniens seront mieux défendus dans une Calédonie française.                                   

De son côté, Milakulo Tukumuli avait laissé ses électeurs libres de voter oui ou non lors de la dernière consultation de 2020. Son positionnement pour le prochain vote est très attendu alors qu’il est en plein rapprochement avec les indépendantistes tant au congrès qu’au gouvernement.