Crise politique en Nouvelle-Calédonie ou surenchère électorale?

Les propos tenus par Jean-Marc Ayrault n'ont pas apaisé le débat au FLNKS et au Rassemblement-UMP qui restent figés sur leurs positions. Calédonie Ensemble, plus optimiste, a sa propre interprétation des mots prononcés par le Premier ministre à l'Assemblée Nationale.

Un dialogue de sourds: le retour en arrière

On a l'impression de faire un bond en arrière et de se retrouver dans la période de crispation qui a suivi la signature de l'Accord de Nouméa.
Les Calédoniens qui venaient d'assister aux poignées de mains chaleureuses entre les signataires de l'Accord de Nouméa ont adopté à 72% cette solution pour l'avenir de Nouvelle-Calédonie...
Mais lorsque quelques mois plus tard, en 1999, le Conseil Constitutionnel a lâché son interprétation de l'article concernant le corps électoral, la nouvelle avait eu l'effet d'une bombe à retardement...
 
Un corps électoral glissant? Inacceptable pour le FLNKS qui tout au long des négociations avait brandi le corps électoral figé comme un point non négociable....
L'un des points forts de l'Accord de Nouméa, car il touche à l'un des fondements de la République, le droit de vote, a donc du reprendre le chemin institutionnel pour être remanié afin de remplir les exigences du FLNKS.
 
Aujourd'hui à l'aube, des élections provinciales de 2014, voilà que le débat sur le corps électoral ressurgit...Ce n'est pas surprenant car cette question n'a jamais été réglée politiquement.
Malgré la validation par la Nation, les non indépendantistes n'ont jamais "moralement" accepté cette restriction du droit de vote en Nouvelle-Calédonie.
Alors quand le FLNKS "ose" en plus annoncer qu'il souhaite faire radier 6720 électeurs, alors là c'est la goutte qui fait déborder le vase pour les non indépendantistes qui ont déjà le sentiment d'avoir fait une énorme concession voire un grand sacrifice, en laissant au nom de la paix les nouveaux arrivants en Nouvelle-Calédonie se faire exclure du droit de vote aux élections provinciales de 2014.

 

Le FLNKS persiste et signe, le Rassemblement-UMP aussi...Calédonie Ensemble est sur une autre voie

 
Dans les rangs des deux partenaires historiques, le FLNKS et le Rassemblement-UMP, les propos tenus par Jean-Marc Ayrault à l'Assemblée nationale n'ont pas eu d'effets positifs. 
Le FLNKS n'a même pas commenté la phrase du Premier ministre qui a suscité la joie de Calédonie Ensemble.
Une petite phrase qui pourrait pourtant avoir une sérieuse portée politique :"l’examen de la condition d’installation en Nouvelle-Calédonie en 1998 devra être conduit avec un soin particulier, sur la base de la consultation de la liste électorale générale de 1998 ou de tout autre élément établissant cette installation". 
Autrement dit, selon les propos du Premier ministre, la liste électorale n'est pas le seul repère, contrairement à l'analyse du FLNKS.
Mais les indépendantistes refusent de jouer sur les mots, ils affirment vouloir uniquement garder le cap qu'ils se sont fixés: faire radier toutes les personnes qui n'ont pas, selon eux, le droit de voter aux provinciales. Le FLNKS a toujours su faire la sourde oreille aux discours de ses adversaires politiques ou des représentants de l'Etat...
 
Et comme l'explique Gérard Régnier, le FLNKS reproche aussi à l'Etat de ne pas avoir fait son travail concernant la liste électorale de Nouvelle-Calédonie.

En face au Rassemblement-UMP, on a donc décidé de rester fermes et de maintenir les mêmes revendications

courrier adressé au secrétaire général du haut-commissariat par le Front pour l'Unité

Le parti de Pierre Frogier dresse aussi sa liste de recours pour d'éventuelles radiations de la liste électorale et souhaite toujours l'organisation d'un Comité des Signataires extraordinaire pour décrisper la situation politique. Le Front pour l'Unité demande aussi à " l'Etat d'assurer la protection de ses représentants au sein des commissions administratives de révision des listes électorales".
Concernant les propos tenus par Jean-Marc
Ayrault,le Rassemblement-UMP ne cache pas son scepticisme comme l'explique Virginie Ruffenach.

Le sénateur Pierre  Frogier sera donc reçu vendredi par Jean-Marc Ayrault, au lendemain du rendez-vous de Sonia Lagarde et de Philippe Gomès avec le Premier ministre.

Dans ce contexte politique tendu, Calédonie Ensemble maintient aussi son cap, le parti de Philippe Gomès a choisi de se démarquer en faisant cavalier seul sur une autre voie...
Selon Calédonie Ensemble,"la déclaration de Jean-Marc Ayrault à l'Assemblée nationale, confirme, sans la moindre ambiguïté, toutes les positions prises ces derniers jours par Calédonie Ensemble sur l’irrecevabilité juridique des demandes de radiation que Roch Wamytan entend présenter devant les commissions spéciales".

Communiqué de Calédonie Ensemble après les propos tenus par Jean-Marc Ayrault

 
Un optimiste qui n'est donc pas partagé par les autres partis politiques de Nouvelle-Calédonie...
Impossible de toutes façons de se donner l'accolade en public dans les rangs non indépendantistes en ces temps de campagne électorale.
 
L'Assemblée de la province sud se réunit ce jeudi en séance extraordinaire pour évoquer l'épineuse question du corps électoral, un climat politique qui nous ferait presque oublier le nerf de cette guerre, les douze magistrats des commissions administratives chargés d'examiner les listes électorales, débarquent aussi ce jeudi en Nouvelle-Calédonie....Début de l'examen des "cas particuliers" le lundi 3 mars...
 
Alors réelle crise politique ou surenchère électorale? La réponse est proche...
Mais en attendant une chose est sûre, la campagne électorale pour les élections municipales de fin mars est en stand by et donc les questions qui concernent directement le quotidien des Calédoniens le sont aussi !