Quelle justice pour la Calédonie de demain ?

Dans le cadre des travaux sur l’Avenir Institutionnel, l’Etat a fourni aux élus de Nouvelle-Calédonie les informations nécessaires à leur réflexion. 78 pages, passant la juridiction au crible. La justice peut-elle être aussi efficace en étant plus calédonienne ?
Côté budget : environ 2 milliards de francs CFP par an. Côté effectifs : 25 magistrats et une centaine de fonctionnaires. Le document, transmis par l’Etat, pause aussi la question de l’avenir de la justice en cohérence avec le futur statut de la Nouvelle-Calédonie. 
 
Que ce soit dans l’hypothèse d’une Calédonie française ou au contraire celle de l’indépendance, l’un des principaux enjeux identifiés par l’Etat est celui de la proportion de Calédoniens exerçant les métiers du droit. Rares sont en effet ceux qui ont choisi de porter la robe d’avocat ou de magistrats. Dans leur rapport, les services de l’Etat évoquent deux pistes pour y remédier.

L’enjeu est tout d’abord d’inciter les étudiants en droit à s’orienter vers ces métiers, aujourd’hui boudés. « Le défi que doit relever la Calédonie est que les Calédoniens s’investissent dans les métiers du droit et du judiciaire », explique Isabelle Dauriac, responsable du département Droit-économie-gestion à l’Université de Nouvelle-Calédonie.

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La seconde approche consisterait à changer les règles du jeu, à travers une réforme statutaire de ces professions. A condition toutefois, pour Isabelle Dauriac, de préserver l’impartialité et d’indépendance de la justice. Deux points critiques dans la perspective d’un transfert du Tribunal de Première Instance, comme évoqué pour la première fois par l’Etat.

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Concernant les avocats, le rapport envisage de résoudre le problème par une loi sur l’emploi local des professions libérales. L’ancien bâtonnier, Maître Reuter, a saisi l’occasion de cette réunion technique d’expliquer pourquoi il n’y était pas favorable. « C’est une profession nationale, avec des conditions d’accès qui permettent de préserver un bon niveau dans la profession », plaide-t-il. 

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Cette réflexion sur la justice aborde également des problématiques plus larges d’architecture judiciaire et de droit international, avec une absence regrettable pour Patrice Jean, professeur de droit public : la mention d'une Constitution. « Ce qui me gêne un peu, c’est que dans la partie 1 sur la Nouvelle-Calédonie dans la France, il n’y a rien sur une Constitution, alors que la notion de Constitution apparaît dans l’hypothèse de l’indépendance ». 

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Mais surtout, pour Patrice Jean, si la réflexion dans l’hypothèse du maintien de la Calédonie dans la France est pertinente, anticiper l’organisation juridique d’une Calédonie indépendante est un non-sens. « On ne peut pas dire grand-chose sur l’hypothèse de l’indépendance », commente-t-il. 

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Le rapport reste une base de travail pour les élus calédoniens, mais l’Etat rappelle en conclusion quelques exemples de partenariats entre Etats en matière de justice. Avec par exemple celui de Monaco, où 17 magistrats français sont détachés.