Darwin: l'Australie accueille les Chinois et fâche les Américains

Le port de Darwin
Le port de Darwin, situé à l'extrême nord de l'Australie, aux portes de l'Asie, est au centre d'une rivalité stratégique entre la Chine et les États-Unis.
Les Américains et les Chinois se disputent le port de Darwin. Landbrige, a décroché le contrat de gestion du port de Darwin. Or ce groupe chinois est étroitement lié à l'armée chinoise. Le Pentagone proteste, car le gouvernement australien ne l'a pas consulté. 
 
En octobre, le gouvernement du Territoire du Nord a confié le port de Darwin à une entreprise chinoise. Landbrige a obtenu un bail de 99 ans pour la gestion de ce port de l'extrême nord du pays, un site hautement stratégique, puisque c'est la porte d'entrée vers l'Asie. 
 
Darwin a d'ailleurs été choisie par le Pentagone pour y stationner 1500 marines. Barack Obama a annoncé en 2011 qu'il voulait centrer la présence stratégique de son armée sur la région Asie-Pacifique. Dans le cadre de cette politique, les États-Unis ont passé un accord avec l'Australie, pour augmenter le nombre de marines basés à Darwin. Ils seront 2500 en 2017. Et leur ravitaillement logistique et militaire transite par le port de Darwin. Désormais le groupe chinois Landbridge supervisera tout le port, y compris la base de ravitaillement des États-Unis. À plus long terme, Washington ambitionne d'installer une base navale permanente dans le port de Darwin. 
 
Mercredi, en marge du sommet de l'APEC à Manille, Barack Obama s'est donc plaint à Malcolm Turnbull d'avoir appris le deal chinois par voie de presse, et de ne pas avoir été consulté sur la cession du port de Darwin à l'entreprise chinoise Landbridge. Le Premier ministre australien a d'abord botté en touche, déclarant que l'affaire était publique, et recommandant au gouvernement américain « de s'abonner au quotidien du Territoire du Nord », pour se tenir au courant au jour le jour. 
 
Depuis, Malcolm Turnbulll a du changer de ton. Car Landbridge est un grand groupe, très étroitement lié à l'armée chinoise. Landbridge a créé des milices populaires armées, des réservistes, pour soutenir l'armée chinoise en cas de guerre, ou d'état d'urgence. Concrètement, ces milices de Landbridge participent à des exercices militaires conjoints avec l'armée de libération du peuple - c'est le nom officiel de l'armée en Chine. Mais Landbridge fournit aussi des services de transport et de logistique à l'armée. 
 
Toutes ces informations figurent dans le rapport de l'Institut australien de Politique Stratégique. Pourtant, le ministre des Infrastructures du Territoire du Nord a avoué hier qu'il n'a pas lu le rapport. Malcolm Turnbull a du monter au créneau pour dissiper les doutes des Australiens: 
 
"Ces inquiétudes liées à notre sécurité nationale ont été rigoureusement évalués par nos agences de sécurité, et le ministère de la Défense." 
 
Pour l'opposition travailliste, la cession du port de Darwin à Landbridge, n'est rien d'autre qu'une boulette monumentale. Stephen Conroy est le porte-parole du Parti Travailliste sur les questions de défense:
 
"Le problème, c'est qu'aucun décideur impliqué dans ce dossier ne semble avoir vérifié l'essentiel, à savoir les liens étroits entre Landbridge et l'armée chinoise. C'est une grosse erreur, et les Australiens devraient s'inquiéter de voir leur gouvernement bâcler ainsi un dossier si important pour la sécurité nationale."
 
La prise de contrôle du port de Darwin est un véritable pied de nez à Washington. En effet, le gouvernement chinois n'apprécie pas le déploiement de marines américains dans le nord de l'Australie, ni le projet du Pentagone d'établir une base navale permanente à Darwin, pour réparer et ravitailler en carburant ses navires de guerre.