Une “situation inédite”, au Médipôle de Dumbéa. Elle a poussé les professionnels de santé du Centre hospitalier et territorial Gaston Bourret de Dumbéa, à convoquer la presse ce jeudi 9 janvier 2025. “On ne sait plus comment hospitaliser les patients, parce qu’on a fermé trop de lits”, indique le Dr Thierry De Greslan, président de la commission médicale de l’établissement. Sur l’ensemble du territoire, 300 lits sur 800 au total ont dû être fermés en médecine et en chirurgie. Cela représente :
En province Nord :
- 40 lits sur 60 à Koné,
- la totalité des lits de Koumac et Poindimié, soit respectivement 14 et 15.
En Province Sud :
- 90 lits à la Clinique de Nouville, à Nouméa,
- 114 lits sur 380, au Médipôle de Dumbéa.
Le territoire a perdu 40% de sa capacité d’accueil des patients, en milieu hospitalier. “On parle de lits d’hospitalisation complète et non d’hôpital de jour ou de semaine. Cela concerne les malades urgents”, poursuit le Dr De Greslan.
“On a une tension majeure, qu’on n’avait jamais connue même pendant le Covid. Tout cela est lié aux départs de nos infirmières notamment. Elles sont plus de cent à être parties et c’est le même mécanisme à la clinique et au centre hospitalier du Nord”. Une perte significative d’infirmiers en 2024, qui représente une baisse de 16% des effectifs.
Conséquence : des heures d'attente aux urgences
La conséquence directe de ce manque de professionnels de santé, ce sont les heures d’attentes aux urgences. “Depuis un peu moins d’une semaine, on a des brancards qu’on a installés aux urgences, pour pouvoir faire attendre les patients dans les moins mauvaises conditions possibles. C’est terrible pour nous, de faire attendre des patients une nuit ou plus de 24 heures sur un brancard, mais on est obligés de le faire. On fait au mieux”, poursuit le président de la commission médicale du Médipôle.
“On est dans des situations qu’on avait jamais vues”, poursuit Dr Vincent Fardeau, représentant des médecins urgentistes. "On hospitalise dans les urgences, des patients sur des brancards. Ça n’avait jamais été fait, même pendant la crise covid. C’est 30 à 40% d’activité additionnelle, avec des patients relativement lourds parce qu’ils ont pour certains arrêté leurs traitements, après la crise que l’on a connue”.
Autres conséquences : toutes les admissions planifiées (hors oncologie) sont suspendues, du 9 au 23 janvier 2025, pour prioriser les urgences. Et les patients doivent être réévalués pour déterminer les prises en charge prioritaires.
Les chiffres clés des urgences :
- Le nombre de passages aux urgences quotidiens : 160 à 180 en moyenne depuis fin octobre,
- Admissions hospitalières via les urgences : environ 30 par jour,
- Appels au centre 15 : 250 à 300 appels par jour.
Des aides libérales
Face au manque de spécialistes, des médecins libéraux viennent prêter main forte. “On a des aides du libéral pour la gastro-entérologie ou l’ophtalmologie. Ce sont les deux spécialités qui sont actuellement en grande difficultés au CHT. Pour les autres, on arrive à faire front, quitte à ce que les médecins travaillent un jour sur deux de nuit, ou un jour sur trois de nuit. Ce qui est très lourd, au bout de quelques semaines”, indique le Dr De Greslan.
Des solutions proposées
Des difficultés qui s’accumulent depuis plusieurs années sur le Caillou. Un cri d’alerte est lancé au nouveau gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et aux pouvoirs publics. “On lance un appel au secours. On a des solutions à proposer et il faut en discuter de manière territoriale. Cela doit être une priorité”, conclut le Dr De Greslan.
Les professionnels de santé du Médipôle proposent de :
Renforcer les ressources humaines avec :
- Un appel aux infirmiers libéraux pour des contrats à court terme,
- Une collaboration avec les kinésithérapeutes pour des prestations ciblées,
- L’exploration de partenariats avec l’armée, pour renforcer les équipes paramédicales.
Organiser les soins en urgence avec :
- L’installation de médecins généralistes aux urgences, pour traiter les cas non graves,
- La fluidification des parcours de soin, pour limiter l’engorgement.
Mobiliser la population :
- Encourager les consultations chez les médecins traitants pour les cas non urgents,
- Contacter le 15, avant tout déplacement aux urgences en cas de doute.
Les professionnels de santé lancent aussi un appel à la prévention, face à l’épidémie de grippe qui touche actuellement le territoire.