Le message est donné d’entrée de jeu sur une affiche à l'extérieur de cette grande surface à Normandie : il n'y a pas de riz. Mais ce n’est pas le seul produit qui manque, bien d’autres rayons sont vides. "Le sucre on en a un petit peu parce qu'on a été livré hier et encore on limite à un paquet de sucre par personne. Pour qu'on puisse partager au maximum", détaille Jean-Marc Espalieu, gérant de l'enseigne Korail. "Pour la farine, j'ai réduit [la taille du rayon] parce qu'on n'a pas de farine. On a peut-être 50 kg de farine par jour. C'est dérisoire, il faudrait aujourd'hui 300 à 400 kilos par jour pendant 15 jours pour rattraper le manque sur le marché."
Dans cette grande surface, 400 à 500 personnes arrivent tous les matins à la recherche de ces produits de base.
"On nous a donné 100 kilos de riz hier, je n'ose même pas le mettre en rayon parce qu'il pourrait y avoir une émeute dans le magasin."
Jean-Marc Espalieu, gérant de l'enseigne Korail
"Pas de protectionnisme"
Selon ce gérant, la protection du marché local, aujourd’hui défaillant, et les quotas d’importation verrouillés restent le fond du problème. Il interpelle les autorités. "Les petits salaires qui ne s'en sortent pas cherchent les produits de première nécessité les moins chers. Mais il n'y en a plus sur le marché. À un moment donné, il va falloir mettre sur la table les vraies réalités du marché calédonien. Oui à la production locale, je suis le premier à défendre la production locale, mais pas de protectionnisme, avec des stops partout pour nous empêcher d'importer."
Sept magasins pour trouver des œufs
Conséquence de ces pénuries, aujourd’hui, les familles doivent surveiller les réseaux sociaux et être très réactives, au risque d’arriver trop tard. Des œufs ont été livrés ce samedi matin dans le quartier de Trianon, la nouvelle a très vite circulé. "Ça fait pratiquement un mois que je n'ai pas trouvé d'œufs. J'ai fait sept magasins", raconte ce client, soulagé de repartir avec deux douzaines.
50 appels par jour pour des œufs
Les commerces de proximité ne sont pas prioritaires face aux grandes surfaces. Mais lorsqu’ils reçoivent de petites quantités, ils sont aussi rapidement dévalisés.
Dans cette petite boutique, la responsable fait même des réservations pour ses clients fidèles. "Les œufs sont très demandés, on a environ 50 appels par jour. On essaye d'en chercher partout. On a à peu près 80 douzaines deux fois par semaine, mais ce n'est pas suffisant. Quand on en reçoit, on les met en rayons et là c'est la ruée. Les gens font la queue et se disputent presque."
Pour certains produits, comme le riz, les professionnels des grandes surfaces estiment que, même si les quotas sont libérés, il faudra deux à trois mois pour que la situation se régularise.
Le reportage de Stéphanie Chenais et David Sigal :