Une faute de Heve Kelley après cinq balles de match contre lui. Heramana ne bronche pas, son coach et ses coéquipiers hurlent de joie. Le Cagou met quelques secondes à comprendre : il vient de remporter la médaille d’or du simple aux Jeux du Pacifique. Dans un grand sourire, il lève alors les épaules, un peu perplexe, et va s’asseoir sur son banc. Pour boire un peu avant de ranger ses affaires.
Une victoire normale, pour le Calédonien, qui n’est clairement pas le plus démonstratif de la bande. Il faut dire, aussi, que les Jeux ne sont pas une finalité, pour le récent champion de France des moins de seize ans. "J’espère pouvoir participer à des tournois du Grand Chelem juniors", prévient Heremana Courte.
Physique et percussion
Et il a les armes pour y arriver. Même si le tournoi a été déshabillé de ses meilleurs joueurs, comme le Mariannais Colin Sinclair, le Tahitien Gillian Osmond, ou même le Calédonien Maxime Chazal, le Cagou a montré un tennis solide et complet. Face à Heve Kelley, il s’est très vite rendu le match facile en faisant beaucoup courir son adversaire. "Je savais que c’était un joueur plus faible que moi physiquement, parce qu’il est plus vieux", commente celui que tout le monde appelle Mana. "J’ai essayé d’être solide et de le faire jouer." La bonne tactique, entre solidité et percussion. "C’est un contreur", analyse l’entraîneur de la sélection calédonienne, Pierre-Henry Guillaume. "Sa zone de confort, c’est loin derrière la ligne et il sait faire jouer un coup de plus à son adversaire. Mais depuis qu’il est en France, il a aussi un côté plus percutant, notamment au service."
Pression maximale
Licencié du club du Mont-Coffyn, le Calédonien s’entraîne du côté de Montpellier, à la Grande-Motte. Un départ en 2021 qui lui a permis de forger son mental. Car à Honiara, ce facteur aura eu une importance toute particulière. "Les Jeux peuvent devenir destructeurs, explique Pierre-Henry Guillaume. Mana a été très médiatisé après son titre de champion de France, il a eu du mal à le digérer et il n'a pas fait de bons résultats derrière. En Calédonie, avant de revenir, puis même ici, on lui en parle pas mal. Il y a eu beaucoup de pression, pour lui."
Héritier de N'Godrela
Heremana, un joueur qui inspire beaucoup de respect autour des courts. "C’est un mec de 16 ans qui en a 25 dans la tête", résume Cyril Jacobé, l’entraîneur de la sélection vanuataise. "Il est très costaud dans la tête." Un joueur aux deux visages. "Ce n’est pas le même sur le terrain et en dehors", raconte son partenaire de double, Nell Rollin. "Il est très taquin et très extraverti au village et avec nous. C’est quelqu’un qui fait beaucoup de blagues. Mais dès qu’il entre sur le terrain, c’est une personne différente."
Désormais, le Cagou aura une nouvelle étiquette. Celle d’un médaillé d’or aux Jeux du Pacifique. Ce n’était plus arrivé depuis un certain Nickolas N'Godrela en 2015, en Papouasie. À l’époque, le Calédonien remportait également l’or en doubles messieurs et par équipes. Il reste donc encore un peu de marge, à Mana. À moins que d’ici les Jeux de Tahiti en 2027, le circuit pro et les tournois ATP ne l’appellent.