INTERVIEW. "Nous sommes inquiets et on n’a pas été rassurés", résume Stéphane Yoteau, vice-président de la CCI, après la visite ministérielle de François-Noël Buffet

Stéphane Yoteau, vice-président de la CCI, invité du JT ©NC la 1ère
Dans une Nouvelle-Calédonie toujours en crise, la semaine a été marquée par la visite officielle de François-Noël Buffet, le ministre des Outre-mer. Après ses annonces et déclarations concernant l'aide prodiguée par l'Etat, les acteurs économiques expriment une déception. L'argent arrive peu et trop tard, a estimé samedi soir Stéphane Yoteau. Le vice-président de la CCI, la Chambre de commerce et d'industrie, était l'invité du journal télévisé.

Ministre des Outre-mer, François-Noël Buffet a réservé à la Calédonie meurtrie son premier déplacement officiel dans ses nouvelles fonctions. Une visite très attendue par la sphère politique locale, et par un monde économique confronté à une crise qui semble appeler à durer et se creuser. Les annonces financières attendues ne sont pas au rendez-vous, estiment ses acteurs, parmi lesquels Stéphane Yoteau. Ce chef d'entreprises est le vice-président de la CCI (Chambre de commerce et d'industrie) chargé du BTP et de la simplification. Il était l'invité du journal télévisé sur NC la 1ère, samedi 19 octobre.

NC la 1ère : Vous êtes déçu par les annonces du ministre. Pourtant, il a annoncé que le chômage partiel allait être prolongé jusqu’en décembre…

Stéphane Yoteau : C’est une très bonne nouvelle, si l’argent est disponible. Le fonds de solidarité du mois d’août vient juste d’être mis en ligne, on est mi-octobre, et le chômage partiel exaction s’est arrêté mi-août pour beaucoup d’entre nous. On attendait quand même des mesures un petit peu plus fortes. On est franchement déçus. Les annonces sans l’argent, malheureusement, ça restera des annonces. Ce que le monde économique demande, c’est une visibilité, de l’assurance, une sécurité, au moins jusqu’à mi-2025. Pour l’instant, on n’y est pas.

Lorsque le dispositif de chômage partiel ne fonctionne pas, comment faites-vous ?

S.Y. : Eh bien, on prend sur notre trésorerie. Jusqu’au moment où, soit on sera en cessation de paiements, soit on sera obligé de licencier. On joue entre les deux. Maintenant, on a pu échanger avec le ministre. Je crois qu’il y a une profonde méconnaissance de nos contraintes. Quand il dit : ‘On va diminuer progressivement le chômage partiel’, ça ne veut rien dire. Le chômage partiel est un seau. Le chômage total est un autre seau. Si vous en videz un, vous remplissez l’autre.

Je lui ai posé la question, jeudi après-midi : ‘M. Le ministre, est-ce que vous préférez des gens qui travaillent (chômage partiel) ou des gens qui ne travaillent plus (chômage total) ?' Il a répondu qu’il préférait des gens qui travaillaient. Après, je me suis dit que j’allais appeler la Cafat. Si on diminue le chômage partiel, tous ces gens qui vont au chômage total, a-t-on les finances [pour les indemniser] ? La Cafat m’a répondu : ‘Jusqu’au 31 décembre.” Oui, pour nous la situation est grave, nous sommes inquiets et on n’a pas été rassurés.

Concernant le fonds de solidarité de l’Etat (FSE) destiné aux TPE et aux PME, il a été mis en place début juin. Que s’est-il passé depuis ?

S.Y. : On a travaillé avec la mission de Bercy sur des mesures, pour aider très rapidement les entreprises. Le chômage partiel était une de ces mesures. L’autre  mesure était le fonds de solidarité, destiné aux petits artisans, aux patentés, aux petites entreprises. C’était une bonne mesure, elle permettait d’avoir un revenu plancher pour ne pas sombrer. Sauf que le FSE du mois d’août vient tout juste d’être mis en ligne et on ne sait pas s’il y en aura un [pour le] mois de septembre, d’octobre et ainsi de suite. On est tenus par une espèce de ligne de vie, sans aucune visibilité. Mes salariés viennent toutes les semaines me demander : ‘C’est comment ?’ Je suis obligé de leur dire que je ne sais pas. C’est infernal.

Le ministre s’est engagé à accompagner les collectivités pendant la reconstruction. Un guichet unique a été mis en place, provinces et mairies ont jusqu’au 17 novembre pour adresser leurs demandes de subvention. C’est positif ? Qu’est-ce que cela implique pour le monde de l’entreprise ?

S.Y. : SI ça va vite, ça veut dire que très rapidement, le secteur du BTP, notamment, va retrouver de l’activité. C’est essentiel. Je connais un grand nombre de [sociétés] dans le BTP qui disent : ‘En janvier, on ferme, on n‘a plus de travail.’ Donc oui, c’est une bonne nouvelle pour le BTP. Des bonnes nouvelles comme ça, il nous en faudrait un peu plus, malheureusement, vu l’état de l’économie aujourd’hui.