La Calédonie, autosuffisante en viande porcine, pourrait voir ses élevages disparaître si la peste porcine passe les frontières

Objectif : éviter l’introduction de ce virus hautement contagieux dans l'archipel
La peste porcine africaine, une maladie virale affectant les porcs, est surveillée de près en Calédonie par les services d'inspection vétérinaire. Elle a déjà décimé des élevages entiers dans le monde, et gagne du terrain dans notre région. Si le Caillou n'est pas touché, la vigilance est de mise pour garder ce virus hors de nos frontières.

Un nouveau convoi vient d'arriver à l'abattoir de Païta. Les soixante-dix porcs proviennent d'un élevage de Tontouta. Transportés par camions, ils sont déchargés sous l'œil attentif des agents des services d'inspection vétérinaire et de régulation des marchés. Ils s'assurent que les animaux sont en bonne santé. "Ils découvrent leur environnement, décrit Loïse de Valicourt, la cheffe du Sivap, le service d'inspection vétérinaire, alimentaire et phytosanitaire. Ils ont l'air en bonne santé."

L'abattoir de Païta est un lieu majeur de surveillance, car chaque jour une centaine de porcs est abattue ici pour la consommation calédonienne. La moindre anomalie est donc prise au sérieux. "Dans cette partie de l'abattoir, c'est un travail essentiel qui est mené de surveillance. Vous êtes en capacité d'alerter les services vétérinaires, de tout symptôme qui pourrait être significatif d'une maladie de type peste porcine africaine."

Risque réel

Les élevages calédoniens sont aujourd'hui sains, c'est une bonne nouvelle, mais les acteurs de la filière porcine se préparent au pire : tous restent en alerte au quotidien. Sylvie Birot Di Folco est la présidente de l'Upra porcine. "C'est inquiétant, vu l'ampleur que ça prend dans le monde, pour cette éleveuse du Mont-Dore. Il ne faut surtout pas qu'elle rentre en Calédonie."

"Cela représente un réel risque, car la maladie progresse, explique Loïse de Valicourt. Le plus important pour nous, c'est une introduction. Elle pourrait se faire via des porcins, mais nous n'en importons pas. Donc elle peut passer par des marchandises ou des passagers qui ont des habits contaminés par le virus. Il est primordial d'être vigilants sur ce point d'entrée."

Cette maladie virale inoffensive pour l'homme a déjà décimé des élevages entiers de porcs en Europe et en Asie. Aujourd'hui, elle est à nos portes, à Singapour et en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Il affecte les porcs domestiques et sauvages. Il résiste dans l'environnement et les produits importés à base de porc. Et pour éviter toute introduction sur le Caillou, les contrôles sont renforcés à l'aéroport de Tontouta.

Illustration à Païta, avec ce reportage de Malia Noukouan et de René Molé

©nouvellecaledonie

 

Contrôles sanitaires renforcés : colis postaux, voie maritime et voie aérienne

À l'aéroport, 135 passagers en provenance de Sydney se posent sur le tarmac de l'aéroport de la Tontouta. Pendant qu'ils récupèrent leurs bagages, les agents du Sivap se tiennent prêts pour le contrôle, épaulés par les douaniers. L'Australie est préservée de la peste porcine africaine, mais l'aéroport de Sydney reste une provenance à risque, car c'est un hub important.

"Pas de nourriture avec vous ?", interroge le "profiler" après le passage de la douane. Deuxième étape avec le chien du pôle biosécurité. Grâce à son flair très développé, le beagle repère rapidement les produits interdits sur le territoire, en particulier les produits faits maison. "Vous avez de la nourriture monsieur ?", interroge l'agent qui tient le chien en laisse. "Oui, de la charcuterie," avoue Franck Coq.

Quand un bagage non déclaré est suspecté, il passe par l'appareil à rayons X. Ce passager témoin, que nous avons sollicité pour les besoins du reportage pour porter notre valise incriminée, dit comprendre ces contrôles à l'entrée sur le territoire. "Lorsqu'on revient de voyage, on ne pense pas forcément aux contrôles de biosécurité. Et c'est vrai que c'est assez surprenant. C'est une bonne initiative de la part du territoire."

Pas de charcuterie pour cette autre passagère, mais Sarina Soetikno vient d'être contrôlée avec une plante dans ses bagages. "Cela permet aux gens de faire attention et de ne pas faire venir n'importe quoi sur le territoire. Comme ça, on est protégés."

Deuxième cause de saisie à l'aéroport

Le virus de la peste porcine africaine est invisible à l'œil nu. Le service vétérinaire et phytosanitaire compte donc sur la collaboration des 250 000 Calédoniens et touristes qui passent par l'aéroport. "Apporter un saucisson, ou un bout de jambon cru ou cuit, peut représenter un risque, précise Nicolas Fijalkowski, le chef de la section inspection voie aérienne. Il suffit d'un morceau dans la nature pour qu'un cochon sauvage le mange, ou qu'on donne des restes à des cochons d'élevage, pour contaminer un animal qui sera le cas zéro sur le territoire."

En 2023, les produits à base de porc représentaient la deuxième saisie à l'aéroport, après les fruits et légumes. Sur 3 500 interceptions, on compte 590 saisies pour le risque porcin. 350 kilos, soit l'équivalent 1 700 saucissons interceptés. Seulement 60% des voyageurs déclarent ces produits interdits, saisis puis incinérés. Les contrevenants s’exposent à une amende de 50 à 70 000 francs pacifique.

Malia Noukouan et René Molé ont assisté aux contrôles à l’aéroport international de Nouméa La Tontouta 

©nouvellecaledonie