Salves de coups de canons, revue de troupes : Li Qiang, le Premier ministre chinois, a été accueilli en grande pompe, lundi 17 juin, à Canberra. Un signe du dégel entre les deux pays, qui a débuté il y a deux ans, lors de l'arrivée des travaillistes au pouvoir en Australie.
La normalisation fait suite à des années de brouille
Récemment, la suppression par Pékin de la plupart des barrières commerciales concernant le charbon, le coton, le vin, l’orge, le bœuf et le bois a soulagé les exportateurs australiens. Leur coût annuel approchait les 960 milliards de francs CFP.
Après un long arrêt des relations ministérielles, cette visite se voulait donc celle de la normalisation, après les vives tensions de l’époque à laquelle les conservateurs dirigeaient l’Australie. L’exclusion de Huawei de son réseau 5G, la demande d’une enquête sur l’origine de la Covid-19, entre autres, avaient hérissé l’Empire du Milieu.
La coopération, sans éluder les différends
Aujourd’hui, le torchon ne brûle plus. Toutefois, des désaccords persistent. Notamment sur les droits de l'Homme, avec par exemple le cas de l’écrivain australien Yang Hengjun, emprisonné et condamné à mort avec sursis en Chine pour « espionnage ». Également sur l'interventionnisme de Pékin et son influence grandissante dans la grande région Pacifique. Mais les deux parties ont décidé de parler de tout franchement, comme le souligne Anthony Albanese, le Premier ministre australien.
"La Chine est, bien entendu, une puissance régionale et mondiale. Elle a un rôle vital à jouer pour que notre région reste ouverte, stable et prospère. Aujourd'hui, nous avons également échangé nos points de vue sur notre région et sur le monde, ce qui nous a permis de mieux comprendre nos positions et nos perspectives respectives", a-t-il déclaré.
L'Australie préconise que nous travaillions tous ensemble pour promouvoir un équilibre régional dans lequel aucun pays ne domine et aucun pays n'est dominé. Une région où les pays, grands et petits, fonctionnent selon les mêmes règles... Nous coopérerons avec la Chine là où nous le pouvons, nous serons en désaccord là où nous le devons.
Anthony Albanese, Premier ministre de l'Australie
"Il est crucial, a-t-il encore estimé, que nous nous engagions l'un envers l'autre, compte tenu de notre proximité géographique, de notre interconnexion économique et des liens profonds et durables qui unissent nos peuples."
Même analyse en écho chez Li Qiang.
Nous avons également eu un échange de vues franc sur certaines divergences et certains désaccords et nous sommes convenus de les gérer de manière appropriée, conformément à notre partenariat stratégique global. Nous sommes tous deux favorables au développement d'une coopération mutuellement bénéfique, et au renforcement de la vitalité et de la durabilité des relations entre la Chine et l'Australie.
Li Qiang, Premier ministre de la Chine
Dialogue militaire, suppression des visas, pandas…
Et le ton est déjà donné, pour mieux gérer d'éventuelles nouvelles situations conflictuelles, notamment dans les eaux internationales, a annoncé Anthony Albanese. "L'une des mesures très pratiques dont nous avons parlé est l'amélioration de la communication entre militaires afin d'éviter les incidents et d'instaurer un dialogue." À noter, aussi, qu’Australiens et Chinois n’auront désormais plus besoin de visa pour se rendre les uns chez les autres.
Autre symbole de la détente, la reprise de "la diplomatie du panda". Pékin va rapatrier deux vieux pandas du zoo d’Adélaïde, dans le Sud de l'Australie, et a promis de fournir prochainement un nouveau couple de ces mammifères, emblématiques du géant asiatique.
Realpolitik
Globalement, les deux États se montrent réalistes. L'Australie reconnaît le poids majeur de la Chine, son principal partenaire commercial avec 30% de ses exportations. Les échanges bilatéraux s’élèvent à plus de 24 000 milliards de francs CFP. Et Pékin, qui subit un ralentissement économique et un protectionnisme grandissant de l'Europe comme des Etats-Unis, veut réchauffer ses liens avec des pays importants du Pacifique.
Le reportage de Bruno Sat
Li Qiang a terminé ce déplacement de quatre jours mardi 18 juin, en visitant une raffinerie de lithium contrôlée par la Chine à Perth, en Australie-occidentale.