Le bain thérapeutique, un moment de communion entre jeunes parents et nourrisson

A 19 jours, Ylona profite du bain thérapeutique. Pour sa soeur Ylana, ça sera pour plus tard.
Au Médipôle, une infirmière puéricultrice propose des "bains thérapeutiques" aux jeunes parents, notamment ceux dont les enfants sont hospitalisés en néonatalogie. Une pratique qui permet de détendre les nouveau-nés, de rassurer sur les gestes conseillés pour ce moment quotidien, et de créer du lien.

La chambre tamisée abrite deux petits lits chauffants. C’est qu’Ylona et Ylana sont nées plus tôt que prévu, "à 33 semaines" confie leur maman, Ericka. Reliées par des tubes à un monitoring, elles boivent maintenant au biberon, du haut de leurs 19 jours d’existence. Une première victoire. Léa Beaumont connaît déjà cette famille, car elle exerce dans le service en tant qu’infirmière puéricultrice.

C’est sur ses jours de repos que Léa Beaumont vient dispenser ce soin. On l’appelle le "bain de Sonia", auquel elle s’est formée dans l’Hexagone. Depuis novembre 2023, grâce à une subvention du gouvernement, la jeune femme propose aux couples calédoniens volontaires une séance gratuite. Dans le cadre d’un appel à projets en faveur des 1000 premiers jours de vie, cent bains sont financés au Médipôle. Elle exerce aussi à domicile, mais c'est payant.

Nées prématurées, Ylona et sa soeur Ylana sont hospitalisées en néonatalogie.

Questionnements autour de la parentalité

Dans cette chambre de la néonatalogie, Léa Beaumont s’installe en face d’Ericka et Bernard. C’est le moment de la discussion préalable à l’immersion. "Ça n’est pas juste un bain, c’est aussi un entretien avec les parents pour qu’ils puissent parler de l’histoire de la conception, de la grossesse, de l’accouchement… C’est à la fois pour les écouter, et leur permettre de poser les questions autour de la parentalité."

Ce bain reprend les conditions que les bébés connaissent dans le ventre de leur mère. Le linge imite l’utérus. C’est là où ils sont le plus apaisés parce qu’ils n’ont pas la sensation de faim, n’ont ni chaud ni froid, ils flottent dans une lumière tamisée, le bruit est atténué : c’est du bonheur. Là on retrouve ce moment-là et les bébés se détendent parce ça leur fait du bien. Ça se voit.

Léa Beaumont, praticienne du bain thérapeutique

Après cet échange, l’infirmière commence à remplir un lavabo qui sert de baignoire. L’eau, entre 37 et 38° degrés, a la température du corps humain. Ylona, endormie, est soulagée des électrodes qui permettent de suivre ses constantes. Un petit tuyau sort de son nez. Léa Beaumont la déshabille doucement, avant de l’emmailloter dans un lange. Elle lui parle à voix basse.

Conseillé par une amie du couple

Le bébé entre au contact de l’eau, porté par Léa Beaumont. Sa tête n’a pas besoin de soutien, elle flotte. Son visage se détend instantanément. Ses oreilles sont immergées. L’infirmière la promène dans le liquide, puis passe la main à Bernard. "On ne sait pas qui est le plus heureux, bébé ou papa", s’amuse-t-elle. En effet, Bernard est radieux. Il plaisante : "Je fais comme quand je conduis mon camion."

Léa Beaumont immerge Ylona, après l'avoir emmaillotée dans un lange.

La maman, la main encore éprouvée par les cathéters, regarde la scène. Il y aura une seconde séance avec la petite Ylana, qui n’est pas en forme ce jour-là. "Une de mes amies m’avait parlé de ce bain, qui avait fait du bien à sa fille, raconte Ericka. Du coup, en arrivant dans le service, Léa m’a dit que ça serait parfait pour les jumelles. C’est trop bien."

"Ça devrait être remboursé"

"Quand ils ont les oreilles dans l’eau, c’est comme s’ils étaient dans l’espace", pour Bernard. "C’est un moment magique, fabuleux, de voir Léa faire avec les enfants. Je conseille ça aux parents qui viennent ici. Franchement c’est merveilleux. Ils ne le regretteront pas." Pour Ylona, un biberon et au lit : le bain thérapeutique, ça relâche.

Ylona détendue, dans l'eau et les mains de papa

 

Ce que j’aime avec ce bain-là, c’est qu’au début je commence, et les parents sont dans l’observation. Ils peuvent voir leur bébé dans la détente, se rendre compte qu’il aime ça, et comme ça quand c’est leur tour, eux aussi prennent du plaisir.

Léa Beaumont, infirmière puéricultrice

 

Vu de l’extérieur, cette pratique simple semble d’utilité publique. "Ça devrait être généralisé et remboursé, affirme Léa Beaumont. La grossesse est très encadrée, les soins sont pris en charge, mais une fois que l’enfant est né, c’est limité. La sage-femme est là pour un temps court, le pédiatre pour les questions de santé, mais qui accompagne les jeunes parents ?"