Panne électrique en Nouvelle-Calédonie : les raisons du black-out

Coulée de nickel à la SLN
Pendant plus de six heures samedi, dans le sud de la Grande Terre, le réseau électrique n’a pas fonctionné normalement, privant de courant environ 170 000 personnes. Une panne dont l’origine se trouve à l’usine SLN de Doniambo. Explications.

Les responsables de la gigantesque panne électrique qui a touché la Nouvelle-Calédonie samedi ont été tout de suite identifiés. Dès hier matin, Enercal, en charge de la gestion électrique du pays, évoquait un problème d’"instabilité sur les fours de la SLN". Mais de quoi parle-t-on exactement?

En fait, pour procéder à une coulée de nickel, le métallurgiste doit faire chauffer le minerai à 900 °C, puis 1 600 °C. Pour y parvenir, la SLN exploite trois fours électriques d’une puissance extrêmement importante : 50 à 60 mégawatts chacun soit un total de 150 mégawatts. A ce niveau de puissance, le moindre incident peut avoir un impact majeur sur le réseau électrique, car la SLN "appelle" énormément d’électricité, or celle-ci ne se stocke pas. Pour que le réseau soit stable et fonctionne correctement, il faut que l’offre en électricité corresponde à chaque instant exactement à la demande. De petits écarts peuvent être absorbés, mais s’ils sont trop forts, le réseau s’arrête tout simplement de fonctionner.

Surchargé, le réseau a cessé de fonctionner

Or, depuis vendredi, a expliqué hier la SLN dans un communiqué, "plusieurs électrodes se sont cassées sur les trois fours, déclenchant des perturbations croissantes", au point qu’un des fours a tout simplement cessé de fonctionner. Ce sont donc des dizaines de megawatts "en trop" qui sont venus surcharger le réseau et cette fois, celui-ci ne l’a pas supporté. Les moyens de production se sont tout simplement arrêtés.

Il est alors 10h55 du matin et à partir de ce moment-là, tout l’enjeu est de les faire repartir sans créer de nouvelle perturbation. "Ce sont des moyens de production de grande taille, industriels, qui ne se redémarrent pas comme ça, explique Julien Pantz, responsable du réseau transport d’Enercal. Derrière, il y a toute une phase de reconstruction progressive. On procède par grappe, en partant du plus haut niveau de tension, donc les clients qui sont raccordés sur le 33 000 volt comme EEC ou les métallurgistes pour ensuite descendre au niveau le plus bas, c’est-à-dire le client particulier raccordé en 220 volt."

EEC qui assure la distribution notamment au Mont-Dore et à Nouméa a été immédiatement impacté après l’incident à la SLN. "Le Grand Nouméa est alimenté par six points de livraison Enercal. Et c’est à partir de ces points que l’on distribue l’énergie à nos clients, explique Philippe Mehrenberger, directeur général délégué d’EEC. A 11h07, nous avons perdu l’ensemble de ces six points de livraison." 

Remise en service progressive pour éviter une nouvelle coupure

Raccordé au réseau à 13 heures, EEC n’a pas pu réalimenter immédiatement tous ses clients. "Assez rapidement, le point de livraison du Mont-Dore a été rétabli et nous avons pu raccorder nos clients du Mont-Dore, Normandie et Tina. Mais pour pouvoir réalimenter le gros de nos clients sur Nouméa, il nous fallait absolument les 5 autres points de livraison, qui passent par Ducos et Doniambo et ces points de livraison n’ont été disponibles de manière stable qu’à partir de 15 heures", poursuit Philippe Mehrenberger. 

Pourquoi alors le courant n’est-il revenu que vers 17h-17h30 dans certains quartiers de Nouméa? "La consigne d’Enercal était d’envoyer un mégawatt toutes les deux minutes, ce qui fait que pour 40 mégawatts, ça prend une heure, une heure et demi, estime Philippe Mehrenberger. Car en cas de retour trop rapide, " le risque est qu’une charge trop importante fasse retomber le réseau et qu’il y ait à nouveau un blackout. C’est ce qui s’est passé il y a quinze jours, où, par 4 fois lorsque l’on a eu tout remis en service, l’alimentation a été à nouveau coupée", conclut-il.

Par principe de précaution hier, le réseau électrique SLN a été séparé de celui d’Enercal.

Les explications en images de Marion Thellier et Luigi Wahmereungo-Palmieri :

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