Pourquoi l'élection présidentielle au Pérou impacte le prix du cuivre, mais aussi celui du nickel en Nouvelle-Calédonie

Titres des journaux pendant l'élection présidentielle au Pérou

Le Pérou, deuxième producteur mondial de cuivre, "se dirige vers des jours d'incertitude", a estimé un analyste londonien de la Bourse des métaux de Londres, après que la candidate libérale Keiko Fujimori ait contesté la victoire du "gauchiste" Pedro Castillo.

Au Pérou, le candidat socialiste Pedro Castillo a élargi son avance contre sa rivale de droite Keiko Fujimori lors du vote présidentiel du pays, mais cette dernière a déclaré qu'elle ne céderait pas encore et a allégué des "irrégularités". La Présidentielle est serrée, les deux candidats attendent les résultats définitifs. Léger avantage au candidat socialiste.

Le candidat socialiste Pedro Castillo

Un duel trés serré

Le décompte officiel des élections de dimanche accordait 50,3 % des voix au candidat Castillo contre 49,7 % à Fujimori, sur environ 95 % des suffrages exprimés. Il reste encore à décompter les votes des Péruviens résidant à l’étranger.

Le candidat de gauche avait accusé un retard très marqué dans la capitale Lima, mais qu’il a comblé au fur et à mesure que le dépouillement progressait, à la suite des votes ruraux dans les régions pauvres du pays.

"Il y a une intention claire de boycotter la volonté du peuple", a déclaré Fujimori lors d'une conférence de presse, au cours de laquelle elle a montré des vidéos sur les réseaux sociaux pour étayer ses affirmations, et a accusé les partisans de Castillo d'avoir fraudé.

Elle a également demandé à sa base de présenter de nouvelles preuves, si elles existent, sur les réseaux sociaux. Aucune n’a encore été présentée.

Le parti de Castillo, "Pérou Libre", a répondu sur Twitter qu'il "rejetait" les allégations.

La candidate de droite Keiko Fujimori à l'élection présidentielle au Pérou

Un pays coupé en deux

Les analystes internationaux s'attendaient à un résultat serré et à des jours d'incertitude, de tension avec peut-être un certain niveau d'agitation, mais les accusations de la candidate de droite ajoutent maintenant du carburant à ce scénario.

Le vote a souligné une nette division entre la capitale Lima et l'arrière-pays rural du Pérou, qui a permis la remontée de Castillo. Ce duel des extrêmes oppose "une sulfureuse figure de la droite libérale dure à un novice d’extrême gauche", a souligné le Financial Times de Londres.

Politique minière

Pedro Castillo s'est engagé à changer la constitution et les lois minières de la nation andine, effrayant les producteurs de cuivre et les marchés internationaux. L’ultragauche qui soutient le potentiel vainqueur de la Présidentielle n’hésitant pas à réclamer "une nationalisation des mines et l’expropriation des sociétés internationales", a pointé, sans doute avec exagération, un autre analyste londonien, interrogé par Outre-mer la 1ère.

Partage des richesses

La perspective d'une victoire de Pedro Castillo, un instituteur de 51 ans aux origines rurales et syndicaliste qui s'est engagé à mieux redistribuer les richesses, préoccupait de nombreux investisseurs à Lima, où la Bourse (MSCI Peru) perdait près de 7,69% vers 16:00 GMT.

Les investisseurs s'inquiètent

A l’exception de l’étain Les cours des métaux industriels, cuivre et nickel notamment, ont baissé lundi et mardi au LME de Londres. Le cuivre, surnommé "le roi des métaux" entraînant le nickel dans son sillage, alors que le candidat socialiste dépassait sa concurrente libérale.

"Tout ce que nous voulons, c'est la démocratie, que tout soit démocratique. Que celui qui gagne, l'autre l'accepte et ne crée aucun problème", a déclaré Lili Rocha, une électrice de Lima, à l’agence Reuters, après que des échauffourées ont éclaté la nuit dernière.

Manifestants à Lima, pendant l'élection présidentielle au Pérou

Le secteur minier en question au Chili aussi 

Dans l'intervalle, au Chili, le pays voisin au sud du Pérou, le gouvernement a appelé à une large discussion sur l'avenir du secteur minier, avec de possibles hausses d’impôts sur les sociétés. Le Chili est le premier exportateur mondial de cuivre.

Au Pérou comme au Chili, le fonds de l'air est rouge ; les investisseurs s'inquiètent, les travailleurs pauvres espérent. Les actions des sociétés minières ont chuté depuis lundi ; Jiangxi Copper a perdu 2,7%, Tongling Nonferrous a perdu 2,5% et MMG a perdu 8,3%. Ce dernier exploite l'une des plus grandes mines du monde - Las Bambas au Pérou.

Vote à la présidentielle au Pérou, vote constitutionnel au Chili, on se dirige dans ces deux pays vers une augmentation des taxes sur les sociétés minières. Pourquoi pas ? Mais un certain nombre d’entreprises risquent d’y regarder à deux fois avant d’investir. L’arrivée d’un similimarxiste au Pérou pourrait donc ne pas arranger les choses

Philippe Chalmin, économiste des matières premières, historien et universitaire

 

Rappel

Le Pérou est le second producteur mondial de cuivre, après le Chili. Le métal, qui est le plus utilisé au monde, est essentiel à la transition énergétique. Nation côtière de l’océan Pacifique, le Pérou est situé à 7 700 kilomètres de la Polynésie française avec laquelle il est relié par des liaisons aériennes. Et à 12 000 kilomètres de la Nouvelle-Calédonie.

Mine de Yanacocha exploitée par la société canadienne Newmont mining au Pérou

Cours du cuivre au LME de Londres, le 08/06/21 à 16:50 GMT : 9 938 dollars/tonne -2,95 %

Cours du nickel : 17 895 dollars/tonne -1,05 % (5 jours).