Un médecin du Médipôle a été violemment agressé jeudi 23 mars, vers 6h30. Selon les premiers éléments, il a été étranglé par un père de famille. Ce dernier s’était rendu aux urgences pédiatriques la veille pour son enfant. Un traitement antibiotique a alors été prescrit. Voyant que son état ne s’améliorait pas au bout de 24 heures, le papa est revenu à l'hôpital et s’en est pris à un praticien.
"Une personne a surgi de nulle part", a témoigné le médecin urgentiste, encore sous le choc. "Un homme d’une grande taille, très massif, a proféré des menaces très violente. L’infirmière a essayé de me défendre mais s’est pris plusieurs coups et elle est tombée au sol." Une plainte a été déposée à la gendarmerie voisine, d'Apogoti. L'homme a été placé en garde à vue.
"J’ai vraiment cru qu’il allait me tuer"
"On était bloqué avec cette personne très violente et j’ai vraiment cru qu’il allait me tuer", continue l'homme, qui présentait des marques physiques, mais aussi psychologiques. "Nous avons beaucoup de monde en salle d’attente, ça crée des frustrations et certaines réactions inattendues amènent de la violence."
Son témoignage au micro de Karine Arroyo et Carawiane Carawiane :
"Il y a une espèce de stupéfaction générale"
Afin de soutenir le médecin, à partir de 11 heures, tous les services ont marqué un débrayage collectif, et massif, de 55 minutes. "Le personnel du service, mais aussi l’ensemble du personnel de l’hôpital est complètement choqué. Il y a une espèce de stupéfaction générale, d’effroi…", réagissait Gaël Guyon, chef de service des urgences pédiatriques. "La direction, les soignants, les personnels administratifs… tout le monde est solidaire de cette action.”
Personnel "en souffrance"
“La pédiatrie n’est pas du tout habituée à cette violence. On a régulièrement de l’incivilité. Mais les agressions physiques violentes sont effectivement de plus en plus fréquentes, confirmait-il. Il y a environ trois semaines, un mois, un médecin d’un autre service de pédiatrie a été pris à partie par un papa. Cette violence-là n’a absolument pas sa place dans le cadre de notre activité. Elle est complètement inadaptée. Elle ne fait que mettre en souffrance un personnel déjà en difficulté au quotidien.”
"On ne peut pas continuer comme ça"
Les urgences adultes connaissent-elles aussi une augmentation de la violence, qu'elle soit verbale ou physique. "D’après les retours qu’on a de nos collègues, c’est le cas, sur les transports Samu, sur les appels téléphoniques, directement dans le service : des coups de poings, des insultes…", répond le Dr Guyon. "Rien qui soit justifié. C’est effectivement régulier, de plus en plus régulier et beaucoup trop régulier. Ce qui est dramatique, c’est que les soignants, de plus en plus, viennent au travail avec la boule au ventre. Quand on travaille avec le stress, avec l’émotion, avec la crainte, on ne travaille pas sereinement, on travaille moins bien. C’est un effet boule de neige. On ne peut pas continuer comme ça.”
Le compte-rendu de ce mouvement par Karine Arroyo et Carawiane Carawiane :
Au lendemain des faits, vendredi 24 mars, une cellule psychologique était proposée aux soignants qui en ressentaient le besoin. La victime principale a été arrêtée et présente trois jours d’ITT. Son agresseur présumé doit passer en comparution immédiate au tribunal correctionnel le mardi 28 mars.
Le gouvernement apporte son soutien
Dans un communiqué, le gouvernement a apporté "son soutien total au médecin victime de ces faits graves et sa solidarité unanime envers tous les professionnels de santé" et condamné "fermement ces actes inacceptables, qui ne peuvent être tolérés" dans les structures médicales.
La province Sud, aussi
Même réaction de la province Sud, soutien et solidarité, envers le pédiatre et l’infirmière. Son communiqué dénonce des faits "inacceptables et inexcusables dans un espace dédié aux soins qui devrait être sanctuarisé". La collectivité indique au passage avoir "renforcé la sécurité" dans ses centres médico-sociaux.
Communiqué de la Cafat
"Emotion" témoignée aussi par le conseil d'administration et la direction générale de la Cafat, qui condamnent "fermement ces actes inexcusables. Même si nos métiers peuvent conduire à des relations tendues avec nos publics, aucune agression n'est acceptable, chaque collaborateur doit être respecté, en toutes circonstances."
Le spectre du désert médical
"Nous voyons de plus en plus de situations identiques se produire", s'inquiète le Syndicat des médecins libéraux. Il "redoute une hausse croissante de faits similaires envers tous les soignants, ce qui risque d’accentuer la désertification médicale". Les membres du SML, "conscients de l’inquiétude des Calédoniens face à cette difficulté d’accès aux soins" incitent la population à préserver leurs soignants en restant solidaires et à se comporter de manière raisonnée". Car "l’amélioration de l’offre de soin et du temps dont les médecins disposent pour soigner la population reste notre préoccupation principale".