Reine Becker va rendre son tablier de lapidaire

Reine Becker dans sa boutique de Robinson.
La Nouvelle-Calédonie a ses pierres comme la Polynésie a ses perles, aime à comparer Reine Becker. Depuis 1984, elle recherche les roches, prépare les ébauches et fabrique des pièces uniques. Mais la lapidaire du Caillou s’apprête à fermer pour de bon son atelier mondorien.
Le nom de l’enseigne qui flotte à Robinson rappelle que l’atelier de lapidaire se situait autrefois au Faubourg-Blanchot. Chez les «Artisans du Faubourg», Reine Becker s’apprête à mettre pour de bon un terme à trente-cinq ans d’une activité qui a fait sa renommée : façonner les pierres du sous-sol calédonien et les transformer en objets d’art.
 
 

Tour de Calédonie des pierres

C’est en 1984 qu’elle commence à sillonner le bien-nommé Caillou, et à faire la coutume pour obtenir les pierres exploitables. «Il y a à Népoui beaucoup de pierres différentes, c’est le nid des serpentines, raconte Reine Becker. Si vous allez dans le Nord, vous trouvez un peu plus de pierres dures, le quartz… Vous avez le jade que l’on trouve à l’île Ouen, à la rivière des Pirogues… La rivière Bleue, on ne l’exploite plus, c’est interdit maintenant. Vous avez la zoïsite, les gabbros, l’amphibole…» 
 
 

«Ivoire de la mer»

La lapidaire a aussi mis en valeur le jaspe, le bois pétrifié, le calcaire, le marbre, le grès, la calcédoine ou l’olivine. Avec une spécialité : le bénitier fossile. «On a l’autorisation de pouvoir travailler la matière. Le bénitier, je considère que c’est l’ivoire de la mer.» Ces beautés présentes dans notre sous-sol sont amenées à devenir hache-ostensoir à pierre blanche, lampe élégante, horloge ajourée, bijou rocailleux et autre boule, porte-couteau, poisson, etc. 
 
  

Fermé en fin d'année

Un artisanat d’art qui fait l’objet de remises : l’atelier fermera définitivement ses portes dans quelques semaines, faute de repreneur. En attendant, il ne fait plus tourner ses meules que pour quelques amies, comme Armelle. «On espère que, les unes ou les autres, on va continuer à faire vivre cet art, lance-t-elle. Mais on ne pourra le faire que pour nous, parce qu’on n’a pas d’atelier.» 
 
  

Un métier qui se perd ? 

«Dans le temps, il y avait beaucoup de personnes qui travaillaient un peu chez eux et qui fournissaient les curios. A l’heure qu’il est, il ne reste plus personne, déplore Reine Becker. Je suis la dernière vraiment qui représente le lapidaire puisque j’ai une entreprise très structurée, j’ai eu jusqu’à quatre employés.» 
  

Savoir-faire calédonien

«J’ai fait ce métier-là avec amour et passion, c’est ce qui m’a sauvée sinon, bien entendu, il y a longtemps que j’aurais fermé, poursuit-elle. J’ai donné, plus que donné, pour montrer le savoir-faire sur le territoire en ce qui concerne les pierres et […] c’est en train de tomber aux oubliettes.» Reine Becker regrette un manque de reconnaissance et d’intérêt. «Tout est fait main, c’est fabriqué avec notre matière première sur le Caillou… J’aurais aimé qu’on fasse un peu plus connaître cette filière.»

Reportage radio de Malia-Losa Falelavaki : 

Reine Becker, lapidaire, reportage


Extrait d'interview par Malia-Losa Falelavaki : 

Reine Becker, lapidaire, interview

Le reportage de Sheïma Riahi et Michel Bouilliez 
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